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Moulay Hafid Elalamy - Mohamed Benchaâboun: le gouvernement orphelin de deux grosses pointures

Moulay Hafid Elalamy - Mohamed Benchaâboun: le gouvernement orphelin de deux grosses pointures

Ils ne font pas partie de l’équipe gouvernementale qui va présider aux destinées du Royaume durant les cinq prochaines années, mais Benchaâboun troque sa tunique d’argentier du Royaume pour celle de diplomate.

Lui, comme MHE, et bien d’autres sont des profils dont ce Maroc qui se modernise a cruellement besoin.

 

Par D. William

 

Le nouveau gouvernement a pris ses marques, deux semaines après sa constitution et sa révélation à l’opinion publique. Entre les rappelés et les «bleus», qui seront soutenus par les secrétaires d’Etat, la team Akhannouch sera au complet et prête à engager les nombreux chantiers structurant susceptibles de faire franchir au Maroc un nouveau cap dans le processus de développement et de modernisation de son économie. Ce gouvernement a cependant connu son premier couac, avec la nomination de Nabila Rmili à la tête du ministère de la Santé et son remplacement par Khaled Aït Taleb, seulement une semaine après sa prise de fonction. Ce ministère a d’ailleurs fait l’objet de moult spéculations avant que la composition du gouvernement ne soit dévoilée.

Un nom circulait en particulier pour occuper ce poste : celui de Moulay Hafid Elalamy, l’ancien ministre de l’Industrie, du Commerce et de l’Economie verte et numérique. Un ministère qui, pour certains, aurait pu parfaitement lui convenir. Mais MHE n’en a pas hérité, ni d’aucun autre d’ailleurs. On ne nous donnera certainement jamais la raison officielle, mais il n’est plus tout simplement ministre. Des regrets  ? Oui, nous devons certainement en avoir. Surtout si l’on se fie à ce qu’a affirmé l’actuel chef de gouvernement, Aziz Akhannouch, au moment de constituer son équipe : «nous allons privilégier la compétence des profils proposés pour occuper les postes ministériels».

Si ce n’est que la compétence, convenons que MHE a largement sa place dans ce nouveau gouvernement. On peut ne pas apprécier l’homme (d’ailleurs, on ne peut être aimé de tous), mais reconnaître la qualité de son travail. Rendons donc à César ce qui lui appartient ! Quand MHE a dévoilé son fameux Plan d’accélération industrielle (PAI), à peine n’était-il pas la risée des milieux d’affaires et des observateurs avertis, tellement ses ambitions paraissaient démesurées, voire utopiques. Aujourd’hui, six années plus tard, tout le monde y adhère et les critiques sont moins bruyantes.

Le Maroc a fait un important bon industriel, avec un PAI qui reste un levier incontournable dans son processus d’industrialisation. Et ce n’est pas pour rien que, dans tous les secteurs d’activité, les opérateurs se bousculent pour avoir leur écosystème, et que les investisseurs étrangers trouvent, en le Royaume, un point d’ancrage plein d’opportunités. Certes, tous les objectifs n’ont pas été atteints, mais le secteur industriel se porte bien mieux qu’auparavant. MHE est parti d’un postulat simple : placer la barre très haut dès le départ et essayer d’atteindre ses objectifs. Les résultats ont suivi. Mais il a essuyé au passage de véritables volées de bois vert.

On lui a tantôt reproché de faire du business tout en étant ministre, en se taillant notamment des lois sur-mesure susceptibles de faire prospérer ses affaires. On lui a même reproché d’être riche, comme si cela était une tare. Il est peut-être temps de se demander ce dont le Maroc, avec toutes ses ambitions de développement, a besoin. De politiciens ou de vrais managers ? Politicien, MHE ne l’est pas. Loin de là. Même s’il est affilié au RNI, il reste avant tout un manager.

Qui a essayé d’importer cette touche managériale qui a fait de lui un homme d’affaires à succès, à la gestion d’un ministère qui avait cruellement besoin d’un coup de neuf et d’une feuille de route à la mesure des aspirations du Maroc moderne. Il semble utile, à ce titre, de rappeler un extrait du discours du Roi, prononcé à l’occasion de la fête du Trône, le 29 juillet 2017 : «(…) Cette réalité paradoxale est encore accentuée lorsqu’on établit un parallèle entre, d’une part, le secteur privé rendu efficient et compétitif grâce à un modèle de gestion organisé autour des notions de suivi, de contrôle et d’incitation, et, d’autre part, le secteur public, en particulier l’Administration publique, qui souffre d’une faible gouvernance et d’une productivité insuffisante».

Que des acteurs du privé basculent dans le public ne peut donc être, au final, que bénéfique pour le Royaume. Et cette expertise et cette expérience acquises dans le privé, MHE les a ramenées dans ses bagages et, surtout, glissées dans ses rapports avec les industriels. Rappelez-vous ce qu’il disait alors qu’il était patron des patrons : «en tant que président de la CGEM, je suis fier de voir des PME vendre leur expertise à l’international, je suis fier que des opérateurs exportent du textile et des sanitaires dans un marché aussi difficile que la Chine, et je suis particulièrement fier quand je suis en face d’opérateurs conquérants qui prennent des risques», disait-il.

En leur transmettant ses profondes convictions, il a permis aux industriels de faire preuve de réactivité et d’agilité dans la phase la plus aigue de la crise sanitaire liée à la covid-19. Sous la houlette de MHE, ils ont ainsi su rapidement se reconvertir pour assurer au Maroc l’autosuffisance en masques, et même en exporter. Le programme «ImtiazTechnologies Covid-19» lancé par le ministère a permis aux PME marocaines d’exprimer leurs compétences en matière d’innovation, à travers la fabrication de masques et équipements de protection individuelle, de gels hydroalcooliques et produits désinfectants et divers équipements utilisés dans la lutte contre la pandémie.

Le ministère a aussi pu reconstruire l’unique usine marocaine de production d’éthanol, et ce en moins d’une semaine. Les exemples ne manquent pas ! Bref  ! Compétent, distingué et excellent orateur, MHE aura été à la hauteur de sa mission durant son mandat. Sa tchatche nous manquera.

Benchaâboun, une tête bien pleine

Tout ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément. On ne pouvait trouver mieux que cette citation de Nicolas Boileau pour la coller à l’image que renvoie l’ancien ministre de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’Administration, Mohamed Benchaâboun, lorsqu’il prend la parole. Une tête bien pleine, où tout est bien ordonné. Cet homme posé, qui dégage la sérénité en toute circonstance, n’en dit jamais trop, mais toujours suffisamment pour contenter tout le monde.

De tous les ministres sortants, c’est lui qui aura traversé cette législature sans avoir suscité la moindre controverse. Et Dieu sait qu’il a été constamment au-devant la scène. Entre la réforme de l’Administration, la gestion des finances publiques et le pilotage du Comité de veille économique, il aura été sur tous les fronts. La crise sanitaire et ses répercussions économiques ont cependant rendu difficile la fin de son mandat.

Difficile dans le sens où il a enchaîné les nuits blanches pour mettre en place, avec diligence, tous les mécanismes de soutien à l’économie et aux ménages qui ont permis d’atténuer substantiellement les impacts néfastes de cette crise. Les opérateurs économiques lui doivent une fière chandelle et saluent unanimement sa rigueur et son sens de l’écoute. Mais Benchaâboun est exigeant.

Une exigence qu’il puise de la parfaitement maîtrise des différents dossiers sous sa responsabilité et qui fait de lui un interlocuteur redoutable. La communauté des affaires ne dira pas le contraire, qu’elle soit de la sphère économique ou encore du marché financier. Benchaâboun a ceci de commun avec Moulay Hafid Elalamy qu’il n’est pas un politicien. Il n’en a pas la fibre, même s’il arbore les couleurs du RNI. Il est plutôt un bon manager.

Comme il l’a été lorsqu’il dirigeait la Banque Populaire, Groupe qu’il a développé pour en faire un acteur de référence dans le microcosme bancaire national et régional. Il est passé de banquier très respecté au sein de la profession à argentier du Royaume tout aussi très respecté. Des regrets de le voir céder son fauteuil ministériel ? Evidemment que oui. Ce n’est pas mettre la pression sur son successeur, Nadia Fettah Alaoui, mais il sera difficile de faire oublier Benchaâboun, qui n’a pourtant passé que 3 ans à la tête du ministère des Finances.

Aujourd’hui donc, le nouveau gouvernement est orphelin de deux grosses pointures. Qui s’en vont avec la satisfaction du devoir accompli. D’avoir servi leur pays avec patriotisme et humilité. Sans triomphalisme aucun. Maintenant, ne nous lançons pas dans des conjectures inutiles pour essayer de justifier leur absence de l’équipe gouvernementale ! Ils pouvaient certes rempiler, puisque leur formation politique est arrivée en tête des législatives.

Mais le voulaient-ils vraiment ? En tout état de cause, Elalamy et Benchaâboun, comme d’ailleurs bien d’autres compétences de ce pays, sont des profils qui ont beaucoup à apporter à ce Maroc qui se modernise. Le Royaume a encore besoin d’eux  ! Tout simplement. Et c’est ce qui légitime que l’ex-argentier du Royaume ait été nommé dimanche dernier ambassadeur du Maroc en France.

 

 

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