- En se modifiant, le variant ne devient pas plus virulent, mais plutôt plus transmissible et donc plus contagieux.
- Nul ne sait quand le coronavirus cessera de muter.
- Pr Said Motaouakkil, membre du Comité scientifique et technique national, docteur en biologie, ancien chef du département de réanimation médicale au CHU, actuellement directeur d’une clinique privée, fait le point sur la situation épidémiologique actuelle au Maroc.
- L’anesthésiste-réanimateur revient également sur les variants, l’arrivée du vaccin et la campagne de vaccination.
Propos recueillis par Ibtissam. Z.
Finances News Hebdo : Quelle est votre évaluation de la situation épidémiologique actuelle au Maroc ?
Pr Said Motaouakkil : Concernant la situation épidémiologique au Maroc, nous assistons à une baisse du nombre de cas diagnostiqués, une baisse du ratio des tests positifs par rapport aux tests pratiqués, ainsi qu’une baisse continue du nombre de décès journaliers et du nombre des patients admis en réanimation. La pression sur les structures hospitalières publiques et privées a également baissé. Cette situation est marquée aussi par l’apparition du premier cas du variant anglais sur le territoire national, qui reste le seul cas détecté pour l'instant.
F.N.H. : Pourquoi les variants du coronavirus inquiètent-ils autant ?
Pr S. M. : Les variants sont inquiétants dans la mesure où ils correspondent à des mutations qui se caractérisent par une rapidité de diffusion, donc un indice important de contagiosité. De là, ils vont affecter plusieurs personnes dans un laps de temps très court, ce qui va impacter la pression sur les systèmes de santé. Les variants posent aussi le problème de la validité des tests biologiques de diagnostic, ainsi que la validité des mesures préventives vis-à-vis de ces mutations et l'efficacité des vaccins nouvellement développés contre la Covid. Les variants actuels et leur large diffusion vont aggraver la situation sanitaire en augmentant le nombre de patients atteints, le nombre de décès avec toutes les conséquences économiques, sociales et psychologiques qu’elles peuvent entraîner…
F.N.H. : Les vaccins Sinopharm et AstraZeneca sur lesquels le gouvernement marocain a misé sont-ils aujourd’hui efficaces contre les nouveaux variants ?
Pr S. M. : Jusqu'à ce jour, tous les vaccins anti-Covid développés récemment restent heureusement actifs sur les variants. A l'instar des autres vaccins, ceux d'AstraZeneca et de Sinopharm sont actifs sur les variants. Pour l'instant, le Maroc a reçu officiellement 2 millions de doses du vaccin AstraZeneca, ce qui va permettre de vacciner 1 million de candidats, comme annoncé par le ministère de la Santé. Et ce, dans l’attente de l’arrivée mercredi du vaccin chinois Sinopharm. Le public ciblé dans un premier temps est le personnel médical, âgé de plus de 40 ans, le personnel de première ligne, notamment les autorités sécuritaires, l’armée, le personnel de l'éducation nationale de plus de 45 ans. Suivront les personnes âgées de plus de 75 ans.
F.N.H. : Que sait-on des variants du virus apparus à l'étranger, notamment en Angleterre, au Brésil, en Afrique du Sud ou encore au Japon, qui inquiètent les autorités sanitaires ? Allonsnous vers une 3ème vague ?
Pr S. M. : Depuis l'apparition de la pandémie, la Covid-19 a connu plusieurs mutations qui ont été découvertes par la surveillance génomique du virus. Nous assistons actuellement à l'émergence de trois principales variantes : la souche anglaise, qui a atteint plus de 60 pays, la souche brésilienne, qui est la même que la souche japonaise, présente dans plus de 20 pays, et la souche sud-africaine. La souche anglaise se caractérise par une forte contagiosité, avec une vitesse de diffusion rapide mettant sous tension le système sanitaire, et une augmentation du nombre de morts en absolu. Elle touche aussi les jeunes et les enfants. Les problèmes posés par ces souches sont la mise sous tension du système de santé, le problème de l'efficacité des tests de diagnostics et le doute sur l'efficacité des vaccins mis récemment sur le marché. Les premières réponses dont nous disposons sont comme suit :
a) la virulence ne semble pas plus importante, ils sont moins mortels;
b) les tests de diagnostic sont valables pour ces souches;
c) les vaccins restent efficaces contre ces souches. Ces trois variants sont responsables d'une troisième vague dans les pays qui connaissent actuellement cette pandémie. En Angleterre, par exemple, ils sont responsables d'une saturation du système de santé, avec une augmentation du nombre de décès quotidien. Par ailleurs, nul ne peut attester quand le Coronavirus cessera de muter.
F.N.H. : Les réunions s'enchaînent pour vous, en tant que membre du Comité scientifique et technique national. Quel est l’apport du comité concernant la campagne de vaccination, les variants, les vaccins … ?
Pr S. M. : Le rôle du Comité technique et scientifique est de suivre l'évolution de la pandémie sur les plans national et international. Il répond aux questions posées par le département de la Santé et les autres départements en émettant des recommandations. Le comité se focalise sur l'évolution dynamique de la pandémie, fait le suivi des développements des variants, des résultats des différents vaccins dans le monde et le suivi de leur sécurité ...