Le Maroc et la Belgique ambitionnent d’établir un partenariat stratégique, tourné vers l’avenir, à la hauteur des attentes et du potentiel qui existent entre les deux pays.
Par M. Ait Ouaanna
Le Maroc et la Belgique entretiennent, certes, une relation amicale de longue date, mais leurs échanges commerciaux demeurent bien en deçà du potentiel existant. Une réalité mise en lumière à maintes reprises par les représentants officiels des deux Royaumes, réunis à Rabat à l’occasion de la 3ème session de la Haute commission mixte de partenariat Maroc-Belgique. Co-présidée par le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, et le Premier ministre belge, Alexander De Croo, cette réunion s’est tenue le 15 avril 2024 à Rabat en présence notamment de plusieurs membres du gouvernement marocain et d’une importante délégation belge.
Cette dernière est composée du vice-Premier ministre et ministre de la Justice, Paul Van Tigchelt, de la ministre de l’Intérieur, Annelies Verlinden, de la ministre des Affaires étrangères, Hadja Lahbib, de la secrétaire d’État à l'Asile et la Migration, Nicole De Moor, et de la présidente de Comité de direction au ministère des Affaires étrangères, Theodora Gentzis. Lors de cet évènement, les deux chefs de gouvernement se sont tout d’abord félicités de l'excellence des relations d'amitié et de coopération qui existent entre les deux pays et du dialogue politique régulier. Dans cette même veine, Akhannouch et son homologue belge ont salué le rôle que joue la communauté marocaine établie en Belgique, et la communauté belge résidant au Maroc, en tant que piliers de rapprochement entre les deux Royaumes. Et de rappeler que le 17 février dernier a été marqué par la commémoration des 60 ans de l’Accord bilatéral de main- d’œuvre entre le Maroc et la Belgique.
Alexander De Croo a par ailleurs salué les réformes lancées au Maroc au cours de ces vingtcinq dernières années, ayant pour ambition de former une société et une économie marocaines plus ouvertes et dynamiques. Dans ce sillage, le Premier ministre belge a mis en relief l’importance du nouveau Modèle de développement, de la régionalisation avancée et de nombreuses réformes ambitieuses, particulièrement celle du Code de la famille.
Une vision commune
Les deux pays aspirent clairement à construire un partenariat stratégique «à la hauteur des attentes et du potentiel existants», une vision qui a été constamment soulignée par les deux chefs de gouvernement. S’exprimant autour des moyens de renforcer la coopération bilatérale, Akhannouch et De Croo ont mis en avant leurs priorités et objectifs respectifs. Dans ce sens, ils ont exprimé leur volonté de renforcer le commerce et les investissements, de coopérer en matière du climat, de transition énergétique par le développement des énergies renouvelables et des molécules vertes, ainsi qu’en matière de gestion de l’eau, des infrastructures et du transport.
Dans le détail, les deux chefs de gouvernement ont fait part de leur intention de développer davantage le partenariat économique, en encourageant notamment les entreprises belges et marocaines à explorer les opportunités offertes de part et d’autre en matière d'investissement. Ils ont également exprimé leur ferme résolution de renforcer davantage la coopération dans le domaine de la transition énergétique, une ambition qui commence déjà à prendre forme suite à la signature, le jour même, d’un Mémorandum d’entente (MoU) entre le Maroc et la Belgique, portant sur les énergies vertes. Signé par la ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, Leila Benali, et la ministre des Affaires étrangères belge, Hadja Lahbib, ce MoU vise à encourager les échanges dans ce domaine, à soutenir les efforts fournis par les deux parties pour la production et la distribution de l’hydrogène vert et de l’ammoniac pour la consommation locale ainsi que pour l'export régional et international.
Les deux chefs de gouvernement ont en outre exprimé leur volonté de promouvoir une coopération judiciaire innovante, alignée sur les normes internationales les plus élevées, pour une gestion efficace des affaires judiciaires transfrontalières. Ils ont également exprimé leur ambition de développer davantage leur coopération policière et d’intensifier et de consolider la coopération migratoire dans divers domaines, tels que le retour, la réadmission et la lutte contre le trafic d’êtres humains, ainsi que d’améliorer les mécanismes pour la mobilité des professionnels et la migration légale.
Développer les affaires
En marge de cette 3ème session de la Haute commission mixte de partenariat Maroc-Belgique, la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) a organisé, mardi 16 avril 2024 à Casablanca, la rencontre économique MarocBelgique. Cet événement, marqué par la présence du chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, et du Premier ministre belge, Alexander De Croo, a été l’occasion de présenter le climat des affaires au Maroc et en Belgique, ainsi que les opportunités d'investissement dans les secteurs de l'énergie et des infrastructures, en vue d'établir de nouveaux partenariats et renforcer la coopération économique entre les deux Royaumes. Dans son mot d’ouverture, le président de la CGEM, Chakib Alj, a d’abord indiqué que la coopération économique entre le Maroc et la Belgique repose actuellement sur des fondamentaux solides.
«En plus de la volonté et du cadre politique, il existe un maillage important d'entreprises belges au Maroc dans divers secteurs stratégiques, ainsi qu'une grande diaspora marocaine établie en Belgique, d’environ un demi-million de personnes représentant la deuxième communauté d'origine étrangère du pays. Cette diaspora compte énormément de hauts potentiels et d’entrepreneurs exceptionnels», a-t-il précisé. En revanche, le patron de la CGEM a fait remarquer que les chiffres relatifs aux échanges commerciaux entre les deux pays, notamment les 2,3 milliards de dirhams enregistrés en 2023, ne reflètent pas réellement le potentiel existant.
«Nous gagnerions à développer ces échanges, mais nous gagnerions aussi et surtout à promouvoir davantage l’investissement entre les entreprises marocaines et belges. En effet, c'est l'investissement qui drive le commerce et qui accélère la croissance», a-t-il souligné. S’exprimant autour des mesures «pragmatiques» à mettre en place en termes d’investissement et de coinvestissement dans l’infrastructure et l’énergie, Chakib Alj a relevé que le Maroc a fait du développement des énergies renouvelables son fer de lance, rappelant que le Royaume ambitionne d’atteindre une part de 52% de sources renouvelables du mix électrique national d’ici 2030.
«La convergence entre l'expertise technologique belge dans les EnR et l’expérience du Maroc dans le solaire et l’éolien, pourra aboutir à des projets très intéressants dans la production, le stockage et l'exportation d'énergie propre et abordable. Il s’agit d’un enjeu de taille dans un contexte de choc énergétique et au moment où l’économie mondiale est appelée à se décarboner», a-t-il affirmé. De son côté, Ryad Mezzour, ministre de l'Industrie et du Commerce, a mis l’accent sur la nécessité de renforcer la coopération économique entre le Maroc et la Belgique.
«Partout à travers le monde, nous assistons actuellement à de multiples crises qui impactent notre pouvoir d’achat et notre compétitivité. De ce fait, nous n’avons pas d'autre choix que d’avancer ensemble pour ne pas risquer de rater un autre rendezvous de développement et d’intégration», a-t-il souligné. Et de poursuivre : «L’Europe a souvent regardé cette région nordafricaine comme une zone de sécurité énergétique. Cette zone est aujourd’hui en plein développement; elle a un potentiel, elle a appris à se structurer et le Maroc en est le parfait exemple. Le Royaume a fortement investi dans ses infrastructures, son ouverture économique, son potentiel humain, sa capacité à attirer des opérateurs au niveau mondial, et a réussi à maintenir la compétitivité des entreprises malgré une conjoncture extrêmement défavorable».
Mezzour a en outre indiqué que les mécanismes mis en place par le gouvernement marocain pour attirer les investisseurs étrangers sont très incitatifs, notant que le Royaume dispose de l’une des meilleures compétitivités productives au monde. «Ce n’est pas un hasard si autant d’opérateurs internationaux ont choisi le Maroc. La plateforme d’investissement marocaine est l’une des plus saines, des plus stables et des plus compétitives au monde et les perspectives sont encore plus importantes. Le Maroc ambitionne de casser le fameux plafond de verre pour pouvoir développer davantage sa capacité à répondre aux nouveaux enjeux du monde», fait-il savoir.
Dans le même ordre d’idées, le ministre a mis en avant les principaux atouts du pays. «Le Maroc dispose d’une main- d'œuvre qualifiée et de talents exceptionnels et il s’agit de notre plus grand trésor. Aussi, le Royaume détient un mélange unique de proximité, de stabilité, de ressources solaires et éoliennes et foncières, ce qui constitue un atout majeur de compétitivité et de positionnement stratégique au niveau de la sécurité énergétique du monde, et particulièrement de l’Europe», a précisé le ministre.
Il est à noter que dans le cadre de la 3ème réunion de la Haute commission mixte de partenariat MarocBelgique, les deux Royaumes ont signé une feuille de route de coopération. Cette dernière énumère les actions menées dans le cadre du dialogue politique et trace les perspectives de la coopération bilatérale dans divers domaines, notamment la transition énergétique, la migration, la sécurité, et les droits de l'Homme.