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Crise agricole en Europe: Quel impact sur les exportations marocaines ?

Crise agricole en Europe: Quel impact sur les exportations marocaines ?

Depuis plusieurs semaines, les exportateurs marocains sont dans le viseur des agriculteurs européens grévistes qui les accusent, entre autres, de concurrence déloyale et de non-respect des normes sanitaires. Défendant bec et ongles la qualité des produits marocains, la Comader souligne la nécessité de mettre fin à la dépendance aux marchés européens en diversifiant les débouchés.

 

Par M. Ait Ouaanna

La crise des agriculteurs en Europe, notamment en France et en Espagne, met sous pression les exportateurs marocains qui s’inquiètent des éventuelles répercussions de ce mouvement sur leur activité. Cela fait plusieurs semaines déjà que le monde agricole européen est en ébullition. A travers le continent, les agriculteurs se plaignent d’un salaire trop bas, de lois environnementales trop restrictives et, surtout, d’une concurrence jugée déloyale de la part de certains pays extra-UE, particulièrement le Maroc et l’Ukraine. Ils dénoncent également le non-versement des aides de la Politique agricole commune de l’Union européenne et réclament des taxes moins élevées ainsi que des subventions plus équitables.

Jour après jour, la mobilisation gagne du terrain. Pour exprimer leur ras-le-bol, agriculteurs et transporteurs se rassemblent au niveau des autoroutes, manifestent, bloquent la circulation et vont même jusqu’à déverser et incendier des cargaisons de fruits et de légumes en provenance de pays hors - Europe. En de telles circonstances, le transit des marchandises entre le Maroc et l’Union européenne, plus grand partenaire commercial du Royaume, subit de sérieuses perturbations. Les embouteillages engendrés par les manifestations au niveau des points de transit ont, en effet, induit des retards de livraison des marchandises.

Dans un récent communiqué, la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (Comader) a exprimé son inquiétude quant aux «attaques récurrentes et infondées dont les produits marocains font l'objet» et a dénoncé «la stigmatisation médiatique dont les agriculteurs marocains sont les victimes collatérales». «Nous subissons une attaque anormale de la part des agriculteurs français et espagnols en particulier. Ces attaques visent nos exportations agricoles, spécialement la tomate. Les prétextes avancés par les agriculteurs européens sont complètement faux et nous les rejetons à 100%. Il est vrai qu’au Maroc, la main-d'œuvre est moins chère qu’en Europe, mais il faut prendre en considération le fait que nous importons pas mal de produits, dont les semences, les engrais et les produits phytosanitaires», nous a expliqué Rachid Benali, président de la Comader.

«La plupart des intrants sont importés, ce qui fait qu’ils nous coûtent plus chers par rapport à d’autres pays. Ainsi, la main-d'œuvre demeure le seul facteur de production qui nous revient moins cher. D’ailleurs, concernant les tomates dont 90% proviennent d’Agadir, elles sont irriguées par l’eau obtenue par dessalement, ce qui coûte cher», poursuit-il. Par ailleurs, la Comader a réfuté les accusations formulées par les agriculteurs européens selon lesquelles les produits étrangers, notamment marocains, ne répondent pas aux exigences réglementaires et aux normes de sécurité sanitaire. Dans ce sens, l’organisme a assuré que les produits agricoles marocains exportés vers l'UE se conforment «strictement et sans exception» aux exigences réglementaires des marchés de destination. Et de préciser que les produits marocains sont contrôlés par les autorités marocaines préalablement à leur exportation ainsi que par les autorités européennes avant leur entrée sur les marchés européens.

«Nos produits sont fiables et de bonne qualité, et pour précision, nous utilisons les mêmes produits que ceux utilisés en Europe. D’ailleurs, les restrictions imposées par l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) sont plus strictes que celles appliquées en Europe. Certains produits ont été carrément retirés du marché rien que parce qu’ils ont été signalés ailleurs», nous indique Rachid Benali. Réagissant aux accusations émises par les agriculteurs européens, l’ONSSA a de son côté affirmé s’engager à promouvoir des pratiques agricoles respectueuses de l'environnement et de la sécurité sanitaire et alimentaire. Dans le même ordre d’idées, l’Office a précisé avoir mis en œuvre une série de mesures pour garantir la sécurité des produits phytopharmaceutiques.

«Depuis 2018, 56 substances actives ont été retirées et l’usage de 13 autres a été restreint. Avant d’être mis sur le marché, les produits phytosanitaires sont soumis à une évaluation stricte par des experts qui vérifient leur efficacité et leur sécurité vis-à-vis des êtres humains, des animaux et de l'environnement», ajoute la même source. Il est à noter que d’après un comparatif des notifications RASFF (Rapid Alert System for Food and Feed) émises par l'Union européenne durant l'année 2023, le Maroc respecte parfaitement les normes européennes, tous produits confondus. En effet, sur une liste des 15 principaux exportateurs vers l'UE, le Maroc occupe la 3ème meilleure position en termes de conformité.

Interrogé sur l’incidence de ce mouvement de protestation sur les exportations agricoles marocaines, le président de la Comader souligne que l’impact reste pour l’instant minime  : «certes, ces manifestations vont influencer nos ventes, mais l’Europe a besoin de nos tomates ! Par conséquent, d’ici la prochaine saison, le problème sera fort probablement résolu. Mais s’agissant de l’avenir, il va falloir trouver d’autres solutions». A cet égard, Rachid Benali estime qu’il est indispensable de mettre fin à cette sorte de dépendance vis-à-vis des marchés européens, en diversifiant les débouchés. 

 

 

 

 

 

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