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Croissance : Des objectifs déjà caducs

Croissance : Des objectifs déjà caducs

Les prévisions les plus optimistes tablent sur une croissance de 1,8% en 2022 et 4,6% en 2023.

Doubler le PIB par habitant à l’horizon 2035 ressemble de plus en plus à une clause de style.

 

Par D. William

 

Rappelons tout d’abord un élément important : l’ambition du Maroc est de franchir un nouveau palier de croissance, conformément aux objectifs fixés dans le cadre du nouveau modèle de développement. Concrètement, il s’agit d’atteindre un rythme moyen annuel supérieur à 6% afin de pouvoir doubler le PIB par habitant à l’horizon 2035. A-t-on mis la barre trop haut ?

Finalement, et si le taux de croissance de 7,3% enregistré en 2021 n’était… qu’un accident  ? Un accident dû à une bonne pluviométrie grâce à laquelle le Royaume a réalisé une campagne céréalière 2020- 2021 record de près de 103,2 millions de quintaux contre 32,1 millions de quintaux en 2019-2020, soit une hausse de 221%. Et c’est là la principale problématique de l’économie nationale : la croissance reste très dépendante du comportement du secteur agricole, et donc de la pluviométrie. Faute d’une transformation structurelle profonde du tissu économique, elle est condamnée à rester assez volatile. Pour cet exercice 2022, les projections les plus optimistes tablent sur un taux de croissance du PIB de 1,8%.

La dernière en date est celle de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), qui table sur une croissance du PIB de 1,2% cette année, impactée par les «conditions météorologiques défavorables» et la «guerre en Ukraine». Cette prévision prend en considération «les effets de la sécheresse, qui devrait exercer une pression sur les prix alimentaires intérieurs et obliger le pays à augmenter ses importations alimentaires, également à un prix international plus élevé». De même, les perturbations de la chaîne d'approvisionnement mondiale constituent un frein supplémentaire à la croissance, ajoute l’institution financière.

 

Ce que ça coûte

En fonction des saisons agricoles, la croissance économique joue au yo-yo. Dès lors, le Maroc est très mal parti si tant est qu’il veut atteindre une croissance annuelle moyenne de 6% à l’horizon 2035 telle qu’arrêtée dans le NMD. Cet objectif ressemble de plus en plus à une vue de l’esprit. D’autant que pour l’exercice 2023, les prévisions restent également en deçà des ambitions du Royaume. Selon Bank Al-Maghrib, sous l’hypothèse d’une récolte moyenne de 75 millions de quintaux, la valeur ajoutée agricole augmenterait de 17%, portant la croissance à 4,6%.

Tout autant, le Fonds monétaire international s’aligne sur cette même prévision de croissance. Et tout cela coûte au Maroc. Dans une interview accordée à Finances News Hebdo en août dernier, l’économiste Najib Akesbi chiffrait 1 point de croissance à «près de 11 Mds de DH». Chaque point de croissance perdu équivaut donc à un «manque à gagner» potentiel de 11 Mds de DH dans l’absolu. Le calcul est vite fait en se fiant aux données communiquées par le chef de gouvernement, Aziz Akhannouch, pour qui l'économie marocaine devrait enregistrer un taux de croissance entre 1,5% et 1,7% en 2022, loin des 6% du NMD.

Un NMD qui a défini comme impératifs : «la modernisation du tissu économique existant afin qu’il soit plus formalise, concurrentiel et productif; la diversification pour introduire de nouvelles activités et de nouveaux savoir-faire; la montée en gamme pour augmenter la valeur ajoutée locale; et enfin l’internationalisation pour orienter les entreprises vers l’export». A l’évidence, ce virage stratégique n’a pas encore été entamé. Pis encore, la crise sanitaire a mis à nu de façon sévère les fragilités du modèle économique actuel et la nécessité d’un profond changement de paradigme pour inscrire l’économie nationale dans un sentier de croissance vertueux. Mais l’économie est toujours scotchée dans les starting-blocks.

A attendre. Quoi ? Ce déclic qui va enfin emballer la machine, comme espéré lors de l’annonce d’un plan de relance ambitieux, avec 120 Mds de dirhams à injecter dans l’économie nationale, répartis à hauteur de 45 Mds de DH pour l’investissement et 75 Mds de DH pour les crédits garantis par l’Etat. Mais ça coince toujours. Rendant caducs tous les objectifs de croissance. 

 

 

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