La fintech et l'IA sont deux domaines technologiques qui ont récemment connu une croissance exponentielle dans l'industrie des services financiers.
Par Faiçal El Karouni
La fintech est un terme qui décrit l'utilisation de la technologie pour améliorer et automatiser les services financiers, tels que les paiements, les investissements, les prêts et l'assurance. L'IA, quant à elle, est une branche de l'informatique qui s'occupe de la création de programmes informatiques intelligents qui peuvent apprendre et s'adapter de manière autonome.
L'intersection de la fintech et de l'IA offre des opportunités considérables pour les entreprises financières en termes d'efficacité, de personnalisation et de sécurité. Les entreprises peuvent utiliser l'IA pour automatiser des tâches manuelles, telles que l'analyse des risques et la détection de fraudes, ce qui permet de gagner du temps et d'améliorer la précision. Les algorithmes d'IA peuvent également être utilisés pour analyser des données financières complexes et identifier des tendances, ce qui peut aider les entreprises à prendre des décisions plus éclairées.
Le développement de la fintech et l'utilisation de l'IA dans les services bancaires au Maroc sont confrontés à des défis similaires à ceux rencontrés dans d'autres pays. Les réglementations, le manque de compétences, la sécurité, la confiance des clients et l'éthique sont tous des enjeux importants à surmonter pour permettre à ces technologies de se développer pleinement et de bénéficier à la fois aux banques et à leurs clients. Voilà l’avis de notre digital evangelist, Mohamed Saad, DGA la Bourse de Casablanca.
1. Pouvez-vous nous décrire l'écosystème des start-up de la Fintech au Maroc ?
L'écosystème des start-up de la fintech au Maroc est encore embryonnaire mais en plein essor. Ces dernières années, plusieurs start-up innovantes ont émergé dans le domaine de la fintech, offrant des services financiers innovants et répondant aux besoins croissants des clients marocains en matière de services bancaires numériques.
Le gouvernement marocain et à travers l’Agence de développement du digital tend à développer ce type d’entreprise en facilitant la création d'entreprises, et en encourageant les investissements.
Parmi les start-up de la fintech marocaine les plus connues, on peut citer :
HPS : une entreprise spécialisée dans les solutions de paiement électronique, notamment les terminaux de paiement électronique, les portefeuilles électroniques et les solutions de paiement mobile.
PayZone : une plateforme de paiement mobile qui permet aux clients de payer leurs factures et de recharger leur compte prépayé directement depuis leur téléphone portable.
Wafacash : une entreprise spécialisée dans les transferts d'argent et les services de paiement, qui offre une plateforme de paiement en ligne pour les particuliers et les entreprises. Ces entreprises et d'autres encore font partie d'un écosystème de la Fintech en plein développement au Maroc. Le secteur est encore jeune, mais il présente un fort potentiel de croissance, en raison de l'adoption croissante de la technologie numérique et de la demande croissante des clients pour des services financiers innovants. Plusieurs fonds ont aussi vu le jour pour investir dans les fintech et les start-up en général (https://amic.org.ma/).
2. Comment la Bourse de Casablanca soutient-elle le développement de la fintech au Maroc ?
L’introduction en Bourse présente un intérêt important pour les entreprises technologiques en croissance. Cependant, une PME n’a pas nécessairement les mêmes besoins et surtout les mêmes ressources qu’une grande entreprise. Pour cette raison, la Bourse de Casablanca a multiplié récemment les initiatives envers les PME, consciente que son marché leur est parfaitement accessible, adapté et souvent la meilleure solution de financement pour les accompagner dans leur évolution. Ainsi, la Bourse de Casablanca a procédé à :
La mise en place d’un compartiment dédié aux PMEs, appelé marché alternatif, et qui se distingue par des conditions d’accès allégées, notamment une seule année d’exercice est nécessaire, et un financement peut être levé à partir de 5 millions de dirhams. Le lancement d’une offre de marché PME conjointement avec l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), Maroclear et l’Association professionnelle des sociétés de bourse (APSB), pour faciliter l’accès au marché alternatif. Cette offre permet une réduction des coûts, et un processus guichet unique accéléré.
Le renforcement de ses équipes chargées du conseil et de l’accompagnement des PMEs, et le design d’une formation adaptée aux entreprises du secteur technologique. La création de l’Association marocaine des entreprises faisant appel public à l'épargne (APE) avec la CGEM et l’appui de l’AMMC. L’APE est d’ailleurs présidée par Mohammed Horani, président- Directeur général de HPS, société technologique cotée à la Bourse de Casablanca. Cette association souhaite notamment encourager le partage d’expériences fructueux entre les sociétés introduites en Bourse et celles qui l’envisagent. Il n’y a rien de mieux pour démystifier le parcours de la cotation en Bourse !
Rappelons que la Bourse de Casablanca contient bon nombre de PME, et qu’elle a connu des IPO pour des montants de 15 et de 20 millions de dirhams, signe que cette catégorie d’entreprises est la bienvenue ! Si vous êtes une PME, sachez que la Bourse vous est parfaitement accessible et peut avantageusement vous financer en vous donnant accès à un marché diversifié et profond d’investisseurs de tout horizon.
L’activation de la Bourse permet également un cycle de financement beaucoup plus rapide et par conséquent, un écosystème de Private equity, Venture capital, Family office, et autres programmes de financement de la start-up nettement plus dynamique car il pourra recycler ses positions beaucoup plus rapidement.
En somme, une Bourse dynamique permet de stimuler toute la chaîne de financement, comme l’a bien détaillé le rapport du nouveau modèle de développement : «Le développement de la Bourse de Casablanca sera crucial pour le développement de ces marchés car elle représente un débouché naturel aux différentes activités d’investissement, notamment en Private equity, et permet d’offrir un meilleur pricing des actifs ainsi qu'un accès à une base d'investisseurs plus large et des produits diversifiés ajustés aux différents niveaux de risque.»
La Bourse de Casablanca est ainsi naturellement mobilisée pour soutenir cette nouvelle ambition digitale marocaine pour financer les entreprises technologiques qui porteront cette vision. Elle est par excellence un partenaire privilégié du ministère de la Transition numérique et de la Réforme administrative, du ministère de l’Investissement, de la Convergence et de l’Evaluation des politiques publiques, et de l’écosystème marocain du numérique, en contribuant effectivement à la mise en place des facteurs de succès de ce chantier stratégique pour notre pays.
3. Quels sont les principaux défis auxquels sont confrontées les start-up de la fintech au Maroc ?
Les start-up de la fintech au Maroc sont confrontées à plusieurs défis, notamment :
La réglementation : La réglementation marocaine en matière de fintech est encore en évolution, ce qui peut rendre difficile pour les start-up de naviguer dans un environnement réglementaire complexe et incertain. Au Maroc, les start-up de la fintech doivent obtenir des autorisations et des licences de la Banque centrale et de l'Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) pour offrir certains produits et services financiers.
L'accès au financement : Bien que le gouvernement marocain ait pris des mesures pour encourager l'investissement dans les start-up, l'accès au financement peut encore être difficile pour les start-up de la fintech, en particulier les plus jeunes et les plus petites.
La concurrence : Le marché de la fintech au Maroc est en plein essor, mais il est également très concurrentiel. Les start-up doivent donc proposer des offres innovantes et compétitives pour se démarquer de leurs concurrents.
La confiance des utilisateurs : Les services financiers impliquent la gestion de données sensibles et de transactions financières. Les start-up de la fintech doivent donc s'assurer que les utilisateurs ont confiance en leurs services et qu'ils respectent les normes de sécurité élevées.
La pénétration des technologies : Bien que la technologie soit de plus en plus présente dans la vie quotidienne des Marocains, il reste encore des défis en matière de connectivité et d'accès à Internet (Zones grises/blanches, absence d’une bonne couverture du haut débit...) dans certaines régions du pays, ce qui peut limiter la portée des start-up de la fintech.
Ces défis ne sont pas insurmontables, et les start-up de la fintech peuvent trouver des moyens de les surmonter grâce à l'innovation, à la collaboration avec d'autres acteurs du marché et à une compréhension approfondie des besoins des utilisateurs.
Selon un rapport publié par le cabinet de conseil en stratégie Boston Consulting Group (BCG) en 2019, le marché de la fintech au Maroc est en croissance rapide. Le rapport a révélé que le Maroc comptait environ 80 start-up de la fintech en 2018, soit une croissance de 60% par rapport à l'année précédente. Les domaines de la fintech les plus actifs au Maroc étaient les paiements en ligne, les transferts d'argent et la finance participative.
En outre, le rapport a indiqué que le Maroc avait un fort potentiel de croissance pour la fintech en raison de sa population jeune et connectée, de l'augmentation de l'accès à Internet et des smartphones, ainsi que de la volonté du gouvernement marocain de promouvoir l'innovation technologique dans le secteur financier.
4. Quels sont les avantages concurrentiels que les start-up de la fintech au Maroc peuvent offrir par rapport aux banques traditionnelles ?
Les start-up de la fintech au Maroc peuvent offrir plusieurs avantages concurrentiels par rapport aux banques traditionnelles, notamment :
L'innovation : Les start-up de la fintech peuvent développer et mettre en œuvre des technologies innovantes plus rapidement que les grandes banques traditionnelles, ce qui leur permet de proposer des services financiers plus efficaces et plus adaptés aux besoins des utilisateurs.
L'accessibilité : Les services financiers proposés par les start-up de la fintech peuvent être plus accessibles pour les clients qui n'ont pas facilement accès aux services bancaires traditionnels, comme les personnes vivant dans des zones rurales ou éloignées.
La rapidité : Les start-up de la fintech peuvent proposer des services financiers plus rapides que les banques traditionnelles, notamment en matière de traitement des transactions et de validation des demandes de crédit.
La personnalisation : Les start-up de la fintech peuvent offrir des services financiers plus personnalisés que les banques traditionnelles, grâce à l'utilisation de technologies de pointe, de Big data et de l'intelligence artificielle.
Les coûts : Les start-up de la fintech peuvent offrir des services financiers à des coûts plus bas que les banques traditionnelles, car elles n'ont pas les mêmes frais généraux que les grandes institutions financières.
L'expérience utilisateur : Les start-up de la fintech mettent souvent l'accent sur l'expérience utilisateur, en proposant des interfaces conviviales et des applications mobiles intuitives pour les services financiers.
Ces avantages peuvent permettre aux start-up de la fintech de gagner rapidement des parts de marché dans le secteur des services financiers au Maroc, en offrant des solutions innovantes, accessibles et personnalisées pour répondre aux besoins des clients.
5. En quoi l'IA est-elle importante pour l'industrie bancaire ou financière au Maroc ?
L'intelligence artificielle (IA) est de plus en plus importante pour l'industrie bancaire ou financière au Maroc. Voici quelques raisons :
L'amélioration de l'expérience client : L'IA peut aider les institutions financières à offrir une expérience client personnalisée, en utilisant des algorithmes pour analyser les données clients et proposer des offres et des produits adaptés aux besoins de chaque client.
L'efficacité opérationnelle : L'IA peut également améliorer l'efficacité opérationnelle des institutions financières en automatisant certaines tâches, comme la vérification des identités, la détection de fraudes, ou encore l'évaluation des risques.
La prévision des risques : L'IA peut aider les institutions financières à prévoir les risques, en analysant les données historiques et les tendances du marché pour prédire les comportements des clients et les fluctuations du marché.
La lutte contre la fraude : L'IA peut aider à détecter et prévenir les fraudes financières, en utilisant des algorithmes pour analyser les transactions financières et repérer les comportements suspects ou non conformes.
L'automatisation des processus de crédit : L'IA peut automatiser le processus de crédit, en utilisant des algorithmes pour évaluer la solvabilité des demandeurs de crédit et accélérer le processus de décision.
En résumé, l'IA peut aider les institutions financières à améliorer leur efficacité opérationnelle, à offrir une expérience client personnalisée, à prévoir les risques, à lutter contre la fraude et à automatiser les processus de crédit. Avec une adoption judicieuse de l'IA, l'industrie financière au Maroc peut continuer à se moderniser et à offrir des services plus efficaces et innovants à ses clients.
6. Quels sont les principaux défis auxquels les banques ou les entreprises financières en général sont confrontées lorsqu'elles adoptent l’IA ?
L'adoption de l'intelligence artificielle (IA) peut être complexe pour les banques et les entreprises financières, car cela peut entraîner plusieurs défis. Voici les principaux défis auxquels les banques et les entreprises financières sont confrontées lorsqu'elles adoptent l'IA :
La disponibilité des données : Pour que l'IA soit efficace, il est important que les banques et les entreprises financières disposent de données de haute qualité. Les données doivent être collectées, nettoyées, normalisées et structurées de manière appropriée pour pouvoir être utilisées efficacement dans les algorithmes d'IA. On dit «Garbage in Garbage out» est donc la donnée doit être fiable
La réglementation : L'IA peut être soumise à des réglementations strictes en matière de confidentialité, de sécurité et d'éthique. Les banques et les entreprises financières doivent être conscientes des réglementations en vigueur et s'assurer que leur utilisation de l'IA est conforme à ces réglementations. On peut citer au Maroc la loi 09-08 de protection des données personnelles, ou la RGPD en Europe.
Les coûts : L'adoption de l'IA peut être coûteuse pour les banques et les entreprises financières, car cela peut nécessiter l'achat de nouveaux équipements informatiques et l'embauche de personnel qualifié pour développer et mettre en œuvre les algorithmes d'IA.
L'acceptation de l'utilisateur : Les clients peuvent être réticents à l'utilisation de l'IA dans les services financiers, car ils peuvent craindre que leurs données personnelles soient utilisées de manière inappropriée ou qu'ils perdent le contrôle sur leurs finances.
La complexité technique : L'IA peut être techniquement complexe, ce qui peut rendre sa mise en œuvre difficile pour les banques et les entreprises financières qui ne disposent pas des compétences techniques nécessaires.
En résumé, l'adoption de l'IA peut présenter des défis importants pour les banques et les entreprises financières, notamment la disponibilité des données, la réglementation, les coûts, la concurrence, l'acceptation de l'utilisateur et la complexité technique. Cependant, avec une planification et une exécution efficaces, les avantages de l'IA peuvent l'emporter sur ces défis et aider les banques et les entreprises financières à améliorer leur efficacité opérationnelle et à offrir des services plus innovants et personnalisés à leurs clients.
7. Comment les entreprises financières peuvent-elles garantir la sécurité et la confidentialité des données clients tout en utilisant l'IA ?
• Établir une «Data Governance» : Les entreprises financières doivent avoir des politiques et des procédures claires pour gérer les données des clients, y compris les données sensibles. Cela peut inclure des contrôles d'accès stricts, des politiques de sécurité, des audits réguliers et des procédures de suivi des données.
• Mettre en place des contrôles de sécurité renforcés : Les entreprises financières doivent disposer de mesures de sécurité solides pour protéger les données des clients contre les menaces internes et externes.
• Établir des processus de consentement clairs : Les entreprises financières doivent obtenir le consentement clair des clients pour collecter et utiliser leurs données (loi 09-08).
• Utiliser l'anonymisation et la pseudonymisation des données : Les entreprises financières peuvent utiliser des techniques d'anonymisation et de pseudonymisation pour garantir la confidentialité des données des clients. L'anonymisation implique la suppression de toutes les informations qui pourraient identifier un client spécifique, tandis que la pseudonymisation implique le remplacement des informations d'identification par un identifiant généré de manière aléatoire.