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Quel comique, ce Tebboune !

Quel comique, ce Tebboune !

Abdelhak Najib
Écrivain-journaliste.

Le chef du régime algérien, Abdelmadjid Tebboune, multiplie les sorties hasardeuses sur les réseaux sociaux et livre des extraits dignes d’un one-man-show, à la fois surréaliste et absurde. Le tout mâtiné d’une obsession nommée Maroc.

Ce sont véritablement des perles dont nous gratifie le responsable de l’exécutif en Algérie, Abdelmadjid Tebboune. À chaque apparition médiatique, le bonhomme se lâche et n’arrive plus à rassembler ses propos en idées avec un début et une fin, et surtout un propos et du sens. Il ouvre les vannes et c’est au petit bonheur la chance. Dans la même phrase, toujours incomplète, il évoque le prix du lait, la production de l’huile, le climat déréglé en Algérie à cause du Maroc, qui manipule les nuages, le complot sioniste, la France qui doit payer des dividendes à Alger, le zellige qui n’est pas marocain mais oranais, le caftan qui est de Constantine et non le produit culturel des capitales des différents empires marocains, la Coupe du monde 2100 qui doit être jouée dans le désert de Tamanrasset… Bref, à chaque fois, c’est un florilège de cet acabit livré en vrac devant les caméras. Pire, même quand il se déplace pour quelque rencontre officielle, avec des chefs d’État étrangers, il vise l’un des convives et ne le lâche plus, l’abreuvant de parlote à n’en plus finir, comme dans cette vidéo où le président Emmanuel Macron le rappelle à l’ordre pour prendre la photo alors que Monsieur Tebboune était en train de donner le vertige au chef d’État des Émirats arabes unis. À telle enseigne que dans les chancelleries, les responsables se sont donnés le mot : « Si tu vois Tebboune, file très vite, sinon tu vas passer un mauvais quart d’heure, car le bonhomme dit tout et n’importe quoi, de préférence, et s’il t’attrape, il ne te lâche plus. » Ce qui n’empêche pas le locataire du palais El Mouradia de récidiver à chaque sortie.

Mais le clou de ses apparitions reste ses saillies intempestives de cet ordre : des chiffres d’exportations de produits hors hydrocarbures de tant de milliards, alors que le pays ne produit strictement rien d’autre que le gaz et le pétrole. Des milliards également d’exportations de produits agricoles imaginaires, comme les pommes de terre, la tomate, les aubergines et d’autres variétés qui ne se vendent même pas dans les souks à Alger, Oran et ailleurs. Mieux, Monsieur Tebboune a affirmé récemment que son pays va commencer à exporter du lait en Europe ! Et du fromage ! Autrement dit, les Français, les Suisses et les Néerlandais vont troquer leurs produits laitiers locaux pour le nec plus ultra produit dans le désert algérien. C’est également le cas des fruits, puisque Tebboune dit que l’Algérie va exporter de l’avocat, des ananas et du kiwi à Moscou ! Mais le pays n’en produit pas. À moins d’en acheter au Maroc pour changer les étiquettes et les expédier en Russie !

Sur un autre niveau, le responsable des affaires algériennes avance ceci de très surprenant. Il dit en substance que le citoyen algérien « est le plus grand consommateur de lentilles au Maghreb ». L’exploit est de taille, et il faut donc inviter les médias, convoquer un conseil des ministres et faire le speech, pour expliquer au monde entier que tout va bien dans le meilleur pays du monde, l’Algérie, où le citoyen n’a pas à sortir manifester puisque l’État lui garantit de grosses quantités de lentilles. Et pas que ça ! Il a aussi droit aux haricots blancs et aux fèves pour une bonne « bissara », qui, elle non plus, n’est pas marocaine, mais algérienne, dixit Monsieur Tebboune. Les autres féculents sont aussi au menu, malgré l’effet flatulence, qui fait délirer le chef d’État, qui embraye sur les obsessions de sabotage de la part du voisin marocain, très jaloux de la « prospérité algérienne » et de « la stabilité », garanties en Algérie par les décrets présidentiels qui incitent le peuple à ne pas sortir dans les rues et à s’occuper à consommer le surplus de légumineuses qu’Alger refuse d’exporter pour le grand bien des populations algériennes, qui, non seulement, manquent de presque tout, mais doivent se serrer la ceinture dans un pays qui devrait, logiquement, être plus riche que la Suisse et le Benelux réunis.

Car il y a un pacte secret entre les dirigeants algériens : au peuple le bocadillo et à l’oligarchie les rentes des hydrocarbures. Quant aux ennemis du peuple algérien et de son leadership mondial, c’est-à-dire les quelques intellectuels qui osent encore l’ouvrir, il y a la matraque, la case cachot et le passage à tabac, comme au temps du KGB. Pour le reste, tant que Tebboune est aux commandes, tout va bien dans le meilleur des pays totalitaires.

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