Mardi après-midi, Khalid Ait Taleb, ministre de la Santé et de la Protection sociale, repêché à la dernière minute suite à la démission rocambolesque de Nabila Rmili, s’est adonné à un exercice formellement démocratique devant la Chambre des conseillers, une chambre majoritairement acquise au gouvernement dont il fait partie.
L’objet de la séance portait autant sur la situation épidémiologique de la Covid-19 au Maroc que sur le «pass vaccinal» et les manifestations anti-pass.
Ce fut l’occasion pour le ministre d’apporter une énorme contribution à la science politique en proposant une nouvelle définition de la démocratie.
Les athéniens n’ont qu’à bien se tenir ! Car pour Ait Taleb, et pour le dire de manière crue, la démocratie est un système où la majorité jouit de privilèges et non plus de droits, et où la minorité peut littéralement crever économiquement et socialement. Ils l’ont bien cherché, aurait-il pu ajouter.
Oui, privilèges et non droits, car dans la mesure où les citoyens ne sont plus égaux devant la loi, le service public, l’éducation, les loisirs, la culture …, il n’y a plus lieu de parler de droits, mais de privilèges pour les uns, et de privations pour les autres. Une caste de seigneurs, et une caste d’intouchables.
Le soubassement qui se veut scientifique de ce «pass vaccinal» se fonde sur l’idée que les non-vaccinés, c’est-à-dire les sous-citoyens, seraient un danger mortel pour les vaccinés, les citoyens de plein droit.
Le mot «oxymore» serait un euphémisme pour décrire ce type de raisonnement. Car, a-t-on jamais vu une situation sanitaire où les vaccinés doivent être protégés en plus du vaccin ? N’est-ce pas là tout le rôle du vaccin que de protéger les vaccinés ? Un vaccin dont l’efficacité a été pourtant tant louée par notre cher ministre ?
D’autant plus qu’une pluralité d’études très récentes démontrent que les vaccinés, non seulement peuvent être porteurs du virus, mais peuvent aussi le transmettre dans des milieux clos, quasiment autant que les non-vaccinés.
Des pays actuellement hautement vaccinés comme Singapour, où le taux de vaccination dépasse les 80%, ne semblent pas particulièrement être protégés contre la nouvelle vague qu’ils connaissent actuellement.
Qu’en est-il de l’immunité naturellement acquise suite à un épisode Covid-19 ? Pourquoi n’est-elle pas prise en compte ?
De même, et dans le cas du vaccin ou thérapie génique pour être plus précis de Pfizer-BioNTech, a-t-on le recul suffisant pour évaluer les impacts à long terme d’un vaccin dont les premiers essais cliniques n’ont commencé qu’en avril 2020 ?
A l’heure actuelle, ce vaccin n’a pas encore achevé la phase 3 des essais cliniques, selon les déclarations mêmes de Pfizer. Cette 3ème étape est la plus importante car elle vise à mesurer l’efficacité et la sécurité du vaccin.
Ce n’est qu’après l’achèvement de cette dernière que le vaccin peut être homologué. Mais cela n’empêche pas le gouvernement de vacciner des millions et des millions de Marocains avec un vaccin expérimental.
D’autant plus qu’un vaccin plus sûr comme Sinopharm existe et est largement disponible.
Enfin, a-t-on réalisé des études sur l’effet cumulatif à long terme de 3 doses, voire de 4 comme c’est discuté actuellement par le comité scientifique ?
Une ultime question se pose cependant.
Pourquoi ne pas voter une loi qui stipulerait une obligation vaccinale pour tous les Marocains au lieu de tenter de le faire de manière vicieuse et détournée ? La réponse me parait évidente.
Car tant que le vaccin n’est pas formellement obligatoire, ni l’Etat ni Pfizer n’auront à assumer juridiquement les cas de décès ou d’effets indésirables graves. Votre proche est mort du vaccin, direz-vous à l’Etat ? Ce fut le libre choix de votre proche, car je ne vous ai rien imposé, dira l’Etat.
Mais nonobstant les éventuels cas de décès qui pourraient être imputés au vaccin Pfizer et les effets indésirables graves dont de plus en plus de citoyens témoignent sur les réseaux, le vrai danger réside ailleurs.
Il réside dans le glissement graduel que pourrait connaitre cette mesure, en passant d’un «pass sanitaire» à un «pass politique», mettant ainsi officiellement fin à l’Etat de droit et à la séparation des pouvoirs, avec comme alibi la Covid-19. Mais cela est une toute autre histoire.
Par Rachid Achachi, chroniqueur, DG d'Arkhé Consulting