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Casablanca: quel avenir pour le sport de masse ?

Casablanca: quel avenir pour le sport de masse ?

Le fossé est grand entre le sport de masse et le sport d’élite en matière d’infrastructures et de moyens financiers.

Le point avec Yassine Saadallah, expert en management du sport et conseiller du vice-président de la mairie de Casablanca chargé des affaires culturelles et sportives.

 

Par Ibtissam Z.

 

La mémoire sportive de Casablanca est connue et reconnue. Cette richesse d’antan peine aujourd’hui à trouver sa voie. En cause, le manque de moyens financiers et des installations sportives désuètes ou quasiment inexistantes.

Le football n’est pas le seul sport de masse à Casablanca; d’autres disciplines émergent du lot, notamment l’athlétisme, la course à vélo, le basket-ball… Toutefois, on enregistre aujourd’hui un recul dans la pratique de plusieurs disciplines, à l’exception du ballon rond. La régression des autres sports doit ainsi interpeller les responsables du secteur sur la nécessité de promouvoir tous les sports.

Pour cela, il faut s’interroger sur l’absence de structures sportives de proximité dans la ville blanche, à savoir des terrains de handball, de volley-ball, de basket-ball et des piscines, alors que Casablanca est l’une des villes les plus importantes du Royaume. La démocratisation du sport est une nécessité pour que la pratique sportive soit généralisée sans distinction aucune.

«Dans tout pays et toute société, il me paraît évident que le sport de masse revêt une importance capitale pour l’évolution et l’émancipation des jeunes et des athlètes. Il constitue la base de l’émergence de jeunes talents, doués et performants. Et c’est à travers ce genre de pratique que le sport d’élite tient toute sa légitimité. Il est donc primordial d’accorder une grande importance à la pratique des sports de masse», souligne Yassine Saadallah, conseiller du vice-président de la mairie de Casablanca chargé des affaires culturelles et sportives.

Quid de la politique nationale du sport ?

Lancée en 2008 par le ministère de la Jeunesse et des Sports (MJS), la politique nationale du sport est restée uniquement sur papier. C’est ce qui ressort du rapport du Conseil économique, social et environnemental (CESE). Ce rapport souligne que si cette stratégie n’a pu être mise en œuvre, c’est parce que l’Exécutif n’a jamais voté une loi-cadre concernant le sujet. La stratégie du MJS pour développer le sport national aurait échoué faute de moyens financiers.

Dans son rapport sur la jeunesse marocaine, le CESE révèle que «80% des jeunes marocains n’exercent aucune activité sportive ou de bien-être». Cet indicateur est néanmoins nuancé par un sondage réalisé par le ministère de la Jeunesse et des sports. En effet, pour le ministère de tutelle, 45% des jeunes pratiquent le sport, mais globalement «la participation des jeunes à des activités de divertissement ou culturelles reste insignifiante».

Et d’ajouter : «La jeunesse consacre la grande partie de son temps de loisirs à la famille, aux amis et bien sûr une grande concentration sur les réseaux sociaux... Ces activités absorbent en moyenne 90% du temps de loisir des jeunes. Avec le manque d’activités socioculturelles, ils se tournent vers l’Internet pour l’interaction sociale».

Faut-il s’en inquiéter ? «Evidemment, on s’inquiète pour l’avenir. Le sport de masse fait terriblement défaut à la ville de Casablanca, point névralgique du Royaume. Il n’y a pas d’infrastructures adéquates. Il y a une grande différence entre le sport de masse et le sport d’élite; ce dernier met en avant le football, qui est le seul qui profite de l’aubaine», constate Yassine Saadallah.

Notre interlocuteur insiste sur le fait que durant ces 10 dernières années, une importance considérable a été accordée au sport d’élite sur tous les plans, notamment financier et infrastructurel. Mais qu’en est-il du sport de masse ?, s’interroge-t-il avec amertume.

«A Casablanca, on ne pratique le sport de masse que par l’intermédiaire de la marche les week-ends. Il n’y a pas vraiment d’espaces verts alloués à cette pratique, ni d’installations sportives. Même les terrains de proximité ont été déviés de leur but principal, à savoir vulgariser la pratique sportive. Aujourd’hui, ils sont pris d’assaut par les associations qui génèrent des recettes financières pour leur survie».

Ainsi, poursuit notre expert en management du sport, «plusieurs disciplines sont lésées comme le handball, la natation, le badminton, le volleyball, le basketball; très peu de terrains leur sont dédiés. Même constat pour l’athlétisme qui ne dispose presque plus de pistes pour pratiquer. En un mot, Il n’y a pas d’infrastructures».

Entre les budgets consacrés au sport de haut niveau et à celui de masse, il y a incontestablement un fossé. En effet, la Loi des Finances de 2016 a consacré 5,2 millions de DH (MDH) pour le sport de masse, alors que le sport de haut niveau a pu compter sur un budget 187 fois plus conséquent : 975 MDH.

La différence de budget entre les deux entités est conséquente, souligne Yassine Saadallah : «ce n’est pas raisonnable d’accorder 5 millions de DH aux sports de masse, et que le football profite, à lui seul, d’environ 500 millions de dirhams par an pour un effectif de 150.000 à 200.000 licenciés». Certes, le sport de masse bénéficie désormais d’un budget plus important, mais il reste visiblement très insuffisant par rapport aux besoins.

C’est pourquoi Saadallah «appelle les responsables locaux, les départements ministériels et le gouvernement à accorder plus d’importance à la réalisation d’infrastructures sportives et, bien évidemment, à octroyer une enveloppe budgétaire conséquente au sport de masse qui constitue la pépinière des champions en herbe pour le sport d’élite».

«Le développement des sports de masse évalue indiscutablement l’avancée d’un pays», conclut-il. Rappelons que le Royaume compte uniquement 8.000 associations sportives pour 500.000 sportifs licenciés, soit 1,4% de la population. En France, par exemple, le pays compte 170.000 associations sportives et 15 millions de licenciés, soit 21% de la population tricolore.

 

 

 

 

 

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