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Que se passe-t-il à la Caisse de dépôt et de gestion ?

Que se passe-t-il à la Caisse de dépôt et de gestion ?
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Le secrétaire général et le Directeur général adjoint viennent de claquer la porte. L’organisation qui va être mise en place dans le cadre de la nouvelle stratégie du Groupe CDG est pointée du doigt. Une réunion tendue a eu lieu mardi dernier. Détails.

 

Y a-t-il un malaise au sein de la Caisse de dépôt et de gestion (CDG) ? La question est loin d’être dénuée de sens. En seulement quelques jours d’intervalle, deux hauts cadres du bras financier de l’Etat ont présenté leur démission. Ils ont plutôt claqué la porte : c’est l’expression qui semble en effet le mieux convenir. La première démission connue est celle du secrétaire général, Saïd Laftit. Cet ingénieur de l’Ensea, titulaire d’un doctorat de l’Université Paris Dauphine, occupe ce poste depuis 2009. Outre sa casquette de SG, Laftit siège, entre autres, au Conseil d'administration de CIH Bank et fait partie du Comité de nomination et de rémunération et du Comité stratégique de cette banque.

En 2014, c'est lui qui a été nommé Directeur général par intérim quand l'affaire CGI (filiale de la CDG) a conduit à la mise à l'écart de Anas Alami. Quelques jours plus tard, Amine Benhalima, Directeur général adjoint, rend lui aussi le tablier. Diplômé de Télécom Paris (ENST) et de l’Ecole Polytechnique, Benhalima a intégré la CDG depuis 2002 et y a occupé plusieurs postes de responsabilité. Il a été nommé DGA en 2010.

Dans l’organigramme du Groupe, Laftit et Benhalima viennent juste après le Directeur général, Abdellatif Zaghnoun, qui se voit privé ainsi de ses deux principaux appuis. S’il est hasardeux d’avancer que ces deux démissions sont concertées, il semble néanmoins difficile d’invoquer, comme c’est souvent le cas, des «raisons d’ordre personnel» pour tenter de justifier les départs de cadres qui occupent des postes aussi stratégiques. En creusant davantage, nos satellites nous ont appris que si Laftit et Benhalima ont décidé de quitter le navire, ce sont pour des raisons liées à la nouvelle organisation que compte mettre en place Zaghnoun.

En effet, la CDG vient de boucler son plan stratégique Oufoq 2015, qui s’est soldé par un effort d’investissement chiffré à 45 milliards de dirhams, principalement dans l’immobilier, l’aménagement urbain et le tourisme. Actuellement, le Groupe est en train de mettre en place une nouvelle vision stratégique. Cette dernière devrait d’ailleurs être révélée officiellement avant la fin de cette année 2016. «La nouvelle organisation interne prônée par Zaghnoun va entrainer une dilution des pouvoirs de Laftit et Benhalima qui n’auront plus le même poids au sein de la Caisse de dépôt et de gestion. Et cela, ils ne l’ont pas accepté», nous confie notre source. D’ailleurs, mardi dernier, c’est une réunion du Comité stratégique pour le moins tendue qui a eu lieu. Cette réunion, qui se tient mensuellement pour faire le point et avancer sur des dossiers importants, a d’ailleurs vu la participation des deux cadres démissionnaires. «Il n’en est rien sorti de nouveau, sinon la confirmation que Laftit et Benhalima vont bien partir», précise notre source.

 

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En tout cas, du point de vue du patron de la CDG, «c’est grâce à une organisation agile, s’adaptant en permanence aux exigences nouvelles rencontrées, et en s’appuyant sur l’expertise et l’engagement sans cesse renouvelés de ses équipes, que le Groupe CDG envisage les enjeux de l’avenir avec sérénité». C’est en ces termes qu’il s’exprime dans le rapport annuel 2015 du Groupe. A l’évidence, Benhalima et Laftit, fidèles à leurs convictions, n’ont pas voulu sacrifier les prérogatives qui leur étaient jusque-là dévolues sur l’autel de cette agilité. Cela ira-t-il jusqu’à fragiliser l’institution qui perd deux de ses principaux piliers ? Pas forcément. Mais, pour l’image, ce n’est pas particulièrement une bonne chose, surtout que le bras financier de l’Etat est dans une phase où il a besoin de stabilité, notamment après le fameux scandale CGI.

D’ailleurs, c’était pour redorer cette image écornée par cette affaire qu’Abdellatif Zaghnoun a été porté, fin janvier 2015, à la tête de la Caisse. Il jouissait en effet d’un préjugé favorable et avait la tête de l’emploi, fort du travail accompli au préalable à la direction des Impôts, et bien auparavant à l’Administration des douanes et impôts indirects. Et c’est son expérience et son expertise qu’il se devait de mettre au service de la CDG, une institution, reconnaissons-le, assez particulière, tant elle est impliquée, de manière soutenue, dans le processus de développement économique du Royaume. Elle est présente dans une cinquantaine de projets structurants et reste le premier investisseur institutionnel du Maroc. Et à l’horizon 2030, le montant des investissements directs et induits du Groupe devrait atteindre 235 milliards de dirhams, pour un total de 250.000 emplois additionnels.

Mais, il faut croire que la vision de Zaghnoun de ce que doit être la Caisse n’est pas partagée par tout le monde. A tort ou à raison ? Seul l’avenir nous le dira. Comme nous l’écrivions au lendemain de sa nomination, Zaghnoun devra faire preuve de beaucoup d’habileté pour imprimer sa méthode au sein de la CDG.

En d’autres termes, il faudra au patron de la Caisse à la fois souscrire aux multiples requêtes de l’Etat (quitte à perdre de l’argent), sans donner l’impression d’être aux ordres, et répondre aux exigences de performance d’une entreprise, sans prendre trop de risques, tout cela en ayant l’adhésion de son équipe et en étant soumis au jugement de l’opinion publique. Sur le plan de l’adhésion, le pari n’aura pas été totalement gagné. C’est le moins que l’on puisse dire.

David William

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