L'Assemblée générale ordinaire de l'Association nationale des médias et des éditeurs (ANME) s’est déroulée ce vendredi 20 septembre à Casablanca, réunissant les membres et acteurs clés du secteur médiatique national.
Cette rencontre a permis de faire le point sur les défis auxquels le secteur de la presse est confronté, mais aussi sur les réformes nécessaires pour assurer son développement à l'approche des grands événements internationaux, notamment la Coupe du Monde 2030.
L’ouverture de l’Assemblée a été marquée par l’intervention de Fatima Ouriaghli, vice-présidente de l’ANME, qui a rappelé les enjeux de cette rencontre. Elle a souligné que cette assemblée serait l’occasion de présenter les rapports moral et financier, mais aussi de revenir sur les nombreux problèmes qui affectent la presse nationale. "Plusieurs chantiers sont déjà ouverts par l’ANME pour pallier ces problèmes, mais les défis restent encore nombreux et de taille", a-t-elle affirmé.
Mokhtar Laghzaoui, secrétaire général de l’ANME, a présenté un rapport moral retraçant les quatre années d’existence de l’association. Créée à un moment critique de l’histoire des médias au Maroc, l’ANME est née en plein cœur de la crise sans précédent provoquée par la pandémie de COVID-19, qui avait d’ailleurs failli condamner le secteur à sa disparition.
Malgré sa jeunesse, l’association a réussi à mettre en place des mesures cruciales, telles que la garantie du maintien des rémunérations des salariés de la presse, un effort porté avec détermination par Driss Chahtane, Président de l’ANME. Cependant, Laghzaoui a rappelé qu’à l’aube de grands événements comme la Coupe du Monde 2030, une question cruciale se pose : la presse nationale est-elle aujourd’hui suffisamment outillée pour faire face à des défis d’une telle envergure ? Il a insisté sur l’urgence de restructurer en profondeur la presse sportive, en prenant pour exemple les lacunes observées lors de la couverture du Mondial de Qatar 2022, où des comportements non professionnels ont été relevés. Un effort particulier doit être fait sur la formation, tant en matière de compétences rédactionnelles que communicationnelles, afin de rehausser le niveau général avant les grandes échéances internationales.
La question des finances a ensuite été abordée par Khalid El Horri, trésorier de l’ANME, qui a détaillé la situation financière de l’association. La trésorerie actuelle s’élève à 342 millions de centimes, contre une trésorerie initiale de 638 millions de centimes. Les dépenses d’exploitation annuelles ont atteint 538 millions de centimes, un montant largement soutenu par une aide du ministère de tutelle.
Grâce à une gestion rigoureuse, l’ANME a pu dégager un excédent net de 1 million de dirhams, destiné au financement de formations linguistiques pour les journalistes, une initiative visant à renforcer leurs compétences en communication, particulièrement à l’international. Khalid El Horri a également mentionné les opérations de change effectuées lors de la dernière Coupe d’Afrique des Nations (CAN), permettant à l’association de récupérer 21 millions de centimes en euros.
De son côté, Abdelmounaim Dilami, Président d’honneur de l’ANME, a salué l’évolution de l’association, qui s’adapte aux mutations profondes du contexte social, économique et politique. "L’ANME permet aujourd’hui au secteur de s’exprimer d’une seule voix, en mettant de plus en plus l’accent sur l’éthique et les valeurs morales", a-t-il indiqué, soulignant le dynamisme du Président Driss Chahtane dans la résorption des problèmes du secteur.
A son tour, Younes Moujahid, président du Conseil de la presse, a pris la parole pour évoquer l’un des aspects critiques de la crise actuelle : la faiblesse structurelle des entreprises de presse. Il a souligné l’importance de restructurer ces entités pour garantir le respect des règles déontologiques, comme l’absence de plagiat et le professionnalisme. "Seule une presse forte et professionnelle pourra résoudre les problèmes auxquels est confronté le secteur dans son ensemble, mais cela nécessite un engagement politique ferme et rigoureux", a-t-il ajouté. Le passage abrupt à la presse numérique a été un autre point de discussion, avec des effets néfastes sur le secteur. "La société attend une presse professionnelle, responsable et auto-organisée", a-t-il insisté.
Abdelkabir Akhchichen, président du Syndicat de la presse nationale, a dénoncé la précarité sans précédent qui touche le secteur. Il a plaidé pour une refonte du cadre légal afin de combattre la médiocrité, tout en rappelant que le syndicat et l’ANME sont des alliés de premier plan dans cette bataille pour l’amélioration des conditions de travail des journalistes. "Nous continuerons à militer pour garantir un soutien étatique permanent à la presse nationale", a-t-il déclaré avec conviction.
Abdellah El Bakkali, président du Conseil de la carte de presse, a exprimé son inquiétude face à la prolifération de faux journalistes. Selon lui, 40 % des cartes de presse actuelles ont été attribuées à des individus qui ne remplissent pas les critères professionnels. Il a insisté sur l’urgence de définir clairement ce qu’est une entreprise de presse, et de mettre fin à la multiplication des entités fictives. "L’année 2025 sera cruciale pour l’avenir de la presse nationale. Nous devons stopper l’hémorragie définitivement", a-t-il averti.
Enfin, Driss Chahtane, président de l’ANME, a clôturé l’Assemblée en rappelant la gravité de la situation. "Nous, journalistes professionnels, sommes devenus minoritaires dans notre propre secteur", a-t-il déploré, dénonçant l'influence croissante des "faux journalistes" et des influenceurs qui s’auto-proclament journalistes sans respect des normes professionnelles. Il a souligné l'importance de l’intervention de l’ANME pour redonner à la presse marocaine son prestige d’antan. "Nous allons travailler d’arrache-pied pour instaurer un cadre légal fort et efficace, et implémenter des entreprises de presse solides et structurées", a-t-il promis. Il a également annoncé que des réformes concernant l’octroi du soutien financier de l’État aux entreprises de presse seront bientôt publiées, avec des critères renforcés pour s’assurer que seules les entreprises véritablement structurées puissent en bénéficier.