Par Abdelhak Najib, Écrivain-Journaliste
Elle aurait pu être complètement catastrophique, cette année 2022, et ce, à plus d’un égard. Le monde va mal. Il va très mal. Il souffre de plusieurs graves pathologies dont certaines sont irréversiblement incurables. Crises à répétition, récession économique, inflations financières, dettes mondiales effarantes, une situation climatique dramatique, des millions de morts, des réfugiés par millions, des exilés politiques, des exilés climatiques, un taux de famine qui dépasse toutes les prévisions les plus alarmistes, de dangereux problèmes d’eau dans une planète de plus en plus sèche, des conflits régionaux qui touchent pratiquement les quatre coins du globe, le retour d’une terrible et préoccupante guerre en Europe, qui prend des allures d’une confrontation militaire presque mondiale avec la Russie qui se bat sur les terres ukrainiennes contre pas moins de 42 pays qui financent et arment le gouvernement de Kiev, des prix des denrées alimentaires qui explosent partout, plongeant des centaines de millions de personnes dans la précarité et la pauvreté, aggravant davantage la misère dont souffre le monde depuis au moins un siècle, avec des pays de plus en plus riches et la majorité de la population mondiale (Huit milliards) de plus en plus pauvre, sans oublier l’apparition de nouvelles maladies face auxquelles la science et la médecine montrent toute l’étendue de leurs limites, de nouveaux virus dévastateurs comme celui du coronavirus, qui tue encore par milliers chaque jour, un peu partout sur cette Terre, qui semble traverser là, l’une des pires périodes de sa longue histoire.
Oui, cette année aurait pu être pire que toutes les autres, où nous avons dû supporter, espérer, attendre, agir et réagir, sans trop d’incidence sur le cours d’une histoire humaine qui semble s’écrire vers le déclin et vers le chaos. Sans ambages, et sans donner dans le pessimisme le plus légitime, tous les indicateurs sont aujourd’hui au rouge.
Pourtant, les humains vivent et survivent, pour leur grande majorité. Pourtant, ils luttent. Ils souffrent et ils acceptent. Ils peinent à s’en sortir, mais ils refusent d’abdiquer. Ils ne veulent d’aucune manière laisser tomber. Alors ils espèrent. Et ils ont raison d’espérer. Parce qu’au cœur de cette catastrophe qui nous pend au nez, il y a de belles choses qui nous arrivent. Sporadiquement, mais elles arrivent quand même. Elles arrivent, parce que nous les créons de toutes pièces. Parce que nous ne lâchons rien et nous faisons face à l’inéluctable. Parce que nous refusons de jeter l’éponge et de nous avouer vaincus.
Oui, si ailleurs dans le monde, chacun tente de tirer la couverture vers lui-même, dans un effrayant élan d’égoïsme, si ailleurs, la division prend de plus en plus de place et les dissensions sociales grandissent, si ailleurs, les stigmatisations prospères, si le racisme revient avec force et menace tous les équilibres fragiles d’un monde branlant, si la xénophobie se drape aujourd’hui de tous les haillons portant des slogans ostentatoirement assumés, si les clivages ont droit de cité, si le rejet des autres devient la règle, si les polarisations deviennent la norme, dans un monde de plus en plus fragmenté, ici, au Maroc, et sans chauvinisme aucun, malgré les difficultés, malgré les crises, malgré les coups bas de nos pseudos amis, de certains de nos partenaires, de nos ennemis déclarés, malgré l’adversité déloyale et les micmacs politiciens, malgré un voisinage très hostile, dans une région très fragile, ici, au Maroc, nous avons capitalisé sur un principe humain qui reste pour nous évident : la solidarité. Et quand celle-ci est couplée à la cohésion sociale, avec ses hauts et ses bas, avec ses ruptures, avec ses points faibles et ses hésitations, les peuples sentent monter en eux le courage et l’espoir de faire face, avec dignité et avec humanité. Oui, la solidarité des Marocains a encore une fois montré à quel point l’union et l’unité sont capitales dans l’histoire des nations. Elle a montré à quel degré nous autres Marocains nous avons fait preuve de résilience et de responsabilité, durant toutes ces années de crise et de doute. Nous avons tenu bon face à tout, la tête haute et le cœur vaillant. C’est dans ce sens que lorsqu’arrive l’heure des bilans pour désigner les hommes et les femmes qui se sont illustrés durant cette année, je pense au peuple marocain qui mérite toutes les médailles et tous les hommages.
Oui, pour moi, c’est le peuple marocain qui est l’homme et la femme de l’année. Un peuple avec des racines et des valeurs, malgré les dérives, malgré certains ratages, malgré quelques dérapages, en dépit de toutes les brebis galeuses qui finissent par s’auto-éliminer, malgré tous les faux prédicateurs et les oiseaux de mauvais augure, malgré tous les ennemis de la réussite, ce peuple a montré à quel point il est assis sur des fondamentaux inamovibles. Un peuple avec des convictions. Un peuple fier. Un peuple gentil aussi. Un peuple tolérant, malgré quelques obscurantistes égarés et quelques charlatans aux voix inaudibles. Un peuple souriant, même quand il l’a dans l’os. Un peuple qui rit beaucoup, qui aime la légèreté, qui apprécie l’autodérision et parfois l’auto-flagellation, un peuple qui peut faire feu de tout bois, un peuple franchement à part, complexe et compliqué, et pourtant si simple et si fluide.
Oui, à plus d’un égard, cette année 2022 aurait pu finir en berne aussi. Mais, il y a eu un bel événement. Il y a eu un exploit. Il y a eu un miracle. Il y a eu ces 26 personnes qui ont joué à la balle et qui ont offert aux Marocains de grands moments de joie et de bonheur. Et beau hasard du calendrier, cela arrive à point nommé pour clore en apothéose une année si dure et si difficile. Et la lumière fut. Et le spectacle offert par ces 26 personnes est devenu planétaire et a fait du Maroc le pays le plus en vue du moment (Cela vaut toutes les campagnes de publicité, tous les slogans et tous les budgets que l’on peut mobiliser). Le Maroc illumine le monde et les Marocains vivent avec passion cette immense fête. Ils jubilent pour leur miracle. Et ils savent désormais, encore une fois (s’il fallait le rappeler pour certains), que ce pays est unique. Et que c’est là sa force. C’est là son avenir.