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Les ravages des drogues au Maroc : Les pilules de l’horreur

Les ravages des drogues au Maroc : Les pilules de l’horreur

Quand on arrive à se porter des coups, à se trancher la peau volontairement, à aimer voir le sang couler de sa propre chair, il faut se résoudre à cette évidence : on est au bout de la folie. On a atteint le point de non-retour. On a franchi la porte de l’enfer. Sans appel. Quand on arrive à se détester à ce point, avec autant de violence, de rage et d’absence de douleur, c’est que la personne qui s’automutile n’a presque plus rien d’humain. 

 

Par Abdelhak Najib 

 

L'histoire d’aujourd’hui commence par une conversation banale avec un jeune homme de 28 ans qui a le bras gauche maculé de sang, dans un quartier à Hay Hassani. Il vient de s'automutiler après avoir avalé quatre pilules de ce que la rue appelle  «Bola Hamra». Un lieu commun doublé d'un cliché vu que la fameuse pilule fait aujourd'hui partie du patrimoine national, et consacrée dans les mariages par la chanson qui porte son nom. Pour les fêtes, le vocable équivaut à la mélodie inaudible de la fin. Pour ce jeune homme, c'était un autre chapitre des scarifications qui viennent porter le nombre des balafres sur son corps à plus de 200. «Je suis épuisé et fatigué de cette vie de chien, mais je n'arrive pas à raccrocher. J'ai pris mes premières pilules en prison où j'ai purgé huit mois pour trafic de haschich. Les marques (cicatrices) que vous voyez sur mon cou et mon ventre, je me les suis faites en prison après avoir pris sept Ibnouzaydoune». 

«L'ibnouzaydoune» en question est le vocable carcéral, le nom de code, d'Hypnosédon, une drogue fatale qui circule clandestinement dans certaines prisons marocaines. Pour l'anecdote, un ex-détenu nous a expliqué la teneur d'une telle appellation : «Ibnouzaydoune te rend plus enclin au partage de la parole. On communique mieux avec ce truc, on a des facilités à parler aux autres, on se sent plus détendu et on a le verbe facile. À petites doses, on est tout juste nonchalant et d'humeur égale. Quand on dépasse les doses, il suffit d'une crise de colère, d'une contrariété, pour ameuter la prison et ouvrir une aile dans l'infirmerie. On se tape contre les murs, on veut tuer ou mourir, bref, on perd la ciboulette, et on devient un animal en cage. Ibnouzaydoune est le contraire d'Ibnoufaraoune, une autre drogue, qui elle, te fait monter la moutarde au nez et te fait faire des massacres. J'ai vu des hommes à deux doigts de la mort pour en avoir pris quatre pilules».

Le cas de Ismail est loin d’être un cas isolé. Vous en rencontrez tous les jours dans la rue. Les bras zébrés par des balafres, le cou, le visage, le ventre et ailleurs, là où une lame peut trancher dans le vif. Faites un tour du côté du stade de football de Casablanca, un jour de match, et vous allez voir l’un des spectacles les plus tristes, les plus désolants et les plus effarants. Des centaines de jeunes, hommes et femmes, portent des stigmates comme un signe d’appartenance à une catégorie humaine, à une secte qui se distingue par le nombre de cicatrices arborées sur le corps. La cause ? L’usage des drogues notamment les pilules de l’horreur en grande quantité allant jusqu’au meurtre, au parricide, au fratricide, à l’hécatombe familiale. 

Et ces produits circulent dans les villes à travers des réseaux organisés. Des produits chimiques, souvent périmés, frelatés, provenant d’ailleurs, comme de la frontière avec l’Algérie où prospère le trafic des psychotropes fabriqués en Europe de l’Est. 

Pire, certains arrivent à trafiquer des ordonnances et s’improvisent dealers semant la folie et la mort autour d’eux. Il n’y a qu’à voir les chiffres de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) pour se rendre compte du danger que représente ce trafic. Des arrestations, des saisies, des condamnations tout le long de l’année face à un marché des stupéfiants de plus en plus organisé. Un marché de la mort qui pèse lourd et qui rapporte gros.

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