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Soufiane El Bakkali : Triomphe d'un athlète en or

Soufiane El Bakkali : Triomphe d'un athlète en or

 

Le dompteur des pistes a fait trembler ses adversaires, notamment kenyans et éthiopiens, pourtant maîtres de l’épreuve du 3.000 m steeple.

Bakkali met fin à trente-sept ans de suprématie kényane sur cette distance. Après 10 ans d’entraînements acharnés, le natif de Fès arrache, à 25 ans, le précieux métal aux JO de Tokyo.

Entretien exclusif avec Soufiane El Bakkali pour nous dévoiler ses émotions et ses ambitions.


 

Propos recueillis par Ibtissam Z.

 

Finances News Hebdo : Avec un peu de recul, que retenez-vous des Jeux Olympiques de Tokyo ? Le précieux métal constitue-t-il un fait marquant et un tournant dans votre carrière ?

Soufiane El Bakkali : Briller aux Jeux Olympiques était un rêve qui s’est concrétisé sur le terrain. Il est vrai que j’ai eu une première expérience en 2016 aux Jeux Olympiques de Rio où j’ai décroché la 4ème place. J’étais encore très jeune, à peine 20 ans. Les J.O brésiliens constituaient pour moi un véritable départ. Depuis, j’ai poursuivi mon petit bonhomme de chemin, j’ai progressé et j’ai appris de mes erreurs. J’ai toujours cru en mes capacités. Finalement, mon travail a porté ses fruits. Après Rio, j’ai décroché l’argent au championnat du monde à Londres en 2017. J’ai pu laisser mon empreinte dans de grands meetings notamment la Diamond league.

En 2019, j’ai décroché le bronze au championnat du monde, cette médaille de bronze m’a motivé pour attaquer avec panache les JO de Tokyo. Le précieux métal de Tokyo est une belle consécration et une reconnaissance pour tant de préparation et de sacrifices. Mon objectif était de consacrer plus de 10 ans de travail dans le domaine de l’athlétisme par l’or olympique. J’étais déterminé pour accomplir ma mission de la plus belle des manières. Comme vous avez pu le constater, durant la course du 3.000 m steeple mon finish était irréprochable. Battre les Kenyans et les Ethiopiens sur leur distance de prédilection n’est pas une chose aisée. C’est une victoire en soi. Le sacre olympique donne plus de valeur à un athlète. Cela ouvre forcément de nouveaux horizons. Pour ma part, je serai plus attendu dans les meetings, ça va me booster davantage pour être au rendez-vous dans les grands évènements sportifs.

 

F.N.H. : Vous avez une très grande complicité avec votre entraîneur, véritable source d’inspiration pour vous. Vous en convenez que le point le plus important de toute relation entraîneur-athlète est la confiance. A quel moment le soutien de votre entraîneur est-il primordial ?

S. B. : Karim Tlemçani est mon mentor, c’est plus qu’un entraîneur. Tout son savoir-faire, il me l’a volontiers prodigué des années durant. C’est quelqu’un qui ne recule devant rien. Pour mon coach tout est possible, je puise ma force en lui. Certes, rien n’est acquis d’avance, mais grâce à la persévérance dans le travail, cela finit toujours par donner les fruits. Notre relation dépasse largement le cadre entraîneur-athlète. Nous sommes une vraie famille. Il m’a entraîné depuis 12 ans, la confiance s’est instaurée, elle est aujourd’hui ancrée.

C’est important pour un athlète de haut niveau, d’avoir un entraîneur de gros calibre. Il me pousse à chaque fois à me surpasser même quand je suis en proie au doute. Je suis en perpétuelle quête de performance. Dans toutes mes victoires, Karim Tlemçani y a grandement contribué, il a cru en moi dès le début, c’est important pour bâtir une carrière solide. Des hauts et des bas, il y en aura toujours, j’essaie de redoubler d’efforts pour concrétiser mes objectifs. C’est pour cela que sa présence à mes côtés est primordiale. Pour preuve, lors de la finale, ses encouragements m’ont donné une motivation sans égal, l’adrénaline était à son comble.

 

F.N.H. : Le 28 août dernier, vous avez été victime d’une chute d'entrée au meeting de Paris et vous avez été visiblement touché à la cuisse droite. Comment avez-vous vécu cette expérience douloureuse ? 

S. B. : Je suis un athlète engagé, je trace avec sérénité mes objectifs et je travaille pour les concrétiser. Juste après Tokyo, j’ai repris les entraînements, et le chemin des compétitions, histoire de ne pas baisser la garde. Sauf que j’ai eu la malchance de faire une chute d’entrée au meeting de Paris. Cette blessure était difficile à encaisser d’autant que c’était ma première sortie après les JO de Tokyo. C’est évident qu’une blessure sape le moral d’un athlète, c’est une véritable hantise pour tous les sportifs d’ailleurs. Plus de peur que de mal, c’était certes douloureux mais après quelques points de suture notamment au niveau de la main gauche, j’ai vite récupéré. L’essentiel pour moi est que j’ai évité le pire pour mon genou. Je voulais vraiment rester sur une note positive au meeting de Paris et faire un bon résultat, mais la blessure en a décidé autrement. Je ne courbe jamais l’échine, j’ai repris illico presto le chemin des entraînements et des compétitions internationales L’incident de parcours, dans la ville lumière est vite oublié.

 

F.N.H. : La chute au meeting de Paris n’a pas attisé votre ardeur. Bien au contraire, vous avez aussitôt enchaîné les compétitions, notamment en Pologne ce dimanche. Quelles sont vos ambitions actuelles ?

S. B. : Effectivement, j’ai repris les entraînements, quelque temps après ma blessure. Je me sentais en forme pour reprendre la préparation. Plusieurs échéances m’attendent. En Pologne, j’ai décroché la 2ème place, et signé la meilleure performance sur 3.000 m. L’évènement phare actuellement pour moi est la ligue de diamant, qui se tiendra à Zurich. Mon objectif est d’arracher un succès probant. Ce sera une belle revanche, surtout que j’ai perdu ce titre trois fois d’affilée. J’espère que cette année la chance me sourira, avec à la clé une belle consécration. Mes ambitions futures sont  de garder la même cadence, gagner plus de meetings et améliorer encore et toujours mon chrono.

 

F.N.H. : En tant que champion, quel est votre souhait le plus cher ?

S. B. : Mon souhait le plus cher est de représenter admirablement et dignement mon pays dans les compétitions d’envergure. Mon souci est de servir mon pays de la plus belle manière lors des grands événements sportifs. Bien évidemment, des souhaits j’en ai pas mal. Après l’or olympique de Tokyo, mon vœu est de prendre part aux Jeux Olympiques de Paris qui auront lieu dans 3 ans. Mon objectif est de décrocher l’or, je nourris cet espoir grâce au travail et aux efforts que je vais fournir avec l’aide de mon entraîneur. Il faut être à la hauteur de ses aspirations. Voir le drapeau national flotter dans les cieux et faire retentir l’hymne national, cela n’a pas de prix. C’est une fierté. Aussi, il faut être réaliste. Le jour où je serais incapable de concrétiser mes efforts en consécrations et en médailles, à ce moment-là, je réfléchirais à ma reconversion. Car j’estime que je dois penser à ma famille, sa sécurité et son bien-être. Mais pour l’heure, ma motivation est grande, avec l’or olympique de Tokyo, je mets les bouchées doubles, je suis déjà dans les starting-blocks pour attaquer avec rigueur les meetings internationaux et remporter d‘autres médailles. Je croise les doigts. 

 

Karim Tlemçani, entraîneur de Soufiane El Bakkali depuis 12 ans

La persévérance et l’excellence ont toujours accompagné l’athlète Soufiane El Bakkali, dans toutes les catégories, notamment minime et cadet, estime son entraîneur. «Je l’ai initié aux courses d'obstacles, parce qu’il avait énormément de capacité et de potentiel pour réussir dans cette discipline de demi-fond qui demande beaucoup de force et d’endurance. Même au niveau du chrono, il a toujours réalisé les meilleures performances de l’année malgré son jeune âge. Il incarne vraiment le dépassement de soi. Sa médaille d’or aux JO de Tokyo consacre un travail de longue haleine, Soufiane est un battant. L’esprit de la gagne l’anime en continu», assure-t-il. Tlemçani souligne le rôle important que joue l’entraîneur pour booster son athlète. «En vérité, malgré la performance ou le nombre de victoires, un athlète a toujours le trac. Le stress fait partie de la compétition. Pour gérer la pression, il faut travailler l’aspect psychologique surtout lors des derniers jours. Le mental doit être au beau fixe», insiste-t-il. 
Et d’ajouter «Avant les Jeux Olympiques, nous avons essayé de trouver des solutions adéquates et pratiques. Nous avons également décortiqué les points forts et faibles des adversaires. Le jour de la finale (2 août), Soufiane était prêt pour la compétition tant sur le plan physique que sur le plan psychique», estime le technicien national. Et de conclure : «Je tiens à mettre en valeur le projet que la Fédération royale marocaine d’athlétisme (FRMA) a mis en place. Il regroupe des centres de formation et d’entraînement d’un très haut niveau. Le staff technique est doté de compétences de qualité. Le Maroc regorge de potentialités, c’est une évidence. Soufiane El Bekkali est un bon exemple à suivre pour les jeunes marocains. Il faut par contre travailler dur et savoir se relever après l’échec. Réaliser les performances a un prix : la persévérance».

 

 

 

 

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