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Coronavirus Maroc : Les entreprises de pêche prises dans les nasses de la crise sanitaire

Coronavirus Maroc : Les entreprises de pêche prises dans les nasses de la crise sanitaire

La pandémie du coronavirus impacte lourdement l’activité des entreprises de pêche, dont les principaux débouchés à l’export sont les marchés européen et japonais. Dans cet entretien, Saad Tazi, Directeur général de l’Association professionnelle des armateurs de la pêche hauturière au Maroc (APAPHAM), revient sur les mesures prises en faveur des entreprises touchées par la crise actuelle.

Il propose également des dispositions spécifiques à prendre par les pouvoirs publics afin d’aider les entreprises du secteur à transcender la crise.

 

Finances News Hebdo : Quel est l’impact de la pandémie sur les exportations de votre secteur ?

Saad Tazi : Il est évident que nos exportations seront impactées par la crise sanitaire que connaît le monde, d’autant que nous sommes un secteur essentiellement exportateur.

L’impact se situe à plusieurs niveaux. Concernant le déchargement du poisson, les bateaux qui sont rentrés de mer n’ont pas pu décharger leurs cargaisons pour des raisons d’abord sanitaires.

Il fallait avant tout éviter tout contact entre les marins qui ont passé plusieurs mois en mer et qui sont, de ce fait, non touchés par la pandémie, et le personnel des sociétés qui devaient venir pour effectuer les déchargements.

Pour préserver la santé des marins, il a donc été décidé de commencer en priorité par les débarquer en leur préparant des conditions saines et de les acheminer ensuite par autocars jusqu’à leur lieu de résidence. 

Cette opération s’est déroulée dans de bonnes conditions grâce à l’action concertée de l’ensemble des intervenants (autorités locales et portuaires, service de santé, délégation du ministère de la Pêche) et, bien entendu, avec le concours des sociétés de pêche qui ont pris en charge le transport des marins pour les acheminer jusqu’à leur domicile.

De ce fait, les marchandises sont restées à bord des bateaux.  Au niveau du stockage, il y a lieu de préciser que d’habitude les marchandises sont stockées dès leur déchargement en attente de leur enlèvement après les contrôles techniques et sanitaires préalables à toute expédition vers les marchés extérieurs. 

Or, compte tenu de la situation, les déchargements vont être retardées pour les raisons évoquées plus haut. 

De plus, le ralentissement des liaisons de transport avec les pays importateurs fait que les cargaisons doivent être stockées dans les entrepôts frigorifiques.

Malheureusement, les capacités de stockage sont limitées et se trouvent pratiquement saturées, ce qui va obliger une grande partie des armateurs à garder les marchandises à bord des bateaux.

Au niveau du marché, nos exportations sont effectuées habituellement sur le marché européen et sur l’Asie, en l’occurrence, le Japon. 

La pandémie affecte globalement tous les marchés, et particulièrement nos principaux importateurs que sont l’Espagne et l’Italie en Europe. 

En ce qui concerne le Japon, le cheminement s’effectue par voie maritime et l’activité des bateaux transporteurs est également très ralentie. 

En conséquence, nous allons, d’une part, nous heurter à des difficultés de cheminement de nos marchandises du fait des perturbations affectant le transport et, d’autre part, nous allons subir les effets d’une demande qui sera, dans tous les cas de figure, très émoussée du fait de la pandémie, ce qui aura pour résultats des répercussions négatives sur les prix. 

En gros, les entreprises vont se retrouver entre «le marteau et l’enclume» : d’un côte,  elles ont une production qu’elles doivent stocker, alors qu’il n’y a pas suffisamment de place et, de l’autre, elles vont faire face à une demande étiolée et donc, à une baisse quasi certaine des prix. 

 

F.N.H : Quelle appréciation faîtes-vous des mesures mises en place en faveur des entreprises impactées par la crise actuelle ?

 S. T. : Les mesures prises par les pouvoirs publics pour venir en aide aux entreprises impactées par la pandémie sont dans l’ensemble appréciables.

Sur le plan théorique, le dispositif mis en place tient la route et permet potentiellement d’atténuer les effets de la crise pendant un certain temps.

Cependant, les pouvoirs publics devraient, et je pense que c’est également leur souci, veiller à ce que la célérité accompagne l’activation de ces mesures pour qu’elles n’interviennent pas lorsqu’il sera trop tard.

En outre, si la pandémie s’installe dans la durée, il serait sans doute nécessaire de renforcer ces mesures par d’autres pour que les entreprises puissent se maintenir en activité. 

 

F.N.H : Votre association a-t-elle prévu des mesures en faveur de ses membres afin de les aider à faire face aux conséquences du coronavirus ?

 S. T. : Le rôle de l’association est de constituer une interface active entre administrations, prises au sens large, et les professionnels.

Elle accompagne ses membres en fonction de leurs sollicitations et veille à la mise en application des décisions qu’ils prennent en assemblée ou en comité.

Pendant cette crise, elle prend part aux réunions de coordination pour l’accueil des navires et l’organisation de l’évacuation des marins, en collaboration étroite avec les armateurs qui lui transmettent leurs préoccupations.

 

F.N.H : Selon vous, quelles sont les dispositions adéquates à prendre de la part de l'Etat afin de renforcer la résilience de votre secteur durant cette période crise ?

 S. T. : Il est fort probable que les entreprises vont se trouver devant des difficultés financières insoutenables en raison des méventes qui risquent de se produire et de persister. En l’absence de recettes, les armateurs ne pourraient naturellement pas reprendre la mer et seraient contraints de rester à quai, de surcroît avec des marchandises encore à bord car les capacités de stockage sont quasiment épuisées.

Donc, il va falloir, d’une part, dégager des aires supplémentaires de stockage en congelé pour permettre les déchargements des navires et, d’autre part, prévoir, si la crise perdure, des lignes spéciales de crédits pour renflouer les caisses des sociétés afin de leur permettre la reprise de l’activité de pêche, le moment venu. 

 

Propos recueillis par Momar Diao

 

 

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