149 grands barrages d'une capacité totale de plus de 19 milliards de mètres cubes, 137 petits barrages, 88 stations de traitement d'eau potable, dont 9 unités de dessalement d'eau de mer (qui fournissent 147 millions de mètres cubes par an), 158 usines de traitement des eaux usées, 16 installations de dérivation des eaux, des milliers de puits et de forages pour extraire les eaux souterraines… : voilà tout l’arsenal dont dispose le Maroc.
Pourtant, cela ne semble pas suffire pour faire face au déficit hydrique structurel et sévère auquel fait face le Royaume. Selon le ministre de l’Équipement et de l’Eau, Nizar Baraka, ces cinq dernières années près de 6,5 milliards de m3 d'eau ont été perdus, dont 700 millions de m3 en 2022 et 300 millions de m3 de septembre à aujourd’hui.
Face à cette situation, le Maroc ne reste cependant pas passif et ne fait pas d’économie dans l’effort, puisque le montant des investissements programmés dans le cadre du Programme d'approvisionnement en eau potable et d'irrigation 2020-2027 a été porté de 115 à 150 Mds de DH, tandis que les travaux de 20 grands barrages se poursuivent pour un coût total de 31 milliards de dirhams.
Au-delà des moyens financiers mobilisés, il faudra visiblement faire preuve de beaucoup d’imagination pour juguler ce déficit hydrique chronique. Voire changer de paradigme, d’autant que les facteurs exogènes comme la sécheresse et le changement climatique mettent à nu les limites actuelles du modèle de gestion hydrique du Royaume.
Ce qui pousse à miser sur les interconnexions hydrauliques, la promotion des technologies innovantes dans le domaine de l’eau, comme notamment le dessalement d’eau de mer, ou encore développer de façon soutenue la réutilisation des eaux usées et améliorer l’efficacité hydrique. C’est pourquoi il est prévu la réalisation d’unités de dessalement d'eau de mer à Casablanca, Nador, Safi, Dakhla, El Jadida, Marrakech, Essaouira, Guelmim, Tan-Tan et Tiznit…
L’autre grand projet dans le pipe est l'interconnexion des bassins hydrauliques du Sebou et du Bouregreg, légitimée par la diminution des ressources en eau, la succession des années de sècheresse et la pression sur le barrage d'Al Massira qui assure l'approvisionnement en eau potable de plusieurs villes, dont Casablanca, Settat et Berrechid.
Cette interconnexion permettra la mobilisation de 180 millions de m3 des eaux des barrages de Bin El Ouidane et d'Ahmed El Hansali pour l'irrigation de plus de 176.000 ha de terres agricoles. Toutes ces initiatives permettront certes d’améliorer la mobilisation des ressources en eau, mais ne suffiront certainement pas à sortir le Royaume de la liste des pays avec un stress hydrique «élevé».
Car le changement climatique a enclenché un processus qui semble irréversible à travers le monde : les pénuries d’eau seront plus régulières et plus sévères, et en 2025, 1,8 milliard de personnes vivront dans des pays ou régions touchés par une pénurie d'eau complète et les deux tiers de la population mondiale pourraient vivre dans des conditions de stress hydrique.