Les produits agricoles marocains sont fréquemment visés par des campagnes de boycott menées par les agriculteurs et producteurs européens. Tandis qu'en Espagne la situation s'est calmée suite à la plainte déposée par la Comader, en France, les camions transportant les produits agricoles marocains, notamment les tomates, sont encore la cible d'attaques.
Par M. Ait Ouaanna
Le mouvement d'hostilité des agriculteurs de l’Union européenne envers les produits agricoles marocains ne semble pas sur le point de prendre fin. Récemment, plusieurs dizaines d’agriculteurs ont organisé un barrage filtrant à Perpignan, dans le sud de la France, pour protester contre l’importation «massive» et la «surreprésentation» sur les étals français de produits marocains «en pleine période de production française».
Réunis à l’appel de trois organisations du monde agricole français, ces agriculteurs ont déchargé la cargaison d’un camion de tomates cerises, en provenance du Maroc, avertissant qu’il ne s’agit que du début d’une longue série d’actions. En plus d’accuser les exportateurs marocains de concurrence déloyale et de non-respect des normes sanitaires, ces manifestants dénoncent une augmentation de 29% des importations de tomates marocaines entre 2019 et 2022, ainsi qu’une «main d'œuvre à 1euro de l’heure au Maroc contre 14 euros de l’heure en France».
Face à cela, ces grévistes revendiquent, entre autres, un étiquetage «plus transparent» pour permettre aux consommateurs français de distinguer clairement l'origine des produits. Cette opération, qui n’en est qu’une de plus, et visiblement pas la dernière, n'a pas manqué de faire réagir la Confédération marocaine de l'agriculture et du développement rural (Comader), qui condamne «fermement ces actes et comportements incompréhensibles basés sur des arguments vagues».
Dans un communiqué, la Confédération a exprimé son indignation face aux attaques «répétées et injustifiées» visant les produits marocains depuis le lancement de la campagne d'exportation, dénonçant «le manque de rigueur» des autorités françaises face à la multiplication de ces opérations. La Comader a par ailleurs souligné que les tomates marocaines, exportées en France sous l'accord agricole entre le Maroc et l'UE, respectent les normes en vigueur et sont soumises à des contrôles sanitaires sévères par les autorités européennes avant d'être mises en vente en France et ailleurs en Europe.
Et de noter que les tomates marocaines sont importées sur le marché français en vue de compenser un déficit de production locale en cette période de l'année.
Suite à ces attaques répétitives, le boycott du marché européen pourrait s’avérer inévitable. Mais pour l’instant, il n’en est pas question. «À ce stade, nous n'avons pas encore pris de décisions. Nous espérons que les exportations se dérouleront normalement. Toutefois, si les agriculteurs français reprennent leurs attaques, nous prendrons des mesures que nous jugerons nécessaires», nous confie Rachid Benali, président de la Comader.
S’agissant des attaques menées par les agriculteurs espagnols à l’encontre de leurs homologues marocains, Benali nous indique que depuis la plainte déposée le 4 mars dernier auprès des tribunaux du voisin ibérique, la situation s’est apaisée. S’exprimant au sujet des manifestations des agriculteurs en Espagne, Luis Planas, ministre de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation, avait souligné l’importance de respecter les quotas de produits marocains entrant dans l’UE afin que la relation commerciale reste «normale et positive».
Dans la même lignée, le responsable espagnol a relevé que le respect des normes de production de l’UE par les producteurs étrangers est indispensable pour garantir une concurrence équitable et afin de protéger les intérêts des agriculteurs espagnols. Et de préciser que les droits de douane réduits dans le cadre des accords commerciaux entre le Maroc et l’Union européenne «sont parfaitement logiques».
Les attaques répétitives des camions transportant des produits agricoles marocains en Europe risquent de mettre en péril les échanges commerciaux entre les deux parties. Mais pour l’instant, le Royaume maintient sa position de principal fournisseur de fruits et légumes pour l’Union européenne.
D’après les dernières données de la Fédération espagnole des producteurs et exportateurs de fruits, légumes, fleurs et plantes vivantes (FEPEX), la valeur totale des exportations du Maroc vers l’UE a dépassé les 1,8 milliard d’euros jusqu’à septembre 2023, en hausse de 6% par rapport à 2022.