Economie Tout voir

BTP: «De nouvelles réformes sont prioritaires»

BTP: «De nouvelles réformes sont prioritaires»

L'augmentation significative de l'investissement public dans le secteur du BTP en 2024, annoncée par le ministère de l'Equipement et de l'Eau, ouvre de nouvelles perspectives pour le développement et la modernisation de l'infrastructure marocaine. Mohamed Mahboub, président de la Fédération nationale du bâtiment et des travaux publics, partage son point de vue sur les défis et les opportunités qui attendent le secteur.

 

Propos recueillis par D. William

Finances News Hebdo : Quel impact l'augmentation de 56% de l'investissement public en 2024, annoncée par votre ministre de tutelle, aura-t-il sur le secteur du BTP, selon vous ?

Mohamed Mahboub : Nous sommes heureux des annonces faites par le ministre de l’Equipement et de l’Eau concernant la poursuite et l’accentuation de l’effort de l’Etat en matière d’investissement dans notre secteur. Nous sommes d’autant plus heureux que la Journée d’information est devenue un rendez-vous traditionnel entre les entreprises et le ministère. C’est nettement mieux qu’un programme prévisionnel publié sans aucun débat ni intervention des principaux concernés, les professionnels qui réaliseront ces programmes. La FNBTP milite pour que l’information fasse aussi le bilan des réalisations des programmes de l’exercice précédent et des leçons qu’on peut en tirer. Pour revenir au fond, nous nous félicitons de cet effort qui prouve, une fois encore, les retombées positives du secteur du BTP sur l’économie nationale et sur la création d’emplois. Nous nous félicitons également de la variété des projets planifiés qui s’adressent tant aux petites et moyennes entreprises qu’aux grandes et, d’autre part, de l’ouverture de nouvelles opportunités d’expertise, autoroutes de l’eau, dessalement, grands équipements sportifs, hospitaliers et universitaires, nouvelles mobilités urbaines, régionalisation….

 

F.N.H. : Quelle est votre opinion sur la modernisation et la durabilité du secteur du BTP pour répondre aux besoins croissants du pays d'ici 2030 ?

M. M. : Nous ne nous faisons aucun souci sur l’expertise, la proactivité, l’agilité et l’adaptabilité de nos entreprises et des professionnels du secteur du BTP en général. Nos entreprises ont déjà eu à faire face au formidable élan de la décennie 2002-2012, puis aux vaches maigres et à la pandémie du COVID, à la catastrophe du Haouz et à tout le développement tant quantitatif que qualitatif et technique des investissements nationaux dans les infrastructures, les équipements publics et les programmes d’habitat et d’urbanisme. Tout ceci dans le strict respect des règles de la concurrence loyale, des normes et des standards les plus modernes.

 

F.N.H. : Pensez-vous justement que les entreprises du BTP sont suffisamment outillées, notamment en termes de main- d’œuvre qualifiée et d’expertise, pour accompagner les grands chantiers du Maroc ?

M. M. : Ecoutez, partout dans le monde et au Maroc, les entreprises se forment et forment leur encadrement et leur maind’œuvre «sous le feu» des exigences de la conjoncture. Notre métier nous impose pour chaque projet des exigences techniques, d’organisation du travail dans les chantiers, dans nos relations avec le maitre d’ouvrage et ses assistants, avec nos fournisseurs que nous nous devons de respecter scrupuleusement. Il y va de notre compétitivité et de notre image de marque. Aussi, chaque projet est à la fois un challenge, le moment d’acquisitions des expertises nécessaires, de recrutement, de formation et de perfectionnement des ressources humaines nécessaires. Autrement, nous serions pénalisés en matière de paiement, d’organisation du chantier, de gestion des flux… ! Je pense qu’il serait utile de poser également cette question aux responsables de l’Administration, et je rappelle ce que j’ai avancé au début de cette interview sur l’aspect évaluation des réalisations antérieures.

 

F.N.H. : A ce titre, quelles sont les principales contraintes auxquelles les entreprises du secteur sont confrontées actuellement ?

M. M. : Vous venez de soulever la première contrainte liée aux ressources humaines. La formation et l’attraction des meilleurs talents dans le secteur du BTP restera une constante, quelle que soit la conjoncture. Il est clair que nos entreprises y font face en s’adaptant et en formant elles-mêmes leur maind’œuvre. Mais au regard de notre contribution aux budgets consacrés à la formation professionnelle, nous nous sommes investis pour étoffer le dispositif national existant en matière d’offre de formation. Dans ce cadre, il faut rappeler que c’est la FNBTP qui a été au départ et pendant tout le chantier de l’Ecole Mohammed VI de formation aux métiers du BTP au nord de Settat, à la mise en place des licences professionnelles du BTP avec plusieurs universités marocaines. Actuellement, et vu que la formation est mieux ciblée et plus adaptée si elle est gérée par la profession, la FNBTP a lancé à Fès un premier Institut de formation aux métiers du BTP (IFMBTP) dans le cadre d’un partenariat public-privé piloté par notre Fédération. Le deuxième type de contraintes est lié à l’arsenal législatif, réglementaire et administratif de la commande publique dans notre pays qui représente plus de 75% de la demande adressée aux entreprises du BTP. Dans ce cadre, l’année 2023 a été marquée par l'entrée en vigueur du nouveau décret des marchés publics qui représente une avancée significative, notamment en généralisant la préférence nationale et en instaurant la règle du mieux disant pour lutter contre la casse des prix et le dumping déloyal.

 

F.N.H. : Comment la FNBTP compte-t-elle contribuer à la relance et à la pérennité du secteur au Maroc face aux défis actuels ?

M. M. : La FNBTP assume, en tant que représentant des entreprises, une mission de force de sensibilisation et de proposition. Plus généralement, la commande publique reste marquée par le déséquilibre dans les relations entre les maîtres d’ouvrages publics et les entreprises. • Ainsi, la crise économique précédente et la pandémie du COVID ont aggravé les conséquences des lacunes du système de révision des prix, dont une réforme est menée actuellement par le ministère de l’Equipement et de l’Eau, en collaboration avec notre Fédération. Les retards de paiement de certains maîtres d’ouvrages publics restent, également, un défi majeur, aggravés par la loi relative aux délais de paiement qui ne s'applique pas à l’Administration. De plus, de nouvelles réformes sont prioritaires, telles que la refonte du CCAGT et du décret sur les avances dans les marchés publics. Pour y remédier, notre Fédération propose d'améliorer le processus de validation des attachements et de lutter contre les retards de paiement en adoptant des procédures plus diligentes au niveau de l'Administration.

Plus largement, nous sensibilisons nos partenaires gouvernementaux de réfléchir à l’accompagnement des entreprises. Il est primordial de mettre en place des mécanismes visant à soutenir les entreprises nationales pour qu'elles puissent mieux répondre aux défis à venir du secteur de la construction. Cela pourrait passer par un renforcement des dispositifs de financement spécifiques au secteur. Plus important, il est essentiel d'améliorer les voies et les procédures de recours pour garantir la transparence et l’équité dans l’accès à la commande publique et le traitement juste des différends qui surviennent dans l’exécution des projets. L’encouragement de l’arbitrage et de la conciliation serait un pas décisif, ainsi que le démontre le benchmarking international. Nous insistons sur ces aspects vitaux pour nos petites et moyennes entreprises qui représentent la majorité du tissu entrepreneurial du BTP, et dont l’impact sur les économies locales et régionales, voire nationales est très fort. Sur un autre plan, nous sommes engagés à promouvoir les technologies innovantes telles que le BIM (Building Information Modeling), et les techniques de construction écologiques, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives en termes d'efficacité, de durabilité et de rentabilité dans le secteur du BTP. Tous ces thèmes feront certainement l’objet de débats fructueux lors de la 6ème édition du «BTP Expo & Forum du BTP» que notre Fédération organise sous le haut patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, du 29 mai au 1er juin au Marrakech Parc Expo, sous le thème «Construire le Maroc de demain : Horizon 2030». 

 

 

 

 

Articles qui pourraient vous intéresser

Samedi 27 Avril 2024

Bouznika : Akhannouch à l’ouverture du 18ème congrès du Parti de l'Istiqlal

Jeudi 25 Avril 2024

Maroc - France : Akhannouch s’entretient avec Bruno Le Maire

S'inscrire à la Newsletter de La Quotidienne

* indicates required