L’Alliance des économistes istiqlaliens vient de publier un communiqué dans lequel elle propose une nouvelle approche pour accélérer les paiements des créances commerciales, en vue de réduire les défaillances d’entreprises et sauver des dizaines de milliers d’emplois. L’intégralité du texte.
«Par son communiqué du 18 juin 2018, l’Alliance des économistes istiqlaliens (AEI) avait attiré l’attention du gouvernement sur l’ampleur des délais de paiement des créances commerciales, qu’elles soient, publiques ou privées. L’effet que le prolongement démesuré de ces délais provoque en termes de défaillance des entreprises, moyennes, petites et très petites et de pertes d’emplois anéantit les efforts fournis pour en créer.
L’AEI note avec grande satisfaction l’intérêt accordé à ce sujet par le dernier Conseil des ministres, couronné par les Hautes directives Royales en vue de réduire ce fléau.
L’AEI prend acte des mesures favorables prises par le Gouvernement pour inciter les entreprises et établissements publics à procéder au paiement de leurs créances et du déblocage d’importants montants d’arriérés de TVA au profit de grandes entreprises publiques et privées.
Mais, l’AEI note avec inquiétude que ces mesures n’ont pas eu, pour l’instant, les répercussions espérées sur les PME et TPE. Constituant 95% du tissu entrepreneurial marocain et grands vecteurs de création d’emplois directs et d’auto-emplois, ces entreprises continuent de voir leur trésorerie pâtir de ces retards, mettant ainsi leur existence en péril.
Considérant que la problématique des délais de paiement se pose aussi bien entre secteur public et secteur privé qu’entre entreprises du seul secteur privé, l’AEI appelle à nouveau le gouvernement à mettre en place des mesures urgentes et à adopter une approche globale pour réduire les défaillances d’entreprises et sauver ainsi des dizaines de milliers d’emplois, liées en grande partie à la problématique des délais de paiement.
Notre pays investit énormément pour créer des opportunités d’emploi que nous ne pouvons pas nous permettre de les laisser ainsi s’évaporer.
Dans ce contexte, l’AEI réitère sa proposition de plafonner à 90 jours le délai de paiement des créances commerciales dues aux entreprises, quel que soit leur secteur d’activité.
Les crédits commerciaux ainsi accordés doivent être systématiquement matérialisés par des effets de commerce remis au fournisseur dès réception du service ou de la marchandise faisant l’objet du contrat de vente.
Les entreprises clientes dépassant les délais de paiement ainsi fixés devraient être sanctionnées, selon un procédé bénéficiant aux fournisseurs non payés, et dont les modalités seront précisées par une proposition de loi préparée par les élus du Parti de l’Istiqlal au Parlement, en collaboration avec l’Alliance des économistes istiqlaliens.
Ce procédé permettrait au fournisseur non payé dans les délais prévus par la loi 49-15, de constater une provision pour créances douteuses, équivalente au montant des créances en souffrance et dont la déductible fiscale ne doit plus être conditionnée par l’introduction d’un recours judiciaire.
Parallèlement, et sur la base des informations contenues dans les déclarations annuelles souscrites par voie digitale, le client récalcitrant paierait une amende au profit du Trésor proportionnelle aux créances accusant des retards de paiement.
Il est souhaitable que les dispositions fiscales susmentionnées puissent être prises en considération par la Loi de Finances 2019 pour en assurer une application dès le début de l’année prochaine.
Il est bien entendu que ces dispositions ne se substitueraient nullement à celles prévues par le code de commerce et par la Loi sur les délais de paiement en matière de droits de recours et des intérêts de retard bénéficiant aux fournisseurs victimes de ces retards.
Dans le même ordre d’idées, l’AEI appelle le Gouvernement à :
* Faire en sorte qu’une part importante des fonds mobilisés au profit des grands opérateurs, notamment dans le cadre du paiement des arriérés TVA, soit affectée à l’apurement de leurs dettes fournisseurs, particulièrement celles revenant aux PME et TPE.
* Actualiser la Loi sur les délais de paiement et publier les décrets d’application y afférents.
* Elargir rapidement la portée de l’Observatoire des délais de paiement aux entreprises privées, en commençant par celles dont le chiffre d’affaires annuel dépasse les 50 millions de dirhams.
* Publier, tous les 3 mois, dans le cadre de l’Observatoire des délais de paiement, la situation des comptes fournisseurs des entreprises et établissements publics (en précisant leur âge et volume) ; ainsi que ceux des entreprises privées dont le chiffre d’affaires dépasse les 50 millions de dirhams dans une première phase.
* Publier simultanément la situation des arriérés de l’Etat à l’égard des entreprises, notamment en matière de remboursement de TVA, de remboursement de trop perçus d’IS et de règlement de marchés publics.
L’AEI assurera une veille permanente sur la mise en œuvre des mesures déjà décidées et des recommandations proposées.
Par ailleurs, l’AEI poursuit sa réflexion pour réduire les défaillances d’entreprise à travers une approche systémique globale qu’elle compte présenter prochainement, avec des solutions permettant de :
* améliorer le cadre juridique et réglementaire pour favoriser la continuité d’exploitation, la relance ou le redémarrage des entreprises en difficulté;
* accélérer les procédures judiciaires permettant aux ayant-droits de procéder au recouvrement de leurs créances;
* réduire les délais effectifs de paiement des créances commerciales et adopter des solutions spécifiques aux secteurs nécessitant des délais de paiement particulièrement longs;
* accélérer les flux monétaires liés aux transactions commerciales, notamment à travers leur financement par le système bancaire;
* sécuriser les paiements, notamment à travers l’élargissement, la simplification et la démocratisation des systèmes de garantie et d’assurance;
* renforcer la transparence et la qualification des clients concernant leurs délais de paiement en étudiant les différentes possibilités concernant les exigences réglementaires en matière de publication et les mécanismes de protection des petits et moyens fournisseurs par l’adoption de fichiers positifs et des «Name and Shame Lists»".■