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Dessalement de l'eau de mer: Une réponse stratégique à la crise hydrique structurelle

Dessalement de l'eau de mer: Une réponse stratégique à la crise hydrique structurelle

Face à une raréfaction croissante des ressources hydriques et à une demande en eau toujours plus forte, le Maroc a fait un choix stratégique audacieux : investir massivement dans les stations de dessalement de l'eau de mer. La construction de celle de Casablanca, la plus grande en Afrique, nécessitera un investissement de 6,5 Mds de dirhams.

 

Par D. William

La situation hydrique au Maroc est toujours préoccupante. En réponse à cette crise, le Royaume mise fortement sur la construction de stations de dessalement de l'eau de mer, à l’instar de celle de Casablanca, qui se distingue par son ampleur et son importance stratégique. Le Prince héritier Moulay El Hassan a lancé lundi dernier les travaux de construction de cette station, située dans la commune de Lamharza Essahel, province d’El Jadida.

Ce projet, qui représente un investissement de 6,5 milliards de dirhams, est destiné à devenir la plus grande installation de dessalement d'Afrique. La station, d'une capacité annuelle de 300 millions de mètres cubes, vise à fournir de l'eau potable à 7,5 millions de personnes, incluant les habitants du Grand Casablanca, Settat, Berrechid, Bir Jdid, ainsi que des régions avoisinantes.

La station de Casablanca sera réalisée en deux phases sur un terrain de 50 hectares. La première tranche, prévue pour être opérationnelle fin 2026, permettra une production de 548.000 m3 par jour, soit 200 millions de m3 par an. La deuxième phase, prévue pour mi-2028, augmentera la capacité de production à 822.000 m3 par jour, ajoutant 100 millions de m3 annuels, dont 50 millions seront destinés à l'usage agricole. Le projet comprend également un système de transport de l'eau potable produite, incluant trois stations de pompage, trois réservoirs de stockage et un réseau de distribution de près de 130 kilomètres de conduites d’adduction.

Ce système nécessitera un investissement supplémentaire de 3 milliards de dirhams financés par des fonds publics. La station utilisera des technologies de dernière génération, telles que l'osmose inverse, et sera entièrement alimentée par des sources d'énergie renouvelable. Le coût de production de l'eau potable est estimé à 4,48 DH/m3 .

Un choix judicieux ?

La station de dessalement de Casablanca s’inscrit dans le volet «Amélioration de l’offre hydrique» du Programme national d'approvisionnement en eau potable et d'irrigation 2020-2027, lancé par le Roi, avec un budget global de 143 milliards de dirhams. Ce programme vise à améliorer l'offre hydrique dans un contexte marqué par un déficit pluviométrique et une forte pression sur les ressources hydriques conventionnelles. Le Maroc, confronté à une raréfaction accrue de ses ressources hydriques, adopte ainsi une stratégie proactive pour sécuriser son approvisionnement en eau. Les initiatives prises comprennent, entre autres, la construction de barrages, l'interconnexion des systèmes hydrauliques et la mise en place d'infrastructures de dessalement. Actuellement, le pays dispose de 153 grands barrages, offrant une capacité totale de plus de 19,9 milliards de mètres cubes. Sauf qu’au 11 juin, le taux global de remplissage des barrages se situait à 31% pour 5,1 Mds de m3 contre 33,4% (5,4 Mds de m3 ) à la même période de l’année dernière. C’est dire que les conditions météorologiques capricieuses, exacerbées par le changement climatique, posent des défis considérables au Maroc. La baisse des précipitations, combinée à des épisodes de sécheresse plus fréquents et plus sévères, affecte directement les ressources hydriques du pays. Une étude australienne citée par Ahmed Réda Chami, président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), indique que le Maroc sera l'un des cinq pays les plus touchés par la raréfaction des précipitations au cours des cinquante prochaines années.

Actuellement, la quantité moyenne d'eau par habitant a chuté de 2.560 mètres cubes dans les années soixante à 620 mètres cubes, avec une prévision de baisse à 560 mètres cubes d'ici 2030. Les épisodes de sécheresse qui ont frappé le Royaume ces six dernières années ont contribué à réduire davantage les ressources en eau. La période 2018-2022 a été d’ailleurs l'une des plus sèches de l'histoire du pays, avec seulement 17 milliards de mètres cubes de précipitations sur cinq ans. Comme réponse, le gouvernement a accéléré la construction de barrages, mais surtout développé des stations de dessalement. À l'horizon 2030, le Maroc prévoit que 50% de son approvisionnement en eau potable proviendront du dessalement, avec une production visée de 1,4 milliard de mètres cubes par an. L'Office chérifien des phosphates (OCP) joue un rôle central dans cette stratégie, s'engageant à dessaler 560 millions de mètres cubes, dont 500 millions seront destinés à l'agriculture. D’ailleurs, El Jadida sera alimentée par une usine de dessalement à Jorf Lasfar, opérée par l'OCP. De même, la station de dessalement de l’eau de mer de Safi, par exemple, contribuera à la production de 30 millions de m3 d'eau potable. Elle vient en appui à d’autres stations déjà achevées à Al Hoceima, Agadir, Tarfaya et Laâyoune. D'autres projets sont en préparation, notamment à Tiznit, Essaouira, et dans la région de l'Oriental. Pourquoi alors le Maroc mise-t-il dorénavant à fond sur les stations de dessalement. «Auparavant, le coût de production du mètre cube était trop élevé en raison du prix de l’énergie (qui représente 45% du coût de production du mètre cube). Actuellement, ce n’est plus le cas, d’autant qu’avec les avancées réalisées par le Royaume dans le domaine des énergies renouvelables, le kwh est très compétitif», nous expliquait l’ancien patron de l’ONEE, Abderrahim El Hafidi. C’est dire que ce choix n'est pas seulement une réponse à une crise immédiate, mais une vision à long terme pour garantir la sécurité hydrique du Royaume. 

 

 

 

 

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