Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a averti jeudi que le droit à l'eau et la sécurité hydrique sont "gravement menacés par un usage intensif", appelant ainsi tous les acteurs à entreprendre des mesures urgentes.
La situation de pénurie hydrique au Maroc est alarmante, puisque ses ressources en eau sont actuellement évaluées à moins de 650 m3/habitant/an, contre 2.500 m3 en 1960, et devraient baisser en deçà de 500 m3 à l’horizon de 2030, a prévenu le CESE dans un communiqué.
Des études internationales indiquent que les changements climatiques pourraient provoquer la disparition de 80% des ressources d'eau disponibles au Royaume dans les 25 prochaines années.
Malgré l’extrême gravité de la situation, la surexploitation des ressources en eau, notamment des nappes souterraines, s'accentue, faisant fi des autorisations imposées par la loi, alors que les pouvoirs publics sont dans l’incapacité de mettre en place des moyens de contrôle efficaces, note la même source.
Dans ce cadre, le CESE a mis en avant la nécessité d’agir en urgence pour assurer la sécurité hydrique du Maroc.
Et ce, précisant que le caractère irréversible de la raréfaction des ressources hydriques s’accentuera davantage si aucune mesure n’est prise ou encore ou si les réformes annoncées tardent à être mises en œuvre.
A ce titre, le Conseil a proposé trois grandes catégories d'actions, issues de ses rapports et ses avis, dont notamment des mesures de sensibilisation urgentes pour agir sur le comportement des usagers.
Cela consiste à concevoir et mettre en œuvre une stratégie de communication visant à sensibiliser l’ensemble des usagers de l’importance capitale d’adopter des comportements éco-responsables à l’égard de l’eau et rompre avec la pratique d’arrosage des espaces verts publics, des structures sportives et des parcs de loisir avec l’eau potable par un recours systématique à la réutilisation des eaux usés.
Il s'agit également de mesures d’ordre institutionnel et réglementaire : la systématisation de l'audit et la détection des fuites pour hisser le rendement de l’adduction et de la distribution de l’eau dans les villes au niveau des standards internationaux, l'élaboration d'une étude d’impact et d’efficacité hydrique pour les projets d’investissements, notamment dans l’agriculture, l’industrie et le tourisme, et instaurer le recours à l’arbitrage du chef du gouvernement dans ce domaine.
Le Conseil prône, en outre, d'entamer une réforme profonde de la tarification nationale et locale de l’eau et des services de l’assainissement liquide et de l’épuration des eaux usées et de communiquer les résultats.
Il souhaite aussi la mise en place d’un référentiel national de la comptabilité de l’eau qui reflète les coûts réels de l’eau par bassin hydraulique versant, permettant d’assurer une solidarité régionale et sociale via un meilleur ciblage des subventions publiques au secteur et en optimisant les capacités d’autofinancement des régions.
Les instances de coordination et de concertation devront aussi être activées au niveau national et local pour rendre des arbitrages, non seulement liés aux conflits, mais essentiellement aux choix à effectuer au regard des différents critères émanant d’une politique d’investissement et de développement.
Le CESE évoque également des mesures d’ordre stratégique pour une meilleure allocation des investissements dans le domaine de l’eau, notamment l'accélération du recours massif aux ressources hydriques non conventionnelles, à travers la généralisation du dessalement de l’eau de mer pour les zones côtières et la réutilisation des eaux usées épurées et l'installation, au moins pour les nouveaux lotissements, des réseaux séparatifs, et œuvrer à la généralisation des stations d’épuration.
La sécurité hydrique devient une priorité pour le Maroc aujourd’hui et pour les années à venir, souligne le communiqué.
Menaçant de générer de l’instabilité sociale et d’aggraver les inégalités territoriales, elle nécessite une réponse politique urgente et devrait être considérée par le Maroc comme l’un des principaux garants de la paix sociale au niveau du pays et un facteur de soutenabilité et de résilience de son futur modèle de développement.
Cette réponse doit émaner d’une politique à la fois protectrice et valorisante de la ressource, mais également novatrice et inspirée des meilleures pratiques en matière de gouvernance, conclut le communiqué.