Société Tout voir

Dans l’ombre des institutions, loin des projecteurs de la diplomatie classique, des femmes marocaines disséminées aux quatre coins du globe bâtissent, patiemment, un Maroc sans frontières.

Elles sont des pionnières, des bâtisseuses de ponts culturels, et à travers leurs parcours d’exception, elles tissent une toile subtile mais essentielle : celle d’une diplomatie parallèle, vibrante et ancrée dans le réel.

Il y a celles qui, par la culture, transmettent une mémoire, un imaginaire, une identité. 

Rachida Belkacem, écrivaine et conteuse, fait résonner l’âme du Maroc dans ses récits.

Par ses mots, elle réconcilie les générations, réhabilite des pans d’histoire oubliés et offre aux lecteurs étrangers un regard intime sur ce pays qui l’a façonnée.

Chaque ligne qu’elle écrit devient une passerelle entre son Maroc natal et le monde, révélant la richesse de notre héritage et l’universalité de notre message.

D’autres, comme Lamia Hanafi, placent l’entrepreneuriat au cœur de leur engagement. Fondatrice de La French Moroccan Touch, elle fédère des talents marocains, crée des synergies entre l’Europe et l’Afrique, et met en lumière le potentiel économique du Royaume.

Pour elle, faire rayonner le Maroc, c’est aussi démontrer que ses compétences et ses savoir-faire ont toute leur place dans la mondialisation. Elle incarne cette nouvelle génération de femmes qui transforment la perception du Maroc à l’international, prouvant que l’innovation et la tradition peuvent coexister harmonieusement.

Khadija Kabbouri, elle, a choisi le terrain politique. Établie en France, élue locale et militante inflexible, elle porte la voix de ceux que l’on entend trop peu.

À travers ses engagements, elle défend non seulement les Marocains de l’étranger, mais aussi une vision plus inclusive de la société. Elle est de ces femmes qui incarnent, au-delà des discours, une diplomatie du quotidien, ancrée dans le concret et l’action.

Son travail est un exemple éclatant de l’impact que peuvent avoir les femmes dans les sphères décisionnelles.

Dans les laboratoires et les amphithéâtres, d’autres encore tracent leur chemin. Rabia Bouali-Benazzouz, neurobiologiste, incarne cette excellence académique qui dépasse les frontières.

Elle fait rayonner le Maroc au sein des cercles scientifiques internationaux, participant à la transmission des savoirs et prouvant que l’influence d’un pays ne se mesure pas seulement en traités ou en alliances, mais aussi en découvertes et en avancées technologiques.

Son engagement dans la recherche est un atout indéniable pour le Maroc, démontrant que la science et l’innovation sont des vecteurs de rayonnement.

Et puis, il y a celles qui transforment les saveurs en poésie et les épices en dialogue entre les cultures.

Bouchra Lazaar, virtuose de la gastronomie et haute pâtisserie marocaine, érige chaque plat en une œuvre d’art, où tradition et modernité s’entrelacent avec finesse. Derrière chaque mets qu’elle conçoit, chaque douceur qu’elle façonne, se cache une histoire, un héritage séculaire qu’elle magnifie avec audace.

Dans un monde où la cuisine est un langage universel, elle offre au Maroc un rayonnement subtil et raffiné, où chaque bouchée devient une ambassade de notre identité culinaire.

D’autres encore repoussent les limites de secteurs traditionnellement masculins. Ilhame Guechati, pionnière dans l’aviation, fait voler bien plus que des avions.

Avec son projet Elektropostal, elle allie innovation aéronautique et rayonnement marocain, réinventant les voies du transport et du développement technologique.

À travers son parcours, elle démontre que l’audace et l’expertise des Marocaines ne connaissent pas d’altitude limite, ouvrant la voie à de nouvelles perspectives pour le Maroc dans le secteur aéronautique.

Toutes ces femmes, chacune dans son domaine, façonnent une autre forme de diplomatie. Une diplomatie qui ne passe ni par les discours officiels ni par les grandes conférences internationales, mais par l’influence douce, celle qui s’exerce dans la durée, à travers des actes et des engagements concrets.

Leur impact est indéniable. Pourtant, leur contribution reste trop souvent méconnue, reléguée aux marges du récit national. Le Maroc gagnerait à reconnaître pleinement cette force et à lui offrir une place à part entière dans sa stratégie de rayonnement international.

Car si ces femmes agissent aujourd’hui par passion, par conviction, par attachement à leurs racines, imaginez ce qu’elles pourraient accomplir avec un véritable accompagnement, des réseaux dédiés, des initiatives structurées pour capitaliser sur leur dynamisme et amplifier leur impact.

Elles sont des dizaines, des centaines, des milliers à travers le monde. Ce texte n’en évoque que quelques-unes, mais la réalité est bien plus vaste. 

Partout, dans la recherche, la finance, l’art, la technologie, la politique, des Marocaines d’exception dessinent une mosaïque d’influences.

Leur engagement collectif n’a rien d’anecdotique : il est un levier stratégique qui, s’il était pleinement intégré dans la vision du Maroc de demain, pourrait accélérer bien des transformations.

Il ne suffit pas d’observer cette dynamique, il faut la comprendre, la structurer et lui donner l’espace qu’elle mérite.

Car dans un monde où l’influence ne se décrète plus uniquement depuis les capitales politiques, mais se construit dans l’agilité des réseaux, dans la mobilité des talents et dans la résonance des récits, ces femmes sont bien plus que des ambassadrices.

Elles sont des architectes d’un Maroc en perpétuelle expansion, un Maroc qui se conjugue au futur, porté par celles qui, chaque jour, tissent un lien indéfectible entre ici et ailleurs.

Comment le Maroc peut-il institutionnaliser et amplifier cette force féminine pour en faire un pilier stratégique de son influence mondiale ?

Par Abdelkhalek Hassini  
Enseignant-formateur en France, chroniqueur, conférencier, spécialiste en migration et développement et acteur associatif