L’Education nationale est certainement l’un des portefeuilles ministériels qu’aucun politique ne se dispute à la veille de la formation d’un gouvernement. C’est un ministère hautement stratégique, mais tout aussi problématique.
Et ce n’est pas Chakib Benmoussa qui dira le contraire. Dès sa nomination, il jugeait d’un préjugé favorable, puisqu’il a présidé la Commission spéciale pour le modèle de développement (CSMD), laquelle a fait une radioscopie profonde du système éducatif, passant au peigne fin ses failles et faiblesses. Il connaît donc bien le secteur.
L’une de ses premières démarches a été d’ouvrir le dialogue social avec les syndicats et les représentants des enseignants contractuels, histoire de pacifier les centrales syndicales rebelles, mais surtout de montrer sa disponibilité à discuter, écouter, négocier et prendre en considération les intérêts de toutes les parties prenantes.
Mais cela ne semble pas suffire face à la complexité des dossiers qu’il a à gérer. Sa première initiative courageuse a été de réformer le concours d’accès aux Académies régionales d’éducation et de formation (AREF), qui fixe l'âge maximum d'accès à la profession enseignante à 30 ans.
Une réforme qui a suscité une véritable levée de boucliers et rencontré une vive opposition au sein des différentes centrales syndicales.
A peine les tensions apaisées, voilà que Benmoussa est confronté actuellement à un autre front social : la grève des enseignants contractuels.
Ils remettent sur la table une vieille revendication : leur intégration pure et simple dans la fonction publique. Tout en restant sourds à toute autre alternative. Cette radicalité annihile ainsi toute possibilité de trouver un compromis et place le ministre de l’Education nationale en bien mauvaise posture.
Si, devant cette impasse, il se dit néanmoins prêt à poursuivre le dialogue social, la partie adverse par contre, par la voix de la Coordination nationale des enseignants-cadres des Aref, privilégie actuellement la politique de la chaise vide.
Les enseignants contractuels choisissent de battre régulièrement le pavé que de s’asseoir autour de la table des négociations. Avec une conception somme toute assez rigide de la recherche de compromis : aucune concession possible; c’est la fonction publique ou rien.
C’est pourquoi le porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, est monté au créneau pour affirmer que «la grève et les décisions de militantisme et d'escalade doivent intervenir lorsque la porte du dialogue est fermée (...) Mais le dialogue se poursuit avec les syndicats et il n'est pas encore clos».
Forcément, tout cela est embêtant pour Benmoussa qui, au lieu de mettre ses compétences techniques et son expertise au service d’un meilleur système éducatif, doit maintenant plutôt gérer une crise sociale majeure, héritée du précédent gouvernement. Mais dont les seules et vraies victimes sont les élèves, contraints à faire… l’école buissonnière.
«L'observation d'un débrayage de 14 jours est injustifiée, de même qu'il est insensé que les élèves ne suivent pas leurs cours», peste, à ce titre, Baitas.
F. Ouriaghli