Comme à l’accoutumée, Ramadan est considéré comme étant la haute saison et la période la plus bénéfique pour les chaînes de télévision du Royaume. Tout au long de ce mois sacré, les téléspectateurs sont au rendez-vous avec une panoplie de nouvelles productions qui souvent regorgent de stéréotypes.
A cet égard, l’Union de la presse francophone a organisé, vendredi 7 avril 2023 à Casablanca, une conférence-débat sous le thème : «L’image de la femme dans la fiction et la publicité : le vrai du faux». Lors de cette rencontre, les différentes intervenantes ont mis l’accent sur l’évolution de la place accordée aux femmes à la télévision marocaine.
S’exprimant à cette occasion, la sociologue, Soumaya Naamane Guessous, a pointé du doigt un certain décalage entre la réalité et ce qui est représenté à la télévision. «La société marocaine est en pleine mutation, et une société comme la nôtre qui évolue très rapidement, conduit à un déphasage qu’on remarque très souvent sur nos chaînes de télévision. Ce déphasage est, entre autres, lié à l’existence de lignes rouges et de sujets tabous qu’on ne peut pas traiter. Certes, l’image de la femme à la télévision a beaucoup évolué au cours de ces dernières années mais malheureusement, les contenus audiovisuels véhiculent toujours plein de stéréotypes».
Intervenant lors de cette conférence-débat, Samia Akariou, comédienne, scénariste et réalisatrice, a tout d’abord mis la lumière sur l’évolution de la représentation des femmes dans la fiction. «Aujourd’hui au Maroc, l’évolution de l’image de la femme dans l’espace audiovisuel est à l’image de l’évolution de cette dernière dans la société mais beaucoup de choses restent à faire. Il y a 20 ans, les thématiques n’étaient pas les mêmes, le rôle qu’incarnait la femme dans fiction a également beaucoup évolué».
Par ailleurs, Samia Akariou a souligné que la télévision doit s’inspirer de la réalité sans pour autant être le miroir de cette réalité. «Certes, les programmes audiovisuels doivent transcrire la réalité mais ils doivent aussi apporter un nouveau regard. La fiction doit mettre en avant la réalité mais il doit aussi y avoir une part de rêve, question de pousser les gens à améliorer et à embellir cette réalité. Notre rôle n'est pas seulement de divertir mais également de raconter la réalité autrement pour donner aux téléspectateurs une morale et une leçon de vie».
La scénariste a également révélé que dans le domaine de la production audiovisuelle, la thématique de la femme a tendance à devenir un effet de mode puisque ce genre de sujets fonctionne très bien, ce qu’elle considère comme un phénomène inquiétant.
Pour sa part, Latifa Ourtassi Tayah, directrice du Département études et développement de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA), a mis en exergue l’évolution du cadre légal régissant l’image des femmes dans les médias, notant que malgré la progression enregistrée, les producteurs de contenu ont du mal à appliquer certaines lois et de les recevoir de manière correcte.
«Depuis l’adoption de la Constitution de 2011, le volet législatif a connu un changement très important. La question de l’égalité homme-femme a été bien ancrée dans ce nouveau texte, notamment à travers l’article 19. Du coup, la loi qui régit la mission du régulateur mais aussi qui donne aux opérateurs des obligations, a fortement évolué. En revanche, la part des femmes, particulièrement dans les programmes d’information, demeure très marginale. La HACA mesure le temps de parole consacré aux personnalités publiques dans cette catégorie d’émissions, que ce soit les journaux télévisés ou les magazines, et la gente féminine ne dépasse jamais les 20%», relève-t-elle.
Par ailleurs, Latifa Ourtassi Tayah a indiqué que la majorité des plaintes collectives reçues par la HACA, concernent soit le foot, soit les femmes, ce qui, selon elle, prouve une certaine conscience citoyenne. Elle a par ailleurs annoncé qu’en ce qui concerne l’identification des stéréotypes, un guide sera mis en ligne de façon imminente avec des livrets spécifiques sur la fiction, la publicité, les programmes d’information ainsi que sur des sujets sensibles, notamment la question migratoire.