Qu'elles soient liées à la pratique de certaines activités potentiellement addictives ou à l'usage de substances psychoactives ou psychotropes, les conduites addictives se répandent à travers le monde. Et le Maroc n’est pas épargné.
À cet égard, le Conseil économique social et environnemental (CESE) a organisé ce mercredi 20 avril 2022 en visioconférence, un atelier de restitution en vue de présenter son avis intitulé : «Faire face aux conduites addictives : état des lieux & recommandations».
Dans cet avis, réalisé dans le cadre d’une auto-saisine, le CESE relève qu’en dépit de l’existence d’une stratégie nationale de lutte contre les addictions et l’avance du Royaume par rapport à la région MENA, la réponse collective demeure impuissante, et les politiques publiques limitées et insuffisantes, dominées par une approche répressive, fondée sur un cadre légal désuet et non protecteur.
«Le Maroc fait partie des premiers pays de la région ayant adopté des politiques de santé publique au niveau de la prévention de l’addiction. Et pour sa prise en charge, plusieurs plans nationaux et plusieurs mesures et procédures ont été mises en place dans ce sens. Néanmoins, selon les parties prenantes, on note un grand manque en termes d’infrastructures de prise en charge et au niveau de la disponibilité des produits médicaux», a souligné Ahmed Réda Chami, président du CESE, dans son allocution d’ouverture.
Dans le détail, le Conseil pointe dans ledit avis une insuffisance des moyens humains et matériels, une absence de reconnaissance du diplôme d’addictologie, une absence de structures de postcure et/ou des communautés thérapeutiques, un manque de reconnaissance et de régulation du statut du psychologue, en plus d’une absence de reconnaissance claire des addictions comme maladie au niveau du cadre légal de la couverture médicale de base.
Le CESE constate par ailleurs que le secteur des biens et services à haut potentiel addictif a pris un poids structurel et préoccupant dans l’économie nationale et les finances publiques.
Dans ce sens, le CESE a formulé plusieurs recommandations afin de mieux identifier les conduites addictives et pour assurer une meilleure prévention et une prise en charge accessible et efficace contre les conduites addictives dans notre pays.
• L’adoption d’une définition nationale claire des troubles addictifs en conformité avec la Classification internationale des maladies (CIM-11) de l’OMS.
• La révision et l’actualisation du cadre légal de la couverture médicale.
• L’homogénéisation des approches des organismes de prévoyance et d’assurance sociales.
• La décriminalisation de la consommation de drogues et l’application affective et systématique des dispositions ouvrant droit à l’injonction thérapeutique.
• La définition d’une stratégie de santé publique basée sur la reconnaissance des conduites addictives en tant que maladie aux effets sanitaires et sociaux délétères.
• Le renforcement des ressources et la coordination en matière de prévention et de prise en charge des conduites addictives.
• La préservation de l’intégrité psychique, de l’autonomie et de la sécurité sanitaires des citoyens et leur permettre de disposer pleinement de leur capital santé et de leurs facultés productives et créatives en érigeant la lutte contre les addictions en composante et en objectif à part entière du modèle national de développement.
Le CESE a également élaboré une batterie de recommandations spécifiques. En milieu professionnel, le Conseil préconise la définition avec les professionnels de santé et les partenaires sociaux d’un plan national de prévention et d’action contre les conduites addictives en milieu professionnel.
Au niveau des établissements pénitentiaires, le CESE appelle à la généralisation de l’accès aux traitements par substitution aux opiacés dans l’ensemble des pénitenciers et garantir la possibilité d’accès aux soins à toute personne dépendante détenue qui exprime le souhait.
Parmi les autres recommandations spécifiques du CESE figure également la définition d’un programme pluriannuel multi-objectifs d’aide et de protection des femmes contre les addictions.
M.A.O