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Acte de mariage dans les hôtels du Maroc : Ouahbi lève le voile sur une hypocrisie sociale

Acte de mariage dans les hôtels du Maroc : Ouahbi lève le voile sur une hypocrisie sociale

 On peut dire ce que l’on veut, la sortie du ministre marocain de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a le mérite d’être audacieuse et ferme. Le 21 mai 2024, à la Chambre des conseillers, pour répondre aux questions des parlementaires, le ministre n’y est pas allé par quatre chemins.


Sûr de son propos, droit dans ses bottes, il assène que demander à des clients leur acte de mariage dans les hôtels au Maroc «C’est contraire à la loi». Il précise que «ceux qui demandent ce document enfreignent la loi. Demander un acte de mariage ou tout autre document sans mandat légal est une violation de la vie privée». Avant d’ajouter que «Ceux qui demandent ces documents doivent être poursuivis en justice». 

Autrement dit, cette règle qui est de fait un abus, puisque c’est le ministre de la Justice lui-même qui l’affirme avec conviction, lui, le garant de l’application des lois marocaines, sévit toujours au Maroc.

Et de très nombreuses personnes en ont fait les frais soit en se faisant jeter des hôtels, soit en faisant face à des problèmes avec la police, comme on a pu le vérifier à plusieurs reprises, soit en étant obligé de prendre deux chambres séparées, de payer deux fois pour la même finalité, c’est-à-dire trouver un subterfuge pour passer le temps ensemble dans la même chambre incognito, se cachant comme des voleurs. Nous savons tous comment ça se passe. Tu débarques dans un hôtel avec une femme et tu es obligé de montrer patte blanche. Soit l’acte de mariage, soit avoir un piston ou une connaissance qui ferme les yeux, soit tu paies deux chambres et tu peux après faire ce que tu veux. 

Tout le monde sait que le couple est là, à l’hôtel, pour passer des moments dans l’intimité. Certains y vont avec des amies femmes ou des amis hommes pour se reposer, pour parler, pour se confier, pour fuir des tracas de famille, pour respirer, pour se ressourcer. D’autres y vont pour vivre leur sexualité. Et certains établissements hôteliers jouent sur la peur des uns et des autres et obligent leurs clients à débourser plus pour pouvoir jouir de quelque week-end intime.

Comment peut-on appeler un tel comportement ? Un abus de la part des hôteliers qui exigent l’acte de mariage ou les deux chambres séparées de leurs clients. Si la loi est claire, il faut l’appliquer à la lettre. Et en cela Abdellatif Ouahbi assume son statut de ministre de tutelle pour rendre justice à tous les Marocains, qui, hôtel ou pas, se débrouillent pour trouver une chambre intime et faire l’amour à leur partenaire. 

Ce n’est un secret pour personne, les Marocains et les Marocaines n’attendent l’autorisation de personne pour jouir de leurs corps. C’est un mensonge d’affirmer le contraire et c’est une hypocrisie crade de vouloir jeter un voile sur les pratiques sexuelles des Marocains. Et ce n’est pas en acceptant des couples dans des hôtels que la prostitution va augmenter ou que le sida va faire un pic historique.

La prostitution a aujourd’hui pignon sur rue. On la trouve étalée sur les réseaux sociaux et les Marocains s’expriment librement sur leurs tendances et leurs désirs sexuels. Quant aux maladies sexuellement transmissibles, elles sont bien là, hôtel ou pas. Ce qui fait que tout ce débat occasionné par les propos de Abdellatif Ouahbi relève de la démagogie politicienne. Et c’est toujours le citoyen qui trinque.

Exemple : est-ce que les touristes sont obligés de montrer leur acte de mariage avant d’aller dans leur chambre dans un hôtel à Marrakech ou ailleurs ? Non. Touriste russe ou libanais, c’est pareil. Pourtant, le Marocain doit, lui, soudoyer quelqu’un, payer double ou aller se marier avant de passer une nuit avec une copine, pour une simple histoire de sexe. L’absurdité atteint ici un tel degré d’aberration que c’est inqualifiable d’être aussi enclin à la démagogie et à la manipulation au nom de quelques prêches faussement pieux et pseudos-moralisateurs. 

Prenons un autre exemple : dans cinq ans, le Maroc accueillera des matchs de la Coupe du monde de football 2030. Il y aura beaucoup de touristes et beaucoup de jeunes du monde entier.

On va exiger à de millions de personnes de se marier avant de venir voir un match Maroc/Allemagne et finir dans une chambre avec une copine ou un copain ? Sans oublier que de nombreuses voix montent au créneau et insistent sur le fait que les couples homosexuels et ils sont nombreux au Maroc, hommes ou femmes, passent par les mailles du filet sans montrer aucun papier avant d’aller faire l’amour. Un homme avec un homme dans la même chambre ? Ça passe. Une femme avec une femme dans la même chambre ? Ça passe. Et les autres ? Non. Malin qui saura nous expliquer cette équation à zéro inconnu.

Abdelhak Najib
Écrivain-journaliste

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