Sur 28.597 personnes interpellées par la police pour pratique de la mendicité en 2021, seules 10.899 personnes ont été poursuivies par le parquet, indique le Conseil économique, social et environnemental dans un avis portant sur ce fléau social tel qu'observé dans les rues et espaces publics au Maroc.
Malgré l’ampleur de ce phénomène dans notre société, le CESE précise que l’absence flagrante d’études et de données actualisées constitue une contrainte majeure dans l’élaboration d’une action publique en capacité de lutter efficacement contre la mendicité.
En effet, la dernière enquête nationale traitant de ce sujet date de 2007 et elle estime le nombre de personnes se livrant à la mendicité à environ 200.000.
La mendicité représente un phénomène social d’une grande complexité, découlant de l'exposition des personnes à une multiplicité de facteurs de risque, liés aux parcours individuels, et plus largement aux environnements socio-économiques ou culturels.
Au Maroc, cette pratique est punie par la loi. Ainsi, l’article 326 du Code pénal dispose «Est puni de l'emprisonnement d'un à six mois, quiconque ayant des moyens de subsistance ou étant en mesure de se les procurer par le travail ou de toute autre manière licite, se livre habituellement à la mendicité en quelque lieu que ce soit».
Toutefois, selon la Direction générale de la sûreté nationale, “malgré le nombre relativement élevé d’interpellations opérées annuellement par les services de police parmi les mendiants, la garde à vue n’est appliquée que lorsque la pratique de la mendicité est accompagnée de l’usage de la violence, de port d’arme blanche, d’utilisation de la drogue, où dans d’autres cas graves”.
En vue de faire face à la mendicité, le CESE propose une série de mesures déclinées en quatre axes intégrés. Le premier concerne "l’éradication complète de l’implication des enfants dans la mendicité”. Et ce, en renforçant le soutien aux unités de protection de l'enfance (UPE) en termes de structuration, d’organisation, de moyens humains et matériels, ainsi que par le renforcement des mesures répressives à l'égard des exploiteurs et trafiquants d'enfants, qu'ils soient parents ou étrangers à l'enfant.
En outre, le deuxième axe vise à "assurer la protection des personnes vulnérables contre l’exploitation à des fins mendicité". Le modus operandi consiste à réprimer sévèrement les actes délictuels et criminels dissimulés sous couvert de mendicité, conformément au Code pénal. Surtout à l’égard des exploitants de femmes, de personnes âgées et de personnes en situation de handicap. Aussi, renforcer les politiques de protection et de soutien aux personnes en situation de handicap et âgées, ainsi que les mesures d’accompagnement et d’intégration socio-économique des populations migrantes.
En ce qui concerne le troisième axe, ce dernier concerne "la réhabilitation et réinsertion des personnes en situation de mendicité", à travers la révision du dispositif juridique actuel. Et ce, notamment en mettant fin à la pénalisation de la mendicité, face à la difficulté de déterminer la capacité de la personne à subvenir à ses besoins et étant donné que les infractions criminelles, qu'elles soient individuelles ou collectives, associées à cette activité, sont déjà prises en compte dans de nombreuses dispositions du Code pénal.
Simultanément, le Conseil propose des alternatives viables à la mendicité, à travers le renforcement des politiques d’assistance sociale, le développement des activités génératrices de revenus et l’amélioration de la prise en charge des personnes atteintes de troubles psychiatriques.
In fine, le quatrième axe a trait à "la prévention de la mendicité", en renforçant la résilience socioéconomique des ménages, qui passe inéluctablement par la lutte contre la pauvreté et les inégalités sociales et spatiales et l’amélioration de l’accès aux soins, à l’éducation, à la formation et à l’emploi.