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Migrants : Brimés en Algérie, esclaves en Libye

Migrants : Brimés en Algérie, esclaves en Libye

L’Afrique est rattrapée par son histoire. Cette histoire douloureuse faite d’humiliation, de chaînes, de fouets, de brimades…, que l’on s’évertuait, jusqu’à un passé récent, à enfouir dans la mémoire collective. Vainement, il faut le dire. Car il a fallu quelques images révoltantes pour extirper de nos souvenirs des mots et expressions que l’on croyait bannis à jamais dans le langage du XXIème  siècle : esclavage, nègre, traite négrière…

En effet, les images diffusées récemment par la chaîne américaine CNN ont rappelé au monde entier, et de façon assez cruelle, que l’esclavage existe encore en 2017. Là-bas, en Libye. Dans ce pays miné par une profonde crise politique, économique et sécuritaire, les migrants sont vendus aux enchères, comme du vulgaire bétail.

L’esclavage refait ainsi surface, dans sa forme la plus abjecte. De quoi faire remuer dans leur tombe Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire, pour ne citer qu’eux. Dès lors, dans plusieurs pays, l’opinion publique s’indigne face à ces images dégradantes, et bat le pavé pour manifester sa colère. La communauté internationale s’offusque. Au moment où les dirigeants africains brillent par leur silence coupable.

Que penser de cette émotion collective qui semble subitement envahir tout le monde ? Au risque de heurter certains, est-ce vraiment un ressenti sincère ? Ou est-ce plutôt cette hypocrisie sociale collective qui se manifeste subitement lorsque nous renvoie à la figure notre indifférence face aux cruautés qui se jouent dans ce monde d’aujourd’hui ?

Ces questions méritent d’être posées quand on sait que les exactions commises en Libye datent de bien longtemps. L’Office international des migrations avait, en effet, tiré la sonnette d’alarme depuis avril 2017 dans un rapport où il dénonçait l’existence de marchés aux esclaves en Libye. Personne n’avait réagi. Il a fallu donc que des images se substituent aux mots pour que certaines intelligences prennent conscience des choses horribles qui se déroulent sur la scène libyenne. 

C’est cette même passivité que l’on observe malheureusement face aux exactions dont sont victimes les migrants en Algérie depuis plusieurs mois. Pas plus tard que vendredi dernier, des organisations des droits de l'Homme et des syndicats algériens dénonçaient le scandale humanitaire impliquant les chemins de fer algériens qui sont utilisés par les pouvoirs publics pour faire la chasse aux migrants. Des dizaines de migrants, en situation régulière ou non, dont plusieurs mineurs, ont été ainsi parqués dans des wagons, puis transportés d’Oran à Tlemcen. «Ces migrants sont devenus persona non grata aux yeux des autorités oranaises», s’indignent-ils, qualifiant cet acte de «grave dérive raciste». 

Mais, encore une fois, faute d’images choquantes, ces ONG et bien d’autres, qui ont déjà saisi l’ONU, sont pour l’instant inaudibles. Jusqu’à quand ?! ■

D. W.
 

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