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Trisomie 21: «Actuellement, la prise en charge de ces enfants n’est pas optimale»

Trisomie 21: «Actuellement, la prise en charge de ces enfants n’est pas optimale»

La Journée mondiale de la trisomie 21 est célébrée le 21 mars. Au Maroc, on compte plus de 60.000 porteurs de la pathologie.

A la naissance, dans 40% des cas, des anomalies cardiaques sont décelées.

Entretien avec le Docteur Hassan Afilal, pédiatre réanimateur et président de la Société marocaine de pédiatrie.

 

Propos recueillis par Ibtissam Z.

Finances News Hebdo : Parleznous de la pathologie de la trisomie 21. Quelle en est la cause et comment peut-on savoir si un bébé est trisomique ?

Dr Hassan Afilal : La trisomie 21 est la maladie génétique la plus fréquente. Elle est due à un accident chromosomique chez le fœtus lors de la grossesse. L’enfant va avoir trois chromosomes 21 au lieu de deux, et cela entraîne des anomalies chez le nouveau-né, qui peuvent être découvertes par le gynéco-obstétricien lors de ses explorations pendant la grossesse. Ce n’est pas dû à un héritage génétique, et donc ça ne se reproduit généralement pas dans la fratrie ou dans la famille. À la naissance, l’enfant présente un faciès spécifique, c’est-à-dire un visage particulier, qui permet de le reconnaître par une petite taille, et des anomalies cardiaques sont visibles à l’échographie dans 40% des cas. Nous notons aussi une prédisposition à certaines maladies. Par la suite, l’enfant va présenter un retard psychomoteur plus ou moins sévère, qui nécessitera une prise en charge assez soutenue.

 

F.N.H. : On compte au Maroc plus de 60.000 trisomiques. Cependant, on déplore le manque ou l’absence de prise en charge qui doit être pourtant multidisciplinaire. Quelle appréciation faites-vous ?

Dr H. A. : En effet, la prise en charge de ces enfants n’est pas optimale. Actuellement, elle nécessite la collaboration de plusieurs spécialistes pour les aider à survivre dans un confort relatif. Les structures spécialisées sont très rares, ce qui laisse les parents dans un désarroi regrettable. Le réanimateur néonatal, le cardiologue et surtout le chirurgien cardiaque vont être les premiers à intervenir pour permettre la survie durant la première période de vie du nouveau-né, si l’enfant est très malade à la naissance ou s’il présente une malformation cardiaque. Le passage en réanimation, puis la chirurgie cardiaque sont obligatoires pour certains enfants trisomiques.

 

F.N.H. : Comment peut-on éviter cette pathologie durant la grossesse ? 

Dr H. A. : Il y a quelques précautions à prendre car nous rencontrons ces accidents chromosomiques surtout chez les mamans de moins de 18 ans ou de plus de 38 ans. Certaines analyses, l’échographie et l’amniocentèse (prélèvement de liquide amniotique pour analyse) sont des moyens de diagnostic pour une découverte précoce in utero. Par la suite, au moment de la naissance, nous faisons une exploration cardiaque à la recherche de malformations après avoir fait un caryotype qui pose le diagnostic.

 

F.N.H. : La Journée mondiale de la trisomie 21 est commémorée le 21 mars. Le but étant de sensibiliser aux droits à l'inclusion et au bien-être des personnes trisomiques. Selon vous, y a-t-il un véritable impact sur la population ? 

Dr H. A. : Il est important que ces journées sensibilisent la population et mettent en lumière ces enfants qui ont besoin d’une vie sociale équivalente aux autres et d’une approche spécifique pour faciliter leur insertion parmi la population générale. Il est vrai que les trisomiques ne se ressemblent pas. Il y a une grande variabilité et chacun se développera selon son bagage génétique, selon les efforts de l’entourage, que ce soit les parents ou les institutions qui doivent croire en ces enfants. De ce fait, ces enfants doivent être considérés normalement par la société, qui a un devoir non seulement de respect, mais aussi de reconnaissance et d’assistance à ces enfants. En parler permet une meilleure connaissance de leurs spécificités et, à partir de là, faciliter leur inclusion.

 

F.N.H. : Quelles sont actuellement les avancées scientifiques et médicales sur la trisomie 21, qui permettent une meilleure prise en charge thérapeutique ?  

Dr H. A. : Les avancées de la chirurgie cardiaque permettent chez le trisomique un traitement optimal du problème cardiaque, qui est relativement fréquent, pour une autonomie fonctionnelle proche de la normale. La prise en charge psychomotrice et psychologique peut sensiblement augmenter leurs performances et leur adaptation à l’environnement social. En effet, avec l’aide des parents, les équipes médicales et paramédicales tentent d’amener à une certaine autonomie à travers des activités socioculturelles parascolaires, qui permettent des interactions avec les autres enfants comme les jeux ou encore le théâtre. L’éducation des parents est extrêmement importante, car elle leur permet un meilleur accompagnement. Ils connaissent mieux le devenir et le potentiel de leur enfant. Il faut par ailleurs souligner que l’enfant trisomique est particulièrement affectueux avec son entourage. Cela fait partie de son caractère et entraîne une réciprocité de l’entourage, que ce soit les parents proches ou les personnes contact avec lesquelles il entretient des relations chaleureuses. Le soutien des parents et l’explication de cette maladie sont très importants. Cela permet aux familles de mieux vivre cette période où elles font face à une pathologie qu’elles ne connaissent pas. La souffrance qui en découle nécessite une prise en charge adaptée par des professionnels qui les déculpabilisent, les apaisent et leur donnent les moyens d’aider leurs enfants dans la sérénité. Une des réalités de la culture marocaine liée à notre religion, nous aide à mieux affronter notre destin et à accepter avec plus de force ce que nous subissons. En tout cas, le résultat de toutes ces avancées scientifiques atteste que l’espérance de vie des enfants trisomiques est de plus en plus longue et dépasse actuellement l’âge de 50 ans. Il faut prendre en compte que des progrès médicaux énormes sont actuellement en développement pour une meilleure prise en charge, surtout sur le plan médical.

 

F.N.H. : Un enfant trisomique a les capacités de se surpasser à condition de bien être encadré. En tant que praticien, quel rôle pouvez-vous jouer pour orienter les parents dans l’encadrement de leur enfant ?  

Dr H. A. : Il y a une grande variabilité chez les enfants trisomiques et plusieurs niveaux de développement psychomoteur. Les prises en charge doivent varier afin de répondre aux besoins de chacun d’entre eux. Le secret réside dans une attention particulière qui permettra d’atteindre la capacité maximale possible, et surtout de vivre épanouis et heureux. 

 

 

 

 

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