Une trêve fragile, rompue d’un revers… de missile. En relançant son offensive sur Gaza, Israël reprend sa stratégie d’effacement méthodique des Palestiniens, sous le regard impuissant, voire complaisant de la communauté internationale.
Le 18 mars 2025, l’armée israélienne, dans une démonstration de force désormais tristement banale, a rompu unilatéralement le cessez-le-feu signé avec le Hamas. Objectif affiché : contraindre le mouvement islamiste à libérer les derniers otages encore détenus dans la bande de Gaza.
Objectif réel : poursuivre une stratégie d’annihilation méthodique d’un territoire déjà ravagé, au prix de milliers de vies civiles.
Entre les deux, il y a le brouillard de la guerre… et l’épais nuage du laxisme, voire de la complicité des Occidentaux.
Ainsi, en 72 heures, plus de 500 Palestiniens ont été tués, dont 190 enfants. Le chiffre est monté à 520 morts selon la Défense civile de Gaza, dans un territoire désormais privé d’eau potable, d’électricité et d’aide humanitaire. Au total, 50.021 personnes ont été tuées depuis le début de la guerre dans le territoire palestinien.
Tsahal déploie une mécanique létale, huilée, assumée... Et soutenue, avec un zèle presque insolent, par la Maison-Blanche.
Donald Trump a réaffirmé son «plein soutien» à Israël, accusant le Hamas de «jouer un jeu médiatique avec des vies humaines».
Sauf que pendant ce temps, ce sont les bombes israéliennes et non les micros du Hamas qui pulvérisent les maisons et les hôpitaux.
Face à ce déluge de feu, la communauté internationale a sorti… ses mots. Des mots lourds, parfois choisis avec soin, mais royalement ignorés par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.
L’Union européenne a parlé d’«inacceptables frappes». Emmanuel Macron a jugé l'escalade «dramatique», avant de rappeler l’urgence d’un «cessez-le-feu durable» et d’un «Etat palestinien».
Keir Starmer, Premier ministre britannique, s’est dit «profondément préoccupé». L’Allemagne a dénoncé un «retour en arrière tragique».
Le président israélien Herzog, sans nommer Netanyahu, s’est même dit «troublé».
De son côté, le Maroc, par la voix du ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, a condamné «vigoureusement et sans équivoque la rupture du cessez-le-feu et la reprise des agressions contre les civils à Gaza».
Il a pointé «des agressions inacceptables, condamnables, qui entravent la consolidation de la paix», et rappelé que l’accord de cessez-le-feu ne devait pas être instrumentalisé ni faire l’objet de surenchères.
Une position qui résonne d’autant plus fort que le Roi Mohammed VI préside le Comité Al-Qods et que le Maroc n’a jamais varié dans son attachement à une paix juste fondée sur la solution à deux Etats.
Mais pendant que la communauté internationale s’indigne, impuissante, les tanks, eux, avancent. Israël a non seulement repris ses frappes, mais a aussi lancé une opération terrestre au sud de Gaza, coupant le territoire en deux pour ériger une nouvelle zone tampon qui réduit encore davantage l’espace vital d’une population déjà meurtrie.
Rafah, ville frontalière avec l’Egypte où s’étaient réfugiés des centaines de milliers de Gazaouis déplacés, est à nouveau ciblée ce dimanche. L’armée israélienne y a lancé une offensive présentée comme une frappe contre des «organisations terroristes».
Et comme si Gaza ne suffisait pas, le feu s’étend : Israël a lancé des frappes au Liban contre le Hezbollah, tuant huit personnes, après des tirs de roquettes interceptés. Les Houthis du Yémen ont relancé leurs missiles vers Israël, dont l’un a été intercepté dimanche. Bref, le Moyen-Orient devient une véritable poudrière.
Les armes, rien que les armes
La trêve qui s’était mise en place le 19 janvier dernier avait permis quelques avancées, avec notamment le retour de 33 otages et la libération de près de 1.800 prisonniers palestiniens. Elle offrait ainsi une lueur d’espoir.
Le Hamas s’était dit prêt à avancer vers un cessez-le-feu permanent. Mais Israël préfère faire tonner les armes, avec la volonté de démilitariser Gaza et de mettre fin au pouvoir du Hamas.
Autrement dit : soumission totale ou bombardement illimité.
En réalité, ce qui se joue à Gaza dépasse de loin le duel Israël–Hamas. C’est une question de droit international et d’humanité.
Quand un Etat, même démocratique, choisit de bombarder à l’aveugle un territoire au nom de la sécurité, il sape les fondements mêmes de la justice qu’il prétend défendre.
Quand une puissance comme les Etats-Unis couvre, finance et justifie ces frappes, elle se fait complice d’un massacre dont les répliques géopolitiques dureront dans le temps et annihileront toute velléité de paix dans une région déjà instable.
Et quand l’Europe reste laxiste et ambiguë, elle s’installe confortablement dans un rôle d’accessoire géopolitique.
Pendant ce temps, presque dans l’indifférence, les Palestiniens crèvent. Il n’y a pas d’autres mots.
F. Ouriaghli