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Code de procédure civile : «Cette loi doit être en harmonie avec l'ordre constitutionnel et les principes universels de la justice»

Code de procédure civile : «Cette loi doit être en harmonie avec l'ordre constitutionnel et les principes universels de la justice»

Approuvé en août 2023 par le Conseil de gouvernement, le projet de loi sur la procédure civile continue de faire parler de lui. Ainsi, une commission ad hoc s’est réunie les 2 et 3 avril afin d’étudier en profondeur le nouveau code. Entretien avec Me Omar Mahmoud Bendjelloun, avocat aux Barreaux de Rabat et Marseille et docteur en droit international.

 

Propos recueillis par M. Boukhari

Finances News Hebdo : Actuellement, de nombreuses réformes juridiques sont discutées au Parlement dont une principalement, portant sur le Code de procédure civile. Selon vous, y a-t-il des aspects particuliers de la procédure civile actuelle qui doivent être priorisés dans le cadre de cette initiative ?

Omar Mahmoud Bendjelloun : Cette loi doit être en harmonie avec l'ordre constitutionnel et les principes universels de la justice, du procès équitable et de la défense, non de tenter de réduire et de contrôler les voies de la justice de manière autoritariste. Cette loi fondatrice du fonctionnement judiciaire doit prévoir l'exclusivité de l'avocat dans toutes les procédure sans exception. Aussi, le projet prévoit une hérésie constitutionnelle qui est d'imposer un seuil financier de dizaines de milliers de dirhams pour accéder aux phases d'appel et de cassation, ce qui est une atteinte notoire et scandaleuse au principe universel de l'accès à la justice. Ce parfum autoritariste antinomique avec la justice et l'immunité de la défense est de permettre aux juges d'évaluer la bonne ou la mauvaise foi des recours à la justice et imposer des amendes aux avocats, ce qui est extrêmement dangereux pour les citoyens et la justice dans son ensemble. Enfin, certains détails sur les exécutions et les notifications doivent être revus, en ayant à l'esprit l'élévation de la justice et les citoyens au lieu de dédouaner l'administration judiciaire de ses responsabilités aux dépens des droits à la défense et au procès équitable.

 

F.N.H. : Le projet de Code de procédure civile englobe plusieurs dispositions, notamment la suppression de l'institution du curateur, qui a longtemps fait l'objet de critiques de la part des acteurs de la justice. Que pouvez-vous nous en dire ?

O. M. B. : Oui, la procédure du curateur se veut un principe jusqu'au-boutiste du principe du contradictoire, soit à ce que les parties au litige soient absolument informées avant de dire droit. Toutefois, certains droits demeurent suspendus à cause de la désinformation ou du manque de données ou de la mauvaise foi de certaines parties au contentieux, rendant cette procédure du curateur avec l'enquête de police et la publication au journal légal une purification du déroulement du procès. Mais le résultat demeure le même après 3 mois, soit la non-comparution de la partie introuvable ou de mauvaise foi; donc il serait judicieux de revoir la procédure du curateur en ayant à l'esprit encore une fois le triomphe de l'idée de justice, non d'autorité.

 

F.N.H. : Comment les avocats et les parties impliquées dans des procédures civiles peuvent-ils être impliqués ou consultés dans ce processus de réforme ?

O. M. B. : La Constitution prévoit l'approche participative avec les hommes de l'art dans tous projets de loi qui passent par le Parlement. Les codes de procédures civiles et pénales ainsi que d'autres lois sont dirigés vers les instances représentatives de la défense et de la justice pour avis avant légifération, soit l'Association des barreaux du Maroc ou les conseils de l'Ordre des 17 barreaux des avocats. C'est une tradition confirmée par la Constitution qui, malheureusement, a été suspendue les deux dernières années vu la crise entre le gouvernement et les avocats. Après les dernières élections ordinales de décembre 2023, il y a eu une intention affichée de tourner la page entre l'exécutif, le judiciaire et la défense pour le bien de la justice et de l'Etat de droit.

 

F.N.H. : D’après vous, quel serait l’impact des éventuelles modifications de ce texte sur le déroulement des procédures civiles au Maroc ?

O. M. B. : S'il n'adopte pas l'exclusivité des avocats dans toutes les procédures sans exception, qu'il maintienne les seuils financiers dans les degrés de juridiction pour favoriser les lobbies de crédit et d'assurance, qu'il permette aux juges d'évaluer la bonne foi des justiciables et dresser des amendes dans ce sens contre la défense, c'est une loi autoritaire qui sera dangereuse pour la justice de notre pays, garante de sa paix civile. Ça serait en plus une justice pour les riches, un apartheid judiciaire qui porte atteinte aux principes constitutionnels et à l'idée même de justice sociale. 

 

 

 

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