Société Tout voir

«Produits sans fumée» : Encadrer…pour un vapotage plus sécurisé ?

«Produits sans fumée» : Encadrer…pour un vapotage plus sécurisé ?

Sachets de nicotine, cigarettes électroniques,... ces produits alternatifs au tabac classique, communément appelés «produits sans fumée» gagnent du terrain au Maroc. Face à leur essor et aux risques sanitaires qu’ils peuvent causer, le Royaume s’est doté de normes strictes, amorçant une régulation inédite. 

Experts, législateurs et médecins se sont réunis, jeudi 16 octobre, pour en débattre lors d’une nouvelle édition des conférences-débats organisée par La Vie Éco, sous le thème : «La normalisation des produits sans fumée : Quel enjeu pour la protection du consommateur et pour l’économie nationale».

Ce commerce des produits de tabac sans fumée a, en effet, longtemps échappé à tout encadrement légal. Mais ce vide juridique appartient désormais au passé. Car le ministère de l’Industrie et du Commerce, en collaboration avec l’Institut marocain de normalisation (Imanor), a récemment fixé des normes précises encadrant leur composition, leur teneur en nicotine et leur étiquetage. Une avancée saluée par les acteurs présents à la conférence, qui y voient un tournant pour la protection du consommateur et pour l’économie nationale.

Pour Ouadi Madih, président de la Fédération nationale des associations du consommateur, ces textes marquent un pas important dans l’encadrement de cette consommation, précisant que ces normes auront un caractère obligatoire à partir de février 2026. «Les fournisseurs devront se conformer aux normes, sous peine d’amendes dissuasives», a-t-il rappelé, soulignant l’importance de l’étiquetage, «véritable droit à l’information du consommateur». L’objectif étant de garantir transparence et sécurité dans un marché où proliféraient, jusqu’ici, des produits de composition incertaine.

Si la réglementation rassure, elle ne dissipe pas toutes les interrogations. Yasser Sefiani, professeur et chirurgien vasculaire, a mis en garde sur la réalité selon laquelle : «quel que soit le mode de consommation, le tabac reste un fléau». Il plaide cependant pour une approche pragmatique, celle d’encadrer pour mieux évaluer. «On ne peut étudier ni prévenir ce qu’on ne connaît pas. Les normes permettent enfin une analyse scientifique crédible des risques liés à ces produits».

Abondant dans le même sens, Moncef Drissi, médecin pharmacotoxicologue, addictologue, a insisté sur la nécessité de normes évolutives affirmant que «c’est difficile de fixer une dose quand la consommation dépend du comportement. Mais la normalisation permet d’écarter les produits dangereux et d’instaurer un contrôle permanent».

La dimension législative n’est pas en reste. Dr Fatima Gouaima Mazzi, ex-parlementaire et spécialiste en santé publique, a rappelé que les élus ont interpellé à plusieurs reprises le gouvernement sur ces produits «nouvelle génération», ce qui a conduit à des révisions de lois sur le tabac. L’amendement de la loi 46-02 sur le tabac vers la loi 66-20 pour introduire le tabac chauffé en est la preuve. Elle plaide par contre pour une vision de santé publique intégrée, où la prévention, la recherche et l’éducation se complètent. «Changer les comportements commence dès la petite enfance. La santé publique doit impliquer tout le monde : législateurs, universités, médias et société civile», a-t-elle martelé.

Vers une culture de la réduction des risques

Au-delà des normes techniques, le débat a touché à une question éthique : Faut-il encourager les produits alternatifs ? En réponse à cette interrogation, le professeur Sefiani affirme que la réponse ne peut être binaire. «Les politiques d’interdiction ont montré leurs limites. Partout dans le monde, le taux d’arrêt du tabac dépasse rarement 10%. Nous devons explorer les solutions de substitution pour réduire les risques, sans les nier».
Dans la même veine, le Dr Drissi soutient que «L’interdiction seule crée la résistance. Il faut comprendre les ressorts de l’addiction, notamment psychologiques».

Au sortir de ce débat, les panélistes et l’assistance ont convergé vers une seule et même conclusion : la normalisation n’est qu’un point de départ. Le Maroc devra investir dans la recherche scientifique, encore trop dispersée et peu orientée, pour mesurer les effets réels de ces produits sur la santé et adapter ses politiques. En attendant, la vigilance reste de mise. Comme le résume Ouadi Madih, «si l’on ne peut éradiquer le tabac, on peut au moins aider le consommateur à choisir le moins mortel».                                                                                               

Désy M.

Articles qui pourraient vous intéresser

Vendredi 11 Juillet 2025

FENELEC Meeting Day : Hejira mise sur les normes électrotechniques pour booster les exportations marocaines

Mardi 07 Janvier 2025

Lutte contre le tabac : Le plan de bataille de Tahraoui

Vendredi 19 Avril 2024

11ème édition de la Journée nationale du consommateur : Plaidoyer en faveur de la préservation de l’eau

S'inscrire à la Newsletter de La Quotidienne

* indicates required