La polémique autour de l'examen d'aptitude à l'exercice de la profession d'avocat a, ces derniers mois, fait couler beaucoup d’encre. Candidats et représentants du secteur ont élevé leurs voix pour dénoncer plusieurs irrégularités ayant entaché l’organisation de ces épreuves.
Par M. Boukhari
Favoritisme, discrimination, fuite des épreuves écrites, prolifération de la triche…, telles sont entre autres, les accusations adressées par les concernés à l’encontre des pouvoirs publics. Ce sont alors plusieurs candidats indignés qui sont descendus dans les rues de la capitale pour protester contre une situation «injuste», qui met en péril leur avenir professionnel.
Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, avait d’ailleurs également fait l’objet de plusieurs critiques en raison de sa «mauvaise» gestion du dossier.
Les avocats, quant à eux, estiment que la profession est en train de plonger dans une crise sans précédent. «Le marché de l’avocat se trouve actuellement dans une impasse en sus d’être déjà très saturé, particulièrement au niveau de Casablanca. Je ne vois pas comment le gouvernement cherche à intégrer chaque année près de 2.000 nouveaux candidats alors que même les avocats professionnels ont du mal à s’en sortir. Nous ne sommes pas contre cette décision, néanmoins les conditions sont loin d’être adéquates pour garantir l’insertion professionnelle desdits candidats. Avec des charges très conséquentes comprenant les impôts et les prix excessifs des loyers, un avocat ne peut se permettre d’accueillir dans son bureau 2 à 3 stagiaires et leur verser une rémunération estimée à 4.000 DH. Sans oublier que nous faisons face à une concurrence déloyale exercée par des bureaux juridiques ainsi que les écrivains publics qui rendent aux citoyens des services ne relevant pas de leurs compétences», s’insurge Nabil Haddaji, avocat au Barreau de Casablanca.
Et de poursuivre : «L’examen écrit d’accès à la profession d’avocat qui repose sur un QCM ne peut en aucun cas refléter le niveau réel des candidats. Comment le gouvernement pourrait donc se baser sur de tels critères. Auparavant, les épreuves écrites que nous passions, comprenaient des dissertations, des sujets de réflexion, des cas pratiques, etc.».
Par ailleurs, l’institution du médiateur du Royaume a récemment soumis un «rapport spécial» au Chef du gouvernement au sujet du débat suscité par l’examen des avocats. Ledit rapport comprend une série de propositions et recommandations.
En effet, l’institution propose que l’annonce des résultats et la remise des certificats d’aptitude aux candidats ayant réussi le nouvel examen soient faites début octobre prochain. Et ce, pour permettre à ceux qui le souhaitent de bénéficier avec leurs pairs des dispositions de l’article 11 de la loi régissant la profession d’avocat en ce qui concerne l’introduction de la demande de candidature pour l’inscription sur la liste des avocats stagiaires.
Aussi, l'institution recommande au ministère de la Justice de réunir les conditions favorisant un service de proximité qui permet aux candidats ne pouvant pas procéder au dépôt physique de leurs dossiers de candidature de le faire via le mode de dépôt électronique.
Parmi les recommandations de l’institution, figure également la possibilité de garantir la consultation des feuilles d’examen à l’ensemble des candidats qui le demandent.
«Les avocats ont contesté à l’unanimité la publication de ce rapport. L'institution du médiateur du Royaume ne jouit ni du droit ni des prérogatives nécessaires pour statuer sur une telle affaire. Toutefois, nous espérions sincèrement que le gouvernement initie un dialogue avec les avocats pour recueillir leurs avis sur plusieurs questions notamment sur l’avenir de ce métier qui semble être très flou», affirme Nabil Haddaji
Pour sa part, le gouvernement a répondu favorablement aux recommandations émises par le médiateur du Royaume, et ce suite aux consultations menées par le Chef du gouvernement notamment avec le ministre de la Justice.