Le Maroc vit sa seconde Fête du travail en pleine pandémie du coronavirus. Celle de l’année 2020 était assez inédite. Celle-là l’est aussi, à quelques différences près : entre-temps, il y a eu de la casse. Beaucoup de casse.
Tant sur les plans humain, social qu’économique : 9.023 décès, plus de 511.000 cas de contamination, une forte détresse sociale et psychologique et un virus qui a plombé une économie nationale qui était déjà en quête d’un renouveau avec le nouveau modèle de développement.
Conséquence : un taux de chômage de presque 12% en 2020, avec 322.000 personnes de plus qui sont venues grossir le rang de celles qui cherchent un emploi, portant à 1.429.000 le nombre de chômeurs total dans le Royaume, soit une augmentation de 29%.
Alors, dans ce contexte où la pandémie a éjecté bon nombre de citoyens du monde professionnel, ce serait presque indécent de parler «fête» du travail.
On est presque nostalgique de cette période où les centrales syndicales arpentaient les avenues, à l’occasion du 1er mai, pour brandir leurs revendications, réclamant plus de justice et d’équité sociales.
Peut-être devraient-elles penser, elles aussi, à réinventer le 1er mai et leur manière de se faire entendre.
Peut-être aussi devraient- elles enrichir davantage leurs sempiternelles plateformes revendicatives : consécration de la liberté syndicale, plus d'efforts pour lutter contre le chômage, augmentation des salaires et des pensions des retraités, amélioration du pouvoir d'achat des citoyens, soutien de la stabilité au travail…
Car, tout simplement, le monde du travail a changé. Les dogmes qui régissaient le monde économique en général ne sont plus les mêmes, et notre rapport avec le travail en particulier a radicalement changé.
Avec, en toile de fond, la prégnance d’un concept qui, jusqu’ici, n’avait pratiquement pas droit de cité : le télétravail.
Il s’installe de plus en plus. Se révèle parfois comme une nécessité.
Et, paradoxalement, dépasse le cadre strictement professionnel pour être une variable d’ajustement dans la lutte contre la propagation du coronavirus. Plus la situation épidémiologique se détériore, plus on recommande le télétravail.
Mais toutes les entreprises ont-elles les moyens d’assurer convenablement le travail à distance ? Les droits des salariés sont-ils respectés dans ce cadre ? Les salariés ont-ils pleine conscience de leurs obligations ? Au-delà, l’entreprise est-elle plus performante ou non en mettant tous ses salariés ou une partie en télétravail ?
Les interrogations sont multiples.
Et y apporter des réponses concrètes est une nécessité, car il faudra désormais composer avec le travail à distance, d’autant que des pandémies, il y en aura visiblement d’autres. Dans cette optique, serons-nous peut-être amenés, un jour, à ne plus célébrer la fête du travail, mais plutôt la fête du télétravail.
F. Ouriaghli