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Croissance : Quid de la transformation économique ?

Croissance : Quid de la transformation économique ?

L'économie marocaine montre des signes de résilience avec une croissance de 2,9% au deuxième trimestre de 2024. Toutefois, la volatilité de l'agriculture met sur orbite la fragilité sous-jacente de l'économie.

 

Par D. William

L'économie nationale affiche un meilleur profil au second trimestre 2024, avec une croissance qui passe à 2,9%. Cette croissance, quoique légèrement meilleure par rapport aux 2,5% du premier trimestre, traduit des dynamiques particulièrement influencées par les secteurs agricole et industriel. La dépendance du Maroc à l'agriculture continue de jouer un rôle prépondérant dans l'économie, mais également dans sa volatilité.

Au deuxième trimestre 2024, la valeur ajoutée agricole a enregistré une baisse de 4,9% en variation annuelle, principalement en raison des effets d'une sécheresse sévère sur les grandes cultures. Ce recul, comparativement à une hausse de 1,5% l'année précédente, s'inscrit dans une tendance de volatilité accrue qui pèse sur le potentiel de croissance agricole depuis 2019. En particulier, la production de blé et d'orge a subi des baisses respectives de 44,4% et 51% cette année, ce qui met en lumière la fragilité du secteur face aux aléas climatiques. Cette volatilité agricole met en évidence le besoin criant de diversification économique.

Non seulement elle affecte la croissance globale, mais elle influence également la stabilité des revenus pour une large part de la population rurale. Ainsi, les bonnes années agricoles propulsent la croissance économique, tandis que les années de sécheresse la font chuter dramatiquement. Cette instabilité rend difficile la planification à long terme et la mise en œuvre de politiques économiques cohérentes, tout comme elle reflète une vulnérabilité qui n’est pas compatible avec les aspirations d’un pays qui se veut émergent.

Le chômage, un boulet

Le secteur industriel et les services semblent offrir un contrepoint, avec une reprise notable de l'activité manufacturière qui a enregistré une croissance de 3,5% au T2-2024, par rapport à un timide 2,1% au premier trimestre. Cette accélération est portée par des branches telles que la chimie et les industries liées à la construction. Cependant, même avec ces avancées, le spectre de l'insuffisance des créations d'emploi plane toujours, avec un marché du travail qui peine à absorber le flux annuel de jeunes entrants.

En effet, malgré une amélioration de la conjoncture économique, le taux de chômage demeure élevé et, surtout, le taux d'emploi ne s'accroît pas au rythme nécessaire pour intégrer efficacement les nouveaux demandeurs d’emploi. En témoignent les derniers chiffres du HCP relatifs à la situation du marché de travail. «Ainsi, entre le premier trimestre de 2023 et celui de 2024, avec la perte de 159.000 postes en milieu rural, principalement non rémunérés, et la création de 78.000 postes en milieu urbain, le volume global de l’emploi a baissé de 80.000 postes.

A l'exception du secteur de l'agriculture, de la forêt et de la pêche, qui a enregistré une baisse de 206.000 postes, les autres secteurs ont contribué à la création d'emplois», indique le HCP, qui fait état d’un volume du chômage qui s’est accru de 96.000 personnes, 59.000 en milieu urbain et 38.000 en milieu rural, s’établissant à 1.645.000 personnes au niveau national. De fait, le taux de chômage est passé de 12,9 à 13,7% au niveau national (+0,8 point), et reste plus élevé parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans (35,9%), les diplômés (20,3%) et les femmes (20,1%).

Cette situation est exacerbée par une croissance économique qui, bien qu'en amélioration, reste insuffisante face aux objectifs plus ambitieux du nouveau modèle de développement (NMD). Ce dernier cherche non seulement à accélérer la croissance, mais aussi à la rendre plus inclusive, capable de générer des emplois de qualité et de réduire significativement les inégalités économiques et sociales. Rappelons-le, le NMD, dévoilé en 2021, avait un objectif bien défini : stimuler la croissance pour la porter à un rythme moyen annuel supérieur à 6% et doubler le PIB par habitant à l’horizon 2035.

Cet objectif ressemble de plus en plus à une clause de style, au regard notamment des taux de croissance enregistrés ces dernières années : 1,3% en 2022, autour de 3.4% en 2023, entre 2,8 et 3,5% prévus en 2024, et aux alentours de 4,5% en 2025. Et il risque de rester une pure utopie compte tenu des épisodes de sécheresse de plus en plus récurrents et de plus en sévères. C’est dire que bien que l'agriculture reste un pilier de l'économie marocaine, elle ne doit plus être perçue comme une fin en soi, mais plutôt comme un levier parmi d'autres dans la quête de la modernisation économique. 

 

L’inflation en embuscade
L'inflation, bien que sur une pente descendante avec un taux de 0,7% contre 1,2% au trimestre précédent, reste un sujet de préoccupation. La diminution des prix des produits alimentaires a certainement contribué à ce recul, mais certaines denrées alimentaires, telles que la viande rouge, ont des niveaux de prix encore très élevés, en raison, entre autres, de la sécheresse et de la hausse des coûts de production. Globalement, le pouvoir d'achat des ménages reste sous pression. En effet, de nombreux ménages continuent de puiser dans leurs économies pour couvrir leurs dépenses courantes, un signe que les gains de pouvoir d'achat sont encore fragiles et insuffisants pour soutenir une demande intérieure robuste. Selon la dernière enquête de conjoncture réalisée par le HCP, 42,3% des ménages avaient déjà déclaré, au premier trimestre 2024, s’endetter ou puiser dans leur épargne pour couvrir leurs dépenses de consommation. Le taux d’épargne des ménages par rapport au revenu disponible brut se serait, ainsi, situé en dessous de son ratio moyen d’avant crise de 12,9%

 

 

 

 

 

 

 

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