La Cour des comptes (CC) vient de rendre public un rapport portant sur l'évaluation de la gestion déléguée des services publics locaux en matière de distribution d'eau et d'électricité, d'assainissement liquide, de transport urbain et de propreté.
Globalement, et au titre de 2013, les délégataires privés en matière de distribution, de transport urbain par autobus et de propreté, desservent une population de plus de 13,5 millions. Leur chiffre d’affaires s’élève à près de 15 milliards de dirhams et ils ont réalisé des investissements cumulés d’un montant près de 42 Mds de DH.
... Distribution : Un secteur qui a connu un réel progrès…
Les délégataires, sur la base des quatre contrats de gestion déléguée du service de la distribution (Lydec, Rédal, Amendis Tanger, Amendis Tétouan) couvrant 46 communes, ont apporté des capitaux propres de 2 Mds de DH. Ils ont réalisé des investissements de l’ordre de 32,3 Mds de DH depuis le début des contrats jusqu’en 2013, et un chiffre d’affaires de 10,8 Mds de DH en 2013 (soit le tiers du chiffre d’affaires de distribution total de l’eau et le quart de celui de l’électricité). Depuis la conclusion du premier contrat avec Lydec à Casablanca en 1997, "la gestion déléguée a impulsé un processus qui a amené tout le secteur de la distribution vers le progrès", explique la CC.
… Mais beaucoup de points noirs…
En matière de distribution, les délégataires facturent certaines prestations en l’absence de base contractuelle ou de soubassement légal, et parfois même en l’absence d’une contrepartie matérielle. Il s’agit, entre autres, selon la Cour des comptes, des redevances instaurées auprès des espaces d’encaissement, de la facturation de l’assainissement pour des points de livraison non raccordés au réseau d’assainissement, de la facturation avec minimum (abrogée en mars 2011), de la pose et de la dépose des compteurs et des frais de relance et de coupure, ainsi que de la surfacturation des travaux remboursables aux lotisseurs.
… Notamment en termes d’investissement…
Depuis le début des contrats jusqu’en 2013, les délégataires ont collecté pour le compte fonds de travaux un montant de 8.940 MDH, dont 4.696 MDH par Lydec, 1.783 MDH par Redal et 2.461 MDH par Amendis Tanger et Tétouan. Avec ces montants, le fonds de travaux représente 40% des investissements réalisés sur la période. «Une évaluation rétrospective sur 10 ans montre que les investissements réalisés par les délégataires n’ont pas atteint totalement les objectifs fixés en termes de consistance des projets et de délais d’exécution», souligne la CC qui constate que des écarts significatifs ont été enregistrés sur les projets structurants, surtout dans l’assainissement, tels les émissaires, les stations de prétraitement, les intercepteurs et les collecteurs.
… La gestion des fonds de travaux pointée du doigt…
La gestion des fonds de travaux connaît de nombreux dysfonctionnements. Ainsi, les participations collectées par les délégataires ne sont pas toujours versées intégralement au fonds. De même, les versements sont souvent réalisés avec retard par rapport aux délais contractuels. «Les parties au contrat ont parfois utilisé indûment ces fonds pour payer des arriérés de cotisations pour l’externalisation de régimes de retraite, la couverture des frais de fonctionnement du service permanent de contrôle, la rémunération de consultants de l’autorité délégante ou le règlement de dettes», note la CC.
… De même que les autorités délégantes
La gestion déléguée n’a pas tiré avantage de tous ses atouts potentiels, en raison notamment de dysfonctionnements dans la planification et dans l’expression des besoins par les autorités délégantes, de l’inexistence d’un organe indépendant, chargé des fonctions d’expertise, de coordination, de suivi et de veille. En outre, relève la CC, "elle est handicapée par la faiblesse de la collectivité territoriale, insuffisamment dotée de profils qualifiés pour prendre en charge les engagements souscrits dans le contrat de gestion déléguée, en particulier au niveau des fonctions de contrôle et de suivi".