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Tourisme: Les bonnes feuilles de Fatim-Zahra Ammor

Tourisme: Les bonnes feuilles de Fatim-Zahra Ammor

La feuille de route du secteur touristique est enfin actée. Elle se veut très ambitieuse, mais tient-elle vraiment la route ?

Finances News Hebdo a pu avoir quelques détails de la stratégie qui devrait être déployée à l’horizon 2026, voire 2030.

 

Par D. William

La ministre du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Economie sociale et solidaire, Fatim-Zahra Ammor, la Confédération nationale du tourisme (CNT) et ses associations et fédérations membres ont en effet validé, jeudi dernier, la stratégie qui sera mise en œuvre au cours des prochaines années pour faire franchir au tourisme un nouveau palier quantitatif et qualitatif. Selon la tutelle, elle tient compte des recommandations des professionnels émises dans le cadre des différentes rencontres avec la ministre, ainsi que les ateliers de travail thématiques réalisés pendant son élaboration et ayant connu la participation d’une centaine d’opérateurs privés. 

Globalement, 5 grands axes prioritaires ont été arrêtés : une nouvelle ingénierie de l’offre touristique qui mettra davantage en avant l’expérience touristique; un plan offensif pour le développement des connectivités aériennes internationales et domestiques; le renforcement de la promotion et du marketing, avec une importance particulière accordée au digital; la stimulation de l’investissement privé et un plan de structuration de l’offre hôtelière basé sur la mise à niveau du parc hôtelier existant et la création de nouvelles capacités hôtelières.

A en croire le communiqué publié par le ministère à cet effet, les opérateurs du secteur ont «salué le caractère opérationnel de la feuille de route, qui apporte des solutions concrètes aux priorités nécessaires au développement de l’industrie touristique, ainsi que les moyens financiers importants qui seront mobilisés pour concrétiser la vision très ambitieuse de la feuille de route». Mais pour sa réussite, le partenariat public-privé constituera un prérequis, et il devra se concrétiser via la participation effective des opérateurs privés dans la gouvernance, la réflexion et le déploiement des différents chantiers, fait savoir Ammor. Les ambitions nourries pour le secteur touristique sont donc à la hauteur de la place stratégique qu’il occupe au sein de l’économie nationale. En 2019, il a contribué à hauteur de 7% au PIB et de 19% aux recettes d’exportation de biens et services, représenté plus de 550.000 emplois directs et mobilisé 8 Mds de DH d’investissements privés.

Ce positionnement légitime de consolider les acquis de ce secteur et de le rendre plus résilient, surtout que la pandémie liée à la Covid-19 a mis à nu nombre de carences, faiblesses et dysfonctionnements. Entre les problèmes de gouvernance, l’inadéquation entre l’offre et la demande, la faiblesse de l’offre touristique nationale, les moyens de promotion limités, les déficits en termes de liaisons aériennes, la forte dépendance de certains marchés émetteurs, la concentration des destinations d’accueil (Marrakech, Agadir)…, le tourisme n’a surtout pas besoin de mesures correctives, mais plutôt d’un modèle économique efficient et efficace. Nous l’écrivions tantôt sur ces colonnes. Il faut changer de paradigme.

Le secteur touristique doit se réinventer pour faire du Maroc une destination de choix. Et ce, tout en exploitant ses nombreux atouts, notamment la proximité du Royaume avec les grands marchés émetteurs et son patrimoine civilisationnel, culturel, gastronomique… La réflexion doit donc être transversale et globale dans un pays où le taux d'occupation des établissements hôteliers classés n’était que d’environ 50% avant la crise liée au Covid-19. Cette feuille de route tombe donc à point nommé, pour autant qu’elle réponde aux aspirations des opérateurs, mais surtout qu’elle cadre avec les besoins réels du secteur. Elle est surtout ambitieuse. Ce qui suscite forcément des interrogations. Est-elle réalisable  ? Quels seront les moyens financiers qui seront mobilisés  ? Comment développer les connectivités aériennes internationales et domestiques  ? Concrètement, qu’est-ce qui va être fait pour stimuler l’investissement privé  ? Y a-t-il des mécanismes incitatifs spécifiques qui vont être mis en place ?

 

Des objectifs trop ambitieux ?

Aucun détail officiel n’a été donné pour le moment sur le contenu de cette feuille de route. Mais, selon nos informations, quelques objectifs chiffrés ont été arrêtés. Il s’agit d’atteindre, à l’horizon 2026, environ 17,5 millions de touristes, et 26 millions de touristes en 2030. L’objectif est aussi de générer, d’ici 2026, quelque 200.000 emplois pérennes, dont 80.000 emplois directs, et d’engranger 120 Mds de DH de recettes des non-résidents, soit 1,5 fois plus qu’en 2019. Pour ce faire, il est prévu d’agir sur trois facteurs, dont le premier concerne l’offre touristique qui devra être structurée autour de filières intégrées.

Le second concerne le renforcement de certains leviers de compétitivité, dont notamment le doublement des capacités aériennes, le renforcement des opérations marketing et de promotion, ou encore la consolidation et la mise à niveau de l’offre hôtelière, notamment les 208.000 lits du parc hôtelier existant. Dans ce sens, l’idée serait également de lancer un fonds de reprise/transmission des 62.000 lits fermés ou en difficulté, dans le cadre d’un partenariat public-privé, et de mettre en place un «one stop shop investisseur» accompagnant la création de 40.000 lits additionnels cibles à l’horizon 2026. Et ce, sachant que les besoins additionnels à l’horizon 2030 sont chiffrés à 174.000 lits. Enfin, nous confirment nos sources, le 3ème facteur concerne le déploiement d’une gouvernance efficace, avec l’ancrage de la stratégie au niveau d’une Commission nationale interministérielle du tourisme présidée par l’exécutif, la refonte de l’organisation des entités de gestion et de suivi des projets, avec un renforcement des compétences, et la sécurisation du financement via la création d’un Fonds de développement touristique dont le budget est estimé à environ 20-25 Mds de DH pour la période 2023-2026.

Clairement, à côté des actes concrets qui devront être posés, il va falloir parallèlement mobiliser des moyens financiers conséquents pour que les objectifs arrêtés dans cette feuille de route ne se résument pas en une simple vue de l’esprit. Le challenge est de taille, d’autant que passer de 10 millions de touristes en 2022 à 26 millions en 2030 implique, comme nous le confirme un professionnel du secteur, d’enregistrer «une progression moyenne annuelle de 14% à cet horizon, alors qu’en presque deux décennies (2000- 2019) le tourisme n’a progressé que de 5,5% en moyenne». 

 

 

 

 

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