C’est la femme de lettres française George Sand qui disait que «plus on est content, plus on est gourmand de félicité».
Saad Eddine El Othmani était à l’évidence hyper content de retrouver l’Association des avocats pour la justice, le week-end dernier.
A tel point que le chef du gouvernement s’est laissé aller à une étonnante confidence : «Mon gouvernement est le meilleur de ces deux dernières décennies» !
C’est ce qu’on appelle verser dans l’autocongratulation excessive. Défendre son bilan est une chose. C’est d’ailleurs très normal.
Mais comparer moins de deux ans à la tête de l’Exécutif à tout ce qu’ont fait les gouvernements qui l’ont précédé aux affaires semble un brin présomptueux.
Car c’est forcément oublier, voire feindre d’ignorer que, jusqu’à présent, le Maroc n’arrive toujours pas à dégager une croissance suffisamment forte pour résorber la problématique du chômage structurel.
C’est oublier, surtout, que sans la pluie, la croissance est au point mort, le PIB non agricole n’arrivant surtout pas à décoller.
C’est oublier plein d’autres choses qui font que le Royaume peine à rejoindre le club des pays émergents.
A entendre les propos du chef du gouvernement, on ne peut s’empêcher d’évoquer ceux de son ministre de l’Agriculture, Aziz Akhannouch qui, en meeting à Dakhla le samedi 23 février, déclarait que tout ce qui a été entrepris sur le registre social ces dernières années, notamment pour aider les populations démunies, est exclusivement l’œuvre du Roi.
Difficile de le contredire.
La réforme du système de protection social, afin qu’il soit mieux articulé et plus efficient, émane de la volonté royale (discours du Trône du 29 juillet 208).
La réforme des Centres régionaux d’investissement, c’est le Roi.
La réforme de la formation professionnelle, c’est le Roi.
La réforme des terres collectives, c’est le Roi.
Le maintien et la poursuite du dialogue social, c’est le Roi.
Le nouveau modèle de développement économique, c’est encore le Roi….
De quoi peut donc se prévaloir El Othmani ?
Il aurait gagné à dire aux citoyens marocains en quoi son gouvernement est le meilleur de ces deux dernières décennies.
Certainement pas dans la gestion des crises sociales : Al Hoceima, Jerada et la campagne de boycott nous ont montré, à bien des égards, la capacité du gouvernement à exacerber les tensions sociales.
Encore moins dans la gestion de ses hommes : jamais une coalition gouvernementale n’aura été aussi divisée et fragile, avec des clashs entre ministres de la majorité devenus routiniers.
Sur ce point, oui, l’équipe gouvernementale actuelle remporte certainement la palme. Quand bien même El Othmani qualifie ces dissensions de «normales et naturelles». ■
D. W.