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Gloire et disgrâce : Autopsie de quelques régimes déchus

Gloire et disgrâce : Autopsie de quelques régimes déchus

Ils pensaient régner pour l'éternité, mais l'Histoire ne pardonne pas les illusions de grandeur. De Mouammar Kadhafi à Abdelaziz Bouteflika, en passant par Ali Bongo, Hosni Moubarak ou encore Bachar al-Assad, ces leaders ont cru être indétrônables. Et pourtant…

 

Par D. William

 

Le trône est souvent perçu comme une position de gloire et de pouvoir. A mesure que les années passent et que la lassitude des peuples grandit, ces figures longtemps intouchables et qui s'accrochent au pouvoir comme une moule à son rocher, finissent par être arrachées de leur piédestal, souvent dans un fracas historique, laissant derrière eux des nations en lambeaux.

Dictateurs, autocrates ou présidents à vie, ils ont tous un point commun : l'illusion que leur règne durerait éternellement. Et pourtant, l'Histoire nous rappelle que même les dictatures les plus solides finissent par crouler.

Entre fuite précipitée, humiliation publique et fin tragique, promenade à travers les allées poussiéreuses de la mémoire pour revisiter ces figures emblématiques qui ont fait au moins 20 ans au pouvoir, et dont la chute a été aussi spectaculaire que leur ascension !

Syrie : Bachar al-Assad

Le 8 décembre 2024, Bachar al-Assad a quitté la Syrie après 24 ans de pouvoir. Cet ancien ophtalmologue devenu tyran a vu son pouvoir s’effriter sous la pression d’une offensive rebelle. Son départ intervient après des années de guerre civile dévastatrice, laissant une Syrie fragmentée et en ruines. Si sa fuite est un soulagement pour beaucoup, il marque aussi le début d’une nouvelle ère d’incertitude dans un pays qui a souffert des exactions et de l’autoritarisme.

Gabon : Ali Bongo Ondimba

Ali Bongo, qui a succédé à son père Omar Bongo en 2009, est le seul de cette liste à être resté moins de 20 ans au pouvoir (presque 14 ans). Mais il a perpétué la dynastie familiale, car en rajoutant le règne de son père, le clan Bongo aura dirigé le Gabon pendant 56 ans. En août 2023, il est chassé du pouvoir par un coup d'Etat militaire. Sa chute symbolise le rejet d’un pouvoir héréditaire qui semblait destiné à durer éternellement.

Algérie : Abdelaziz Bouteflika

Il s’est agrippé à ses fonctions présidentielles jusqu’à ce que son propre corps le trahisse. Incapable de parler ou de se déplacer, Bouteflika a pourtant tenté de briguer un cinquième mandat, ce qui a déclenché une levée de boucliers nationale. En avril 2019, après 20 ans au pouvoir, il a été contraint de démissionner face à des manifestations massives, laissant un pays en quête de renouveau, mais toujours hanté par ses démons. Le Hirak, mouvement populaire, a exprimé le ras-le-bol d'une jeunesse en quête de changement.

Soudan : Omar el-Béchir

Omar el-Béchir, au pouvoir depuis 1989, pensait peut-être que son uniforme militaire suffirait à museler son peuple. Mais après 30 ans de pouvoir, il a été destitué par l'armée en avril 2019, suite à des mois de protestations. Accusé de génocide et de crimes de guerre, il fait depuis lors des allers-retours entre la prison et l’hôpital en raison de son état de santé. Mais son départ n'a pas apporté la stabilité espérée, le Soudan étant toujours englué dans des chouanneries meurtrières.

Zimbabwe : Robert Mugabe

Mugabe, héros de l'indépendance devenu autocrate, a dirigé le Zimbabwe pendant 37 ans. En novembre 2017, un coup d'Etat militaire l'a poussé vers la sortie. Son règne a transformé le «grenier de l'Afrique» en une économie moribonde et exsangue, avec une inflation galopante et une émigration massive.

Libye : Mouammar Kadhafi

Que dire de Mouammar Kadhafi ? Avec ses tenues flamboyantes, il a régné sur la Libye pendant 42 ans. Ce colonel autoproclamé «Guide de la révolution» pensait incarner l’éternité. En octobre 2011, une rébellion soutenue par une intervention internationale a mis fin à son règne de façon tragique. Capturé, lynché, puis tué par les rebelles, il a laissé la Libye dans un chaos dont elle peine encore à se relever. Le «roi des rois d'Afrique» est tombé de son trône, emportant avec lui ses rêves délirants de grandeur.

Egypte : Hosni Moubarak

Février 2011 a vu la démission de Moubarak, après 30 ans passés à la tête de l'Egypte. Des places du Caire, notamment Tahrir, ont résonné des chants de liberté, forçant le «pharaon» à abdiquer. On le verra plus tard derrière les barreaux, allongé sur un lit médicalisé, symbole d’un homme brisé. Son départ a plongé l'Egypte dans une période tumultueuse, oscillant entre espoir démocratique et retour à l'autoritarisme.

Tunisie : Zine El Abidine Ben Ali

En janvier 2011, après 23 ans de règne, Ben Ali a pris la poudre d'escampette pour trouver refuge en Arabie saoudite, face à une vague de manifestations populaires. Le peuple tunisien, lassé de la corruption et du manque de libertés, a dit «non» à l'oppression, inaugurant ainsi le Printemps arabe. Derrière lui, il laisse pourtant une Tunisie encore vacillante, en proie à une autocratie à peine voilée.

Ces destins, bien que variés, partagent un dénominateur commun : l'illusion d'une emprise éternelle sur le pouvoir. Les dictateurs et autres chefs d’Etat avides de pouvoir s'entourent souvent de courtisans serviles, se coupant de la réalité et des aspirations de leur peuple. Ils finissent par croire en leur propre invincibilité, jusqu'à ce que la réalité les rattrape. Leur chute laisse généralement des nations en proie à l'instabilité. Les institutions, affaiblies par des années de gouvernance autocratique, peinent à répondre aux aspirations démocratiques.

Les économies, souvent pillées et mal gérées, mettent des années à se redresser. Les sociétés, fracturées par la répression, doivent entreprendre un long chemin vers la réconciliation. Il est ironique de constater que ces leaders, qui se voyaient en sauveurs de leur nation, finissent souvent par être perçus comme les fossoyeurs de leur propre héritage. Leur obstination à s'accrocher au pouvoir précipite leur chute et plonge leur pays dans le chaos qu'ils prétendaient éviter.

L'histoire nous enseigne ainsi que le pouvoir absolu corrompt absolument. Et les dirigeants qui ignorent les aspirations de leur peuple pour assouvir leur soif de pouvoir finissent indubitablement par être balayés par les vents du changement.

 

 

 

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