L’Association des ingénieurs de l’Ecole supérieure des industries du textile et de l’habillement (Esith) a organisé, mardi 14 juin à Casablanca, une rencontre avec le Secrétaire général du PAM, Ilyas El Omari. Ce qu'il a dit.
Les libertés régressent...
Quelle appréciation faites-vous du bilan du gouvernement Benkirane ? Ilyas El Omari répond à cette question en invitant à regarder de près l’évolution de deux indicateurs significatifs à ses yeux, depuis que le PJD a été porté au pouvoir en 2011. D’une part, le rang du Maroc dans l’indice de la lute contre la corruption de Transparency, passant de 80 en 2011 à 90 en 2016. Le SG du PAM revient également sur la part des mouvements de contestation interdits au Maroc, située à plus de 50% actuellement contre 25% il y a cinq ans. Il en est de même pour le recul de la liberté de presse comme, dit-il, le confirme le classement et les rapports de Reporters sans frontières et de la Fédération internationale de la presse.
Ilyas El Omari appelle à lire les notes de conjoncture du ministère des Finances, du HCP et de certains organismes internationaux (FMI). «Ils ont promis 7% lors de la campagne électorale, puis 4,5% dans la Déclaration gouvernementale. Maintenant, l’on s’attend à seulement 2,5% en 2016, soit une moyenne de 3% au cours de tout leur mandat. Une perte d’un point et demi qui a accentué le chômage, notamment chez les jeunes sans formation âgés de 14 à 28 ans, et dont le taux de chômage avoisine les 28%», dixit El Omari. Ce dernier estime que le gouvernement actuel a pourtant bénéficié d’un environnement exceptionnel, marqué par la baisse favorable des prix du pétrole (de 120 à 28 dollars le baril), la succession de quatre bonnes saisons agricoles et le don de 5 milliards de dollars offert par les pays du Golfe.
La dette publique a atteint de nouveaux records avec le gouvernement actuel, lance El Omari en pointant du doigt l’usage de la dette, orienté plus vers la consommation que vers l’investissement dans l’innovation et l’industrie. «Le PIB industriel représente à peine 14% du PIB national», regrette le numéro un du parti du tracteur qui qualifie de «poésie» l’objectif de 20% tracé par le Plan d’accélération industrielle. «Certes, Moulay Hafid Elalamy a de bonnes intentions, mais le pouvoir de la réalité a malheureusement dominé le pouvoir de l’ambition et de l’imagination», affirme El Omari.
Le parc industriel chinois prévu à Tanger, objet d’un mémorandum signé récemment entre le Maroc et la Chine pour un montant d’investissement de dix milliards de dollars, ne s’inscrit pas dans une logique «alternative», en ce sens qu’il ne remet absolument pas en cause les liens avec les partenaires économiques classiques du Royaume, assure El Omari. Mieux, ajoute-t-il, à ce jour, les projets prévus avec les Chinois ne concernent pas le secteur du textile, se limitant à l’industrie automobile et à l'aéronautique. «L’industrie du textile est vitale pour le Maroc, d’un point de vue à la fois économique et social. Elle a toujours su résister aux crises en s’adaptant aux mutations technologiques et à l’évolution des marchés. C’est un secteur qui a besoin de l’appui de l’Etat», souligne El Omari.
«Je suis pour la réforme, mais aussi pour la généralisation des retraites. Une réforme qui tient compte de l’avis des retraités, des syndicats. Mais encore faut-il savoir les causes, qu’elles soient naturelles ou non, ayant été à l’origine de la situation actuelle de la Caisse marocaine des retraites (CMR)». C’est la position du PAM vis-à-vis de ce dossier qui préoccupe le gouvernement à quelques mois des législatives du 7 octobre prochain. Le SG du PAM s’est montré compréhensif vis-à-vis de l’attitude des syndicats représentés au sein de la deuxième Chambre qui refusent d’entamer toute discussion avant de recevoir les réponses du gouvernement au sujet de leur cahier revendicatif. «Aucune réforme ne se fait à sens unique, sans concertations, sinon à quoi servent les syndicats, les associations, les partis politiques», confirme Ilyas El Omari.
Quelques heures avant l’arrivée de El Omari au siège de l’Esith à Casablanca, lors de la séance mensuelle des questions orales au Parlement, le Chef de gouvernement était «décidé et engagé à mettre son avenir politique et celui de son parti dans la seule cause de la réforme des retraites». Le jour même, apprenait-on d’un communiqué du ministère des Finances, le Conseil d’administration de la CMR actait le premier déficit du régime des pensions civiles, qui va frôler les 6 milliards de DH au titre de l’année 2016.