Dans les ruelles animées des médinas marocaines, le Ramadan s'annonce tel un voyage intérieur, une odyssée de privations et de spiritualité.
Mardi, dès les premières lueurs de l'aube, lorsque le ciel se parera de nuances rosées, les Marocains vont se lever, prêts à entamer une journée de jeûne, de réflexion et de communion avec Dieu.
Plus de petit-déjeuner, plus de café, plus de clope. Le chant mélodieux des croissants et des baguettes reste de lointains souvenirs de notre quotidien gourmand.
Un vide intersidéral s'installe ainsi dans les estomacs, tandis que certains poumons réclament leur dose de nicotine et que les gorges desséchées crient désespérément leur soif.
Comme chaque Ramadan, au travail, se joue un ballet d'efforts et de résilience. Les employés, d'ordinaire si prompts à l'action, luttent contre la somnolence et la faim, cherchant à maintenir leur productivité malgré la privation.
Mais les esprits, eux aussi, jeûnent, plongeant certains dans un état de semi-léthargie intellectuelle, tandis que les discussions se teintent parfois d'une pointe d'irritabilité.
Les heures s'étirent, ponctuées par les appels à la prière qui résonnent à travers la ville, rappelant à chacun l'importance de la dévotion et de la piété.
Mais le jeûne n'est pas seulement une épreuve spirituelle et physique, c'est aussi un test de patience et de maîtrise de soi.
Cela, beaucoup l’oublient. Puisque dès midi, l'heure fatidique, les tempéraments commencent à s'échauffer, les esprits s'agitent et les miasmes de l'incivisme se diffusent insidieusement, révélant les tensions sous-jacentes d'une société en quête d'équilibre.
Les automobilistes, pris dans les embouteillages interminables, expriment leur frustration par des gestes et des jurons colorés, tandis que les klaxons résonnent comme des cris de détresse.
Pourtant, malgré tout, le Ramadan demeure un mois de partage et de solidarité. Les familles se réunissent autour de tables modestes mais généreuses, partageant des repas simples mais savoureux, échangeant sourires et anecdotes.
Après le ftour, les rues s'animent de la joyeuse effervescence des marchés nocturnes, tandis que les mosquées se remplissent de fidèles venus chercher réconfort et guidance.
Car, au-delà des privations matérielles, au-delà de la faim et de la soif, le Ramadan est aussi un mois de renouveau spirituel, de réflexion et d'introspection. Un mois de rédemption, d'humilité et de générosité. Un mois de foi et d'espoir. Un mois où l'on se rapproche de Dieu et de nos semblables. Un mois où l'on puise la force nécessaire pour affronter les épreuves de la vie avec courage et résilience.
C’est pourquoi, malgré les défis et les difficultés du moment, les Marocains accueillent le Ramadan avec gratitude et humilité, conscients de la valeur, des enseignements et des bénédictions de ce mois béni, où les cœurs s'ouvrent, les âmes se purifient et chacun s'efforce de devenir une meilleure version de lui-même.
Et c'est peut-être là, finalement, la plus grande leçon du Ramadan.
Ramadan mubarak !
F. Ouriaghli
