Par Abdelhak Najib. Écrivain-journaliste
Ramadan est là. Nous y sommes. Il est certes particulier cette année, mais Ramadan, ça reste quand même un sacré mois. Rien à dire. Qu’est-ce qu’on y est bien durant trente jours où l’on prend la vie comme une parenthèse enchantée pour certains, un peu moins drôle pour d’autres, mais l’un dans l’autre, il fait bon couper avec la routine de toute une année monotone où les jours se suivent et se ressemblent, avec en plus la peur de choper la crève.
Quoi qu’il en soit, on sait cette année que l’on doit composer avec notre hôte, ce cher Covid numéro 19 qui nous malmène, mais à qui on peut faire un joli pied de nez durant ce mois, en agissant avec responsabilité, en limitant les contacts, en s’astreignant à en faire le moins possible, pour ne pas prendre des risques inutiles. Ceci pour la parenthèse prévention de rigueur, sinon, pour le reste, il ne faut pas perdre de vue que Ramadan, c’est d’abord une belle fête de tous les jours. On se fait plaisir en jeûnant et en attendant le bon plat du soir, avec les siens, que l’on déguste comme la panacée tellement on l’a mérité, parce qu’on a passé une belle journée, dans le calme, dans la bonne humeur, léger et l’esprit ouvert pour le recueillement et la sérénité.
Bon, vous allez me dire que nos chers Marocains ont pris des plis historiques avec Ramadan : il faut tirer la tronche, il faut faire la gueule au réveil comme un réflexe conditionné : genre, je fais Ramadan, je ressens le manque de tout, ça ne va pas, je vais péter un fusible.
C’est un choix, ça, mes chers compatriotes. Chacun choisit comment passer sa journée.
Il te suffit de mettre des lunettes roses et le tour est joué. C’est rien 12 heures sans manger ni boire, ni fumer ni tout le reste.
Puis on festoie, on fait bombance, on ouvre les banquets et on se lance dans des orgies de bouffe interminables. Quand même curieux ce truc à la marocaine : on fait abstinence et on attend, aux aguets, les nerfs à vif, le regard aiguisé sur celui qui va fondre sur sa proie.
Le muezzin ne finit même pas sa tirade que l’on saute sur les mets durant des heures, jusqu’à l’appel de la prière de l’aube. On dirait un marathon de la boustifaille. C’est à qui va ingurgiter plus que l’autre pour tenir le lendemain.
D’un point de vue médical, un copain professeur m’a certifié que si on mange peu, on jeûne mieux. On a moins faim le lendemain. On a moins mal à l’estomac. On a moins la migraine. C’est lui le toubib. C’est lui qui sait. Moi, je ne fais que partager avec vous chers lecteurs.
Puis, il faut dire qu’elles sont bien belles nos tables durant Ramadan. On se fait bien plaisir. On a bien raison. Mais on peut aussi penser aux voisins, à ceux qui n’ont pas ce qu’on a, c’est aussi ça Ramadan, c’est faire du bien et tout le temps en partageant.
Ça, c’est un ami fqih qui me l’a dit, juré promis. Et il partage tout lui avec les pauvres. Il dit que rien ne vaut le sourire d’un affamé qui mange à sa faim.
C’est beau quand même, avouez. Vivre et faire vivre. Prendre des plaisirs simples en pensant à autrui. C’est cela le sens premier de ce mois : revenir à des choses simples, s’aimer les uns les autres, donner, partager, se satisfaire de ce qu’on a et prier pour le salut de tous, dans un monde de plus en plus bizarre et coupé des spiritualités.
Sans oublier une chose cruciale, s’il vous plaît, chers concitoyens : vous n’avez vraiment pas besoin de vous chamailler ni de vous bagarrer ni de vous invectiver. Ça fausse tout. Ça enlève tout le charme à ce mois si magnifique.
Un sourire ouvre toutes les portes, c’est vrai ça, mon ami psychiatre me le dit tout le temps. Et c’est gratuit, vérifiez pour voir. Souris et tu feras sourire ton prochain, c’est contagieux. C’est la recette gagnante pour passer un Ramadan de toute beauté : joie, paix, ouverture d’esprit, disponibilité et surtout la bonne humeur. Celle-ci est la clef de voûte pour tout envoyer balader par-dessus l’épaule.
Comme quoi, on peut passer le meilleur des Ramadans, avec juste le choix réfléchi de passer du bon temps, au plus près de soi, parmi les autres, dans l’amour du sacré. Amen.