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Gestion des chiens errants au Maroc : Une volonté pas si partagée

Gestion des chiens errants au Maroc : Une volonté pas si partagée

Le décès mardi 16 août d’une touriste française âgée de 44 ans, attaquée par une meute de chiens errants dans la commune d’El Argoub, située à quelques encablures de Dakhla, a remis sur la table le débat sur la gestion de la population canine au Maroc. 

 

Par Meryem Ait Ouaanna

 

Malgré la signature en 2019, par le ministère de l’Intérieur, le ministère de la Santé, l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) et le Conseil national de l’Ordre des vétérinaires du Maroc (OVM), d’une convention cadre sur la gestion de la population canine, la prolifération des chiens errants ne cesse de prendre de l’ampleur, coûtant la vie à au moins 30 personnes chaque année.

Alors que le gouvernement prévoit annuellement une enveloppe de 60 millions de dirhams pour lutter contre ce phénomène de plus en plus inquiétant, l’application de la convention quadripartite prend du retard. Selon Amal El Bekri, secrétaire générale du Réseau associatif pour la protection animale et le développement durable au Maroc (Rapad), la mise en œuvre de ladite convention est entravée par le manque de volonté de certaines communes. A ce jour, seules quatre communes, dont Marrakech, Tanger, Agadir et Rabat, travaillent sérieusement sur la mise en application de la convention quadripartite. Les dispensaires sont au stade de construction, et la mise en place de la stratégie n’a pas encore atteint la phase opérationnelle. 

«Certaines communes ne semblent pas prendre à bras-le-corps la problématique et surtout la mise en œuvre de la convention. En tant que Rapad Maroc, nous avons aidé plusieurs communes à dépasser le problème de budgétisation et celui de la préparation ou la création des centres. Malheureusement, certaines ont adhéré et ont fait intervenir les associations de protection animale, tandis que d’autres sont toujours au même stade», déplore la secrétaire générale de Rapad Maroc.

Là où le bât blesse, c’est qu’en dépit de l’interdiction au Maroc de l’abattage des chiens errants depuis 2019, cette méthode tant décriée par les défenseurs de la cause animale est toujours pratiquée dans certaines villes du Royaume.

«Certaines communes qui, apparemment, ne souhaitent pas mettre en œuvre la convention, optent pour l’abattage. Or, on sait pertinemment que cette opération ne résoudrait absolument pas le problème. Ça fait 40 ans qu’on le fait, une période largement suffisante pour remarquer l’échec ou la réussite de cette méthode», affirme la même source.

Et de poursuivre : «Plusieurs réunions ont été tenues au niveau du Grand Casablanca. Finalement, il a été décidé de commissionner des sociétés pour l’abattage. Donc, tout l’argent qui aurait pu être mis pour la mise en application de la Convention, le Grand Casablanca, au grand dam des associations, a préféré le donner à des sociétés privées qui tuent les chiens». 

Si l’abattage est considéré comme «une cruauté inutile», la méthode TNR est reconnue par l’OMS et l’OIE (Organisation mondiale de la santé animale), comme étant la seule stratégie réussie. Appliquée par plusieurs pays, la TNR en anglais «Trap-Neuter-Return», qui signifie «Attraper, stériliser, relâcher» a permis en quelques années de réduire le nombre d’attaques et de supprimer totalement les cas de rage humaine. 

«La seule et unique solution est d’opter pour la méthode TNR. Par ailleurs, il faut l’appliquer correctement. Car contrairement à ce qui se fait aujourd’hui dans certaines régions du Maroc, la TNR consiste à capturer l’ensemble des chiens et non pas seulement les plus dominants. Il faut prendre toute la population canine, c’est-à-dire qu’il faut aller de quartier en quartier, prendre les animaux, femelles et mâles, qui seront par la suite stérilisés, vaccinés, déparasités, puis remis à leur quartier d’origine», explique Amal El Bekri.

In fine, la secrétaire générale de Rapad Maroc a pointé du doigt le manque de sensibilisation des citoyens à la cause animale.  «Aucun animal n’est agressif par nature, à moins qu’il soit malade. Par contre, l’être humain peut le rendre agressif. Quand les gens croisent un chien dans la rue, la plupart ont peur et se mettent donc à courir. Certains vont même jusqu’à lui jeter une pierre, un comportement que le chien va ressentir comme une agression. Afin de se protéger, ce dernier va donc attaquer la personne en question. Il est important d’adopter certaines habitudes vis-à-vis de la population canine. C’est donc tout un process pour que la convention réussisse et tout le monde doit s’y mettre», conclut-elle.

 

 

 

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