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Maîtrise de la lecture : Le Maroc cancre de la classe

Maîtrise de la lecture : Le Maroc cancre de la classe

Le niveau de lecture des écoliers marocains est bien en deçà de la moyenne mondiale. Selon l’étude PIRLS 2021, 59% des élèves marocains se situent en dessous du niveau minimum de maîtrise de la lecture.

 

M. Ait Ouaanna 

Un résultat qui fait mal au cœur ! 372 : ce chiffre correspond à la moyenne des points cumulés par les élèves marocains, dans le cadre de la cinquième édition de l'étude internationale sur le progrès en littérature (PIRLS 2021). Un score qui représente un écart non négligeable de 128 points par rapport au seuil international fixé à 500 points. Ainsi, le Maroc occupe l’avant dernier rang du classement, soit 56ème sur 57 pays participant à ladite étude. 

En novembre 2022, le ministre de l'Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports, Chakib Benmoussa, a fait état d’une situation inquiétante selon laquelle 77% des élèves du primaire ont des difficultés à lire un texte en arabe. Un constat qui se confirme davantage suite aux résultats du PIRLS, qui évalue les performances des systèmes éducatifs en termes de maîtrise de la lecture dans la langue enseignée au primaire, soit la langue arabe, pour ce qui est des élèves marocains. 

En effet, l’étude a ciblé un échantillon représentatif de l’ensemble des régions du Royaume, composé de 7.017 élèves de la 4ème année du cycle primaire, en plus de 7.017 parents et tuteurs, ainsi que 266 professeurs d'arabe représentant un total de 266 établissements. Bien que la performance des Marocains soit meilleure par rapport à celle réalisée lors des éditions précédentes, celle-ci demeure en deçà de la moyenne mondiale. 

Dans le détail, 59% des élèves marocains se situent en dessous du niveau minimum de maîtrise de la lecture, ce qui place le Royaume en 56ème position, juste devant l’Afrique du Sud qui s’enfonce dans les bas-fonds du classement. Notons que cette étude a concerné 7 autres pays arabes, à savoir le Qatar, les Emirats Arabes Unis, le Bahreïn, l’Arabie Saoudite, le Sultanat d’Oman, la Jordanie et l’Egypte, tous situés en dessous de la moyenne de 500 points.

Cette situation est tributaire de plusieurs facteurs. Selon Sara Elbaza, professeure du cycle secondaire qualifiant, les parents ont une grande part de responsabilité. «Ce score inquiétant est dû au rôle parental qui tend à charger les élèves dès leur jeune âge de tout élément pouvant les calmer et apaiser leurs pleurs. Car l'enfant est plus attiré par les écrans de tablettes, de téléphones, de télévisions, surtout quand c'est tactile. L'enfant développe un penchant à agir et interagir avec ce qui est lumineux, multicolore et surtout interactif. Du point de vue parental, les simples couleurs sur les jeux ordinaires, les livres ou encore les puzzles ont une représentation qui les classe, étant surannées et très classiques, ne produisant aucun effet sur l'attention de leur enfant. Ce dernier se retrouve, dès son enfance, éloigné des livres et des jeux de lettres substitués par des écrans», explique-t-elle. 

«Ces habitudes engendrent des répercussions nocives sur le rendement scolaire des enfants qui n'éprouvent aucune affection pour le livre. L'enfant n'est que le fruit de son environnement et de ce que lui inculquent ses parents comme valeurs, principes, coutumes et normes. De nos jours, les élèves s’attirent par la facilité de la vie et le livre ne charge aucune place dans leurs esprits. On a cédé au système capitaliste et au matérialisme au point que nourrir l'esprit et l'intellect est devenu «pas grand-chose». Diffuser les lives sur Instagram ou TikTok peut changer un niveau financier et c'est ce que le livre est incapable de faire. Ce qui est d'intérêt immatériel et spirituel tend à être escamoté et remplacé par les apparences et la tromperie des écrans», poursuit-elle.

De son côté, Amina El Aouani, enseignante du cycle primaire, relève que ce résultat «prévisible» s’explique notamment par le manque de sensibilisation des élèves et de leurs parents quant à l’importance de la lecture. «Aujourd’hui, plusieurs personnes considèrent la lecture comme une activité facultative et secondaire. Très peu d’enfants dédient leur temps libre à la lecture, au moment où la grande majorité le consacre aux réseaux sociaux ou une autre activité complètement inutile». 

Pour améliorer le niveau des élèves marocains en termes de maîtrise de la lecture, l’enseignante estime qu’il est primordial de revoir la pédagogie d’apprentissage et d’équiper chaque établissement scolaire d’espaces dédiés à la promotion de la lecture. En outre, El Aouani souligne l’importance d’organiser, fréquemment, au sein des écoles, des événements culturels en rapport avec la lecture et de sensibiliser les parents au rôle que peut jouer la lecture en matière d'épanouissement de leurs enfants. Dans le même ordre d’idées, l’enseignante appelle le ministère à consacrer un budget aux activités liées à la lecture. 

Réagissant aux résultats de l’étude PIRLS 2021, le Département de Benmoussa a précisé dans un communiqué que sa politique menée dans le cadre de la feuille de route 2022-2026 vise une amélioration importante pour l’édition PIRLS 2026, en assurant d'abord «une offre de préscolaire gratuite efficace et attractive garantie par l’État, permettant aux enfants d’être mieux outillés pour aborder leur primaire».

Aussi, la tutelle compte améliorer ce score en mettant en place, à partir de la prochaine rentrée scolaire, une opération massive de remédiation en cours pour mettre à niveau les élèves sur les fondamentaux en lecture, par le biais du programme TaRL (Teaching at the Right Level), qui profitera à près de 400.000 élèves. 

De surcroît, le ministère fait savoir qu’à l’horizon 2026, la totalité des classes des écoles primaires auront accès à une bibliothèque de classe, des livres de qualité, avec une pratique régulière de la lecture. Notant par ailleurs qu’une attention particulière sera accordée à l'amélioration des méthodes d'enseignement, et ce en vue favoriser la compréhension des textes.

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