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Violences familiales : L’insoutenable cruauté des hommes

Violences familiales : L’insoutenable cruauté des hommes

Selon les résultats d’une étude menée par le haut-commissariat au Plan (HCP) et qui vient d’être rendue publique fin novembre 2022, le coût des violences au sein de la famille atteint 1,98 milliard de dirhams. Intitulée «Coût économique de la violence à l’encontre des filles et des femmes : Dépenses et perte de revenus des ménages», ces résultats publiés par le HCP découlent d’une enquête nationale réalisée en 2019 avec l’appui d’ONU Femmes au Maroc.  

 

Par Abdelhak Najib
Écrivain-journaliste

 

 

Les données du HCP ne souffrent aucune ombre. La violence physique coûte plus cher que toutes les autres formes de violence au Maroc. Son coût est estimé à 1,67 milliard de dirhams (MMDH) contre 308 MDH pour la violence sexuelle.

Le HCP explique que ce montant découle des dépenses effectuées pour des soins de santé (737 MDH), pour des recours aux services juridiques et judiciaires (406,8 MDH), et pour l’hébergement en cas d’abandon du domicile conjugal (293,1 MDH), pour le remplacement et la réparation des biens endommagés avec 11,3% (185 MDH). Sans parler du coût indirect de la violence conjugale et qui est estimé à 351 MDH. Il s’agit de la prise en charge des travaux domestiques, du travail rémunéré et/ou de la scolarisation des enfants.

On le voit bien, les Marocains deviennent de plus en plus violents. Au-delà des violences urbaines et de la criminalité galopante à laquelle on assiste depuis plusieurs années, avec la multiplication des agressions, avec ou sans armes, au-delà des crimes liés à l’usage et l’abus des drogues de tous genres, au-delà des phénomènes urbains comme le hooliganisme, les Ultras et les guerres larvées des gangs, au-delà des violences sexuelles, des viols, du harcèlement et des kidnappings, les violences domestiques, au sein du couple, au sein de la famille prennent des proportions très inquiétantes.

Les réalités du terrain dépassent de loin les chiffres avancés dans ces rapports puisque beaucoup de femmes n’osent jamais parler des violences qu’elles subissent et surtout ne portent jamais plainte pour de nombreuses raisons : le poids de la famille, le regard de la société, les préjugés, la précarité et le manque de moyens pour engager des poursuites judiciaires contre l’agresseur.

En effet, les femmes subissent souvent en silence et en serrant les dents : coups et blessures, agressions, viols, rapts, kidnappings, harcèlement moral, stress et violence psychologique et physique, tentatives de meurtre et assassinats. Dans ce sens, il faut aussi se référer aux données avancées par la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN), chargée du traitement des affaires de violence contre les femmes, qui révèle qu’en 2021, 61.388 dossiers portant sur toutes les formes de violence à l'encontre des femmes et des filles ont été enregistrés, avec un total de 62.383 victimes dont 7% sont des mineures.

D’aucuns pensaient qu’avec la promulgation, en 2018, d’une loi qui définit et criminalise certaines formes de violence à l’égard des femmes, les victimes et leurs enfants pouvaient aisément obtenir justice. C’était sans compter sur les lourdeurs administratives, certaines lois du code pénal et autres difficultés qui font de ce désir de justice un vœu pieux, alors que les violences gagnent du terrain de manière franche dans une société marocaine, en perte de valeurs et en proie à des violences de plus en plus accrues, et ce à tous les niveaux. Face à toutes ces complications, on comprend bien pourquoi de nombreuses victimes finissent par jeter l’éponge.

En effet, selon les chiffres de la DGSN, 8% des femmes violentées n’ont d’autre choix que de retirer leurs plaintes. Elles jugent les procédures lentes, longues et décourageantes. Ce qui fait dire à plusieurs analystes que cette lourdeur a des répercussions graves que l’on constate dans la propagation des cas de violence physique qui se place en haut du tableau avec 41% des plaintes. Celles-ci sont toujours accompagnées d’autres types de violences : économique (27 %), violence psychique (26%), violence sexuelle (4%) et violence via les nouvelles technologies (2%).

Quand on combine le tout, le cocktail qui prend forme, fait peur dans un Maroc qui plaide constamment pour les droits des femmes, qui avance de nombreux slogans pour la protection des femmes et des jeunes filles, qui parle d’égalité et d’équité… alors que les réalités du terrain consacrent des dérives violentes de plus en plus criantes et qui nécessitent un profond débat de société.

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