La guerre en Ukraine prend depuis le début cette forme hybride : un groupe de mercenaires, l’apologie de la blogosphère, la guerre des images, la propagande et les populismes d’un côté comme de l’autre, à la fois pour créer un opaque écran de fumée sur les réalités du front et pour brouiller toutes les cartes.
Alors que le groupe paramilitaire russe Wagner a revendiqué le 3 avril 2023 la prise de la mairie de Bakhmout, affirmant contrôler la ville «au sens légal», l'Ukraine campe sur ses positions et affirme pour sa part qu'elle tenait encore cette localité de l'est du pays où des combats sanglants rythment la vie des populations depuis des mois.
«Au sens légal, Bakhmout a été capturée. L'ennemi est concentré dans les zones ouest», a déclaré sur Telegram le chef de Wagner, Evguéni Prigojine.
On le voit sur une vidéo brandissant un drapeau russe avec une inscription en l'honneur de Vladlen Tatarskiï, blogueur militaire russe, défenseur de l'offensive en Ukraine tué le 2 avril par l'explosion d'une bombe. Cet attentat dans un café du centre historique de Saint-Pétersbourg a également fait 25 blessés, selon les autorités.
C’est dire toute l’importance accordée par Moscou à la guerre des images et aux manipulations par médias et réseaux interposés.
Pendant ce temps, Vladimir Poutine essaie de calmer les esprits et susciter un peu d’enthousiasme au sein des troupes, avec la création d'un fonds de soutien russe aux soldats engagés. Il s’agit d’un décret signé lundi 3 avril 2023. Un acte qui vise à officialiser la création d'un fonds spécial d'assistance aux soldats engagés en Ukraine.
Une réponse de la présidence russe pour faire face au ras-le-bol des soldats de l’armée russe qui a essuyé de lourdes pertes depuis le début de l'offensive contre l’Ukraine.
Pour détourner l’attention sur de nombreuses déconvenues militaires et surtout sur les pertes humaines, Vladimir Poutine a promis de l’argent pour accompagner la mobilisation à partir de septembre de 300.000 réservistes, tous des civils très réticents à s’engager dans une guerre qui semble s’enliser dans une durée indéterminée.
Selon ce décret, en plus des militaires engagés, l'épouse ou conjointe et les enfants seront également soutenus par ce fonds spécial, dont le montant global n'a pas été communiqué. «Notre devoir est de soutenir les familles qui ont perdu des êtres chers et de les aider à élever leurs enfants et à leur donner une éducation et un travail». Pour Vladimir Poutine, ce fonds va «apporter une aide ciblée et personnalisée aux familles des combattants tombés au combat, ainsi qu'aux vétérans».
Sur le plan diplomatique, cette semaine est marquée par une valse de déplacements en Ukraine et en Pologne. D’abord, le vice-chancelier allemand qui visite le président Zelensky.
Puis, la visite de celui-ci à Varsovie pour demander plus de garanties et de soutien. Tout ceci survient alors que depuis le 1er avril 2023, c’est la Russie qui assure la présidence tournante du Conseil de sécurité des Nations unies, succédant au Mozambique.
Et voilà Moscou bien calée dans les rangs pour utiliser cette tribune à des fins diplomatiques, essayant d’expliquer à tous pourquoi cette guerre en Ukraine devait avoir lieu.
A la fois ironique et dérangeant de voir comment tournent les affaires du monde. D’un côté, le monde presque en entier qui condamne cette invasion. De l’autre, la présidence du Conseil de sécurité assurée par un État qui a déstabilisé la sécurité du monde dans sa globalité.
Abdelhak Najib, Écrivain-journaliste