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Le grand chambardement

Le grand chambardement

Le second mandat de l’administration Trump est marqué d’une radicalité protectionniste sans égale depuis l’administration d’Herbert Hoover qui a dû combattre les affres de la grande dépression des années 1930 aux Etats-Unis avec le Smooth-Hawley Tariff Act.

Par Khalid Doumou, chercheur pluridisciplinaire

Le problème avec ce genre de solution radicale unilatéralement imposée à l’ensemble de la planète, c’est que l’on redoute aujourd’hui que s’installe une stagflation, voire une récession mondiale, dont on sait qu’elle aura des répercussions négatives sur des chaînes de valeurs mondiales qui risquent de ne plus vouloir rien dire aujourd’hui.

La stratégie de coopération-réciprocité-pardon adoptée par l’administration Trump 2.0 , plus connue sous le sigle CRP (souvent nommée Tit-for-Tat (TFT) en anglais), a d'abord été formalisée par le biomathématicien, psychologue et philosophe Anatol Rapoport.

Il s'agissait, au moment de sa découverte, de la stratégie la plus efficace en théorie des jeux. Cette stratégie disait en substance «you’ll get what you give», ou vous obtiendrez en retour l’équivalent de ce que vous êtes prêt à donner.

Après la «mondialisation heureuse» qui  a créé les 7 magnifiques (GAFAM - Alphabet (entreprise issue de la restructuration de Google), Amazon, Meta (ex-Facebook), Apple et Microsoft -, auxquelles s’ajoutent Nvidia, société leader dans la production de matériel et de logiciels en lien avec l’intelligence artificielle, et Tesla), le pouvoir exécutif républicain a décidé de se retirer des accords de Paris sur le climat (Premier mandat de Trump), de ne plus revêtir le caractère de gendarme du monde (Premier contributeur avec l’Allemagne au budget de l’OTAN avec 15,88% respectivement), et de laisser se dévaluer le Dollar américain pour faire d’America First, une nouvelle superpuissance exportatrice de biens et de services.

Au niveau de l’exportation de services, notamment numériques, le positionnement des Etats-Unis n’est nullement préoccupant pour Washington, mais pour ce qui est du domaine manufacturier, il en est tout autrement, notamment du fait de la politique expansionniste de la République populaire de Chine, et qui devrait selon certains analystes, faire de cette dernière, la première puissance économique mondiale en 2049. 

Et c’est de cette perspective en réalité effrayante pour les patriotes américains que se méfie avant tout l’administration conservatrice actuelle. Et pour un pays qui a été l’hégémon économique du XXe siècle, cette peur peut paraître légitime, si un changement de cap radical n’est pas pris lors de ce deuxième mandat de Donald Trump. 

D’ultralibérale, encourageant le multilatéralisme et la facilitation des flux de biens, de personnes et de marchandises avec le reste du monde au moment de la mondialisation des échanges, l’Amérique se transforme aujourd’hui en un pays qui se recroqueville le temps d’identifier avec précision les véritables partenaires commerciaux avec lesquels elle peut sceller de nouvelles alliances visant à réindustrialiser le tissu économique américain, sans omettre en passant le renforcement du complexe militaro-industriel Étatsunien. Et pour ce faire, les calculatrices ont été sorties, et les comptes d’apothicaires bilatéraux ne font que commencer.

La nouvelle approche coopérative qu’imposent les Etats-Unis au reste du monde pendant cette trêve tarifaire de 90 jours, aura à n’en pas douter des répercussions négatives sur la croissance mondiale en 2025, et remet en même temps en cause les fondements même de l’Organisation mondiale du commerce de Genève.       

Trois grands blocs économiques États-Unis, Chine et Europe doivent donc composer avec cette nouvelle donne économique de droits de douane accrus qui une fois actés dans le temps, donneront plus de visibilité à des pays émergents en recherche de croissance additionnelle, et ce, dans un nouveau cadre juridique, réglementaire et monétaire revisité par les grandes puissances économiques du moment.   

Mais quoi qu’il ressorte des tractations actuelles menées en coulisses, le Sud global ne peut que patiemment attendre le verdict du choc des Titans, lequel choc est désormais définitivement inscrit dans un nouveau cycle de rétractation du volume des échanges mondiaux.

L’inéluctable décroissance des mastodontes mondiaux n’est cependant pas une nouveauté, car c’est un concept qui est né des deux chocs pétroliers des années 1970.

Un certain nombre de crises systémiques et de cygnes noirs plus tard, le phénomène de la décroissance est désormais acté en Occident. Reste à savoir comment les éminences grises de Washington parviendront à tirer leur épingle du jeu face à Pékin qui ne manque pas d’atouts pour poursuivre son irrémédiable avancée vers plus de succès économiques et de prospérité créée en Orient.

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