Le moins que l’on puisse dire est que le dernier Mémorandum de la Banque mondiale suscite une vraie polémique au Maroc, suite à l’accueil glacial qu’il a eu auprès de certains membres du gouvernement. Entre ceux qui estiment que le gouvernement devait adopter une posture moins hostile, en acceptant les critiques contenues dans le rapport, et ceux qui remettent en cause la pertinence de ce document, il y a tout un fossé qui fait qu’il est difficile de rapprocher les vues. Cependant, à voir la réaction de certains, ce serait quasiment une offense de contredire cette toute puissante institution internationale.
Faut-il être dans le déni et rejeter tout le contenu de ce rapport ? Evidemment que non. Faut-il, à l’inverse, prendre sur soi et encaisser toutes les critiques sans broncher ? Bien sûr que non.
Face aux critiques justement, le gouvernement a pleinement le droit de réagir, voire de dénoncer d’éventuelles contrevérités. Et que l’on sache, le contenu de ce mémorandum, comme tous les documents produits par certaines institutions internationales, ne sont pas incontestables. Ils sont certes rédigés par des économistes, des experts… Mais, en face, ce sont tout autant des économistes et autres experts tout aussi qualifiés, voire parfois davantage, qui en contestent, arguments à l’appui, la teneur.
Ce n’est pas anodin si le chef du gouvernement, Saad Eddine El Othmani, a boycotté la cérémonie de lancement officiel de ce mémorandum, le 15 mai. Ce n’est pas anodin si Lahcen Daoudi, ministre des Affaires générales et de la Gouvernance, a vertement critiqué ce document. Et ce n’est pas anodin si, quelques jours plus tôt (4 mai), Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, du Commerce, de l’Investissement et de l’Economie numérique, est sorti de ses gonds pour dire que «les rapports de la Banque mondiale ne sont pas paroles d'évangile». Les responsables de l'institution de Bretton Woods ne comprennent pas réellement ce qui est en train d'être fait au Maroc, regardent le pays avec un logiciel ancien et continuent à proférer les mêmes généralités, a poursuivi le ministre, précisant que «lorsque l'on discute avec eux (la Banque mondiale, ndlr) au ministère, on se rend compte qu'ils ne comprennent pas réellement de quoi ils parlent». Transparent pour qui sait lire.
Disons-le autrement : ceux qui rédigent ces rapports au niveau de la Banque mondiale n'ont pas la science infuse et on peut encore moins sacraliser leurs propos au point de les avaler les yeux fermés.
D. W.