◆ Le grand pari de ce début d’année : mener à bien la campagne de vaccination contre la covid-19.
◆ Le Fonds Mohammed VI pour l’investissement, le sésame pour un plan de relance économique réussi.
◆ La généralisation de la couverture sociale, l’une des grandes priorités du gouvernement.
◆ Diplomatie et économie, le ticket gagnant pour le Sahara marocain.
Par D. William
L’année 2021 ne saurait être pire que celle qui vient de se terminer. Certes, ce qui se passe un peu partout dans le monde, avec notamment le durcissement des restrictions dans certains pays et le retour au confinement total dans d’autres, comme l’Angleterre et l’Ecosse, incite au scepticisme. Mais même si le coronavirus joue encore les prolongations, l’arrivée du vaccin pousse en effet à être un peu plus optimiste en termes de perspectives sanitaires et économiques.
Aujourd’hui, si les campagnes de vaccination lancées dans plusieurs pays visent à protéger les populations, elles ont aussi pour objectif de libérer enfin les économies, trop longtemps prises dans les filets de la pandémie liée à la Covid-19.
En cela, l’un des premiers chantiers sur lequel s’attelle le gouvernement marocain en ce début d’année est justement de pouvoir vacciner sa population. Les modalités de cette campagne d’envergure ont été dévoilées et, selon le dernier pointage fait par les officiels mi-décembre, 90% des plans logistiques de transport, de stockage, de logistique et de ressources humaines étaient en cours de finalisation avec les autorités locales. Reste maintenant à entamer cette campagne concentrée sur trois mois pour pouvoir enfin libérer une économie nationale chahutée par la sécheresse et sévèrement malmenée par la crise.
Au point que l’exercice 2020 devrait se terminer sur une récession de 5,8% et un déficit budgétaire de 7,5% du PIB contre 3,5% initialement prévu. Sortir de cette crise et réussir la relance économique figurent donc prioritairement dans l’agenda gouvernemental.
Un plan de relance ambitieux
2021 a valeur de séance de rattrapage pour le gouvernement. Certes, une seule année ne suffira pas pour ramener l’économie nationale au niveau d’avant-crise, mais cet exercice devrait permettre de poser les socles d’une relance durable. A voir les différentes projections, l’optimisme est de mise. La Loi de Finances 2021, qui table sur une campagne céréalière de 70 millions de quintaux, prévoit un taux de croissance de 4,8%, pour un déficit budgétaire estimé à 6,5% du PIB.
De son côté, Bank Al-Maghrib estime le rebond de la croissance à 4,7% cette année, tandis que les prévisions du Fonds monétaire international (FMI) font ressortir un taux de croissance de 4,5%. Pour autant, l’économie marocaine prête le flanc à nombre de facteurs exogènes et endogènes qui peuvent brider ces prévisions de croissance, dont notamment la persistance de la pandémie, la demande extérieure adressée au Maroc ou encore la pluviométrie, de laquelle dépend la campagne agricole. Mais le gouvernement semble s’être entouré de bons mécanismes pour justement œuvrer au rééquilibrage des fondamentaux macroéconomiques, booster les secteurs productifs, créer des emplois pour, in fine, relancer valablement l’économie.
C’est sous cet angle qu’il faut apprécier le plan de relance ambitieux mis en place, émanation de la volonté du Souverain qui, dans son discours du 29 juillet dernier, avait annoncé qu’«environ 120 milliards de dirhams seront injectés dans l’économie nationale, soit l’équivalent de 11% du PIB». Concrètement, il s’agit de mobiliser 120 milliards de dirhams, dont 75 milliards de dirhams sous forme de crédits garantis par l’Etat au profit de tous les segments d’entreprises, et 45 milliards de dirhams affectés au Fonds Mohammed VI pour l’investissement.
Ce Fonds sera le fer de lance de la relance. «(...) Ce Fonds joue un rôle de premier plan dans la promotion de l’investissement et le relèvement des capacités de l’économie nationale. Il interviendra pour doter les secteurs productifs du soutien nécessaire et pour financer et accompagner les grands projets envisagés, dans le cadre de partenariats public-privé», avait fait savoir le Souverain lors de son discours au Parlement le 9 octobre 2020. «(…) L’atteinte de cet objectif, avec un impact significatif sur notre économie, ne pourra être réalisée uniquement sur la base des ressources budgétaires apportées au fonds. Aussi, un objectif prioritaire du Fonds Mohammed VI pour l’investissement porte sur la mobilisation des ressources privées auprès de différents acteurs : banques de développement, investisseurs institutionnels, fonds internationaux, etc.», explique pour sa part le ministre de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’Administration, Mohamed Benchaâboun. Qui renseigne que «plusieurs acteurs ont démontré un fort appétit pour participer au financement des projets ou des fonds thématiques à mettre en place». Aujourd’hui, les opérateurs attendent avec impatience l’opérationnalisation de ce fonds, très favorablement accueilli par la communauté des affaires.
Les autres priorités du gouvernement
A côté de la réforme du secteur public, à travers, entre autres, la création de l’Agence nationale chargée d’assurer la gestion stratégique des participations de l’État et le suivi de la performance des entreprises et établissements publics (EEP), la généralisation de la couverture sociale au profit de tous les Marocains est l’autre chantier prioritaire auquel devra s’attaquer le gouvernement cette année. Il s’agit de coupler le processus de développement à une forte dynamique sociale, visant notamment à améliorer les conditions de vie des citoyens. En cela, le Souverain avait clairement circonscrit les contours de ce projet d’envergure. Il s’agit, ainsi, d’ici 2022 au plus tard :
• d’étendre la couverture médicale obligatoire pour faire bénéficier 22 millions de personnes additionnelles de l’assurance maladie de base;
• de généraliser les allocations familiales;
• d’élargir la base d’adhérents au système de retraite en y incorporant environ cinq millions de Marocains parmi la population active non titulaire d’un droit à une pension;
• et de vulgariser l’accès à l’indemnité pour perte d’emploi.
Pour Benchaâboun,«cette réforme (…) constitue ainsi un levier essentiel d’insertion du secteur informel dans le tissu économique national (…)». Le gouvernement devra donc mener de front tous ces chantiers structurels au cours de cette année.
Même si l’optimisme est de mise, ce ne sera pas une mince affaire pour deux raisons : la première a trait à cet environnement encore squatté par la Covid-19, dont l’imprévisibilité peut faire chavirer tous les plans; la seconde, et non des moindres, est que 2021 est une année électorale. Les législatives qui approchent à grands pas, avec une éventuelle reconfiguration de la sphère politique et l’arithmétique politicienne qui l’accompagne, pourraient fortement perturber les objectifs et ambitions préalablement arrêtés.