La croissance est faible, l’inflation persiste, le taux de chômage augmente…, mais les investisseurs étrangers tambourinent toujours aux portes du Royaume.
Par D. William
L’arrêté des comptes nationaux de l’année 2022, publié lundi par le hautcommissariat au Plan, fait ressortir «un net ralentissement de la croissance économique se situant à 1,3% au lieu de 8% l’année précédente», avec des activités non agricoles qui affichent une augmentation de 3% et celles du secteur agricole une baisse de 12,9%.
Pour ces premiers mois de l’exercice 2023, la situation économique est toujours pesante, dans le sillage de la conjoncture qui a prévalu l’année dernière, marquée notamment par la faiblesse de la croissance, sur fond de hausse générale des prix. Ainsi, même s’il a été observé une détente sur les prix des produits alimentaires, leurs niveaux restent toujours élevés.
Comparé au même mois de l’année précédente, l’indice des prix à la consommation a enregistré une hausse de 7,8% au cours du mois d’avril 2023, résultant de la hausse de l’indice des produits alimentaires de 16,3% et de celui des produits non alimentaires de 2,0%.
Cette persistance de l’inflation amène logiquement à s’interroger sur la posture que va adopter Bank Al-Maghrib quant à la conduite de la politique monétaire. Va-t-elle procéder à une nouvelle hausse du taux directeur pour stabiliser les prix, au risque de brider une croissance qui devrait se situer entre 3 - 3,5% cette année, d’après les différentes prévisions des institutions nationales et internationales ?
La Banque centrale va-t-elle plutôt faire une pause dans le durcissement de la politique monétaire et choisir le statu quo ? A l’évidence, l’inflation restera encore le sujet économique majeur durant les prochains mois, surtout qu’elle continue à grever le pouvoir d’achat des ménages. D’où, d’ailleurs, la manifestation qui a mobilisé, dimanche dernier, à l’initiative de la Confédération démocratique du travail, des centaines de personnes pour dénoncer «la cherté de la vie» et l’«inaction du gouvernement».
Ce contexte inflationniste s’accompagne d’une incapacité de l’économie nationale à absorber les jeunes qui se retrouvent sur le marché du travail chaque année. Le taux de chômage est ainsi passé de 12,1% à 12,9% au niveau national entre le premier trimestre de 2022 et la même période de 2023, touchant particulièrement les jeunes âgés de 15 à 24 ans (35,3%), les diplômés (19,8%) et les femmes (18,1%).
Quelques éclaircies
Le tableau n’est pas cependant si sombre que cela. Il y a quand même des motifs de satisfaction. En effet, même si le PIB non agricole n’est pas suffisamment vigoureux pour résorber le déficit de croissance, notamment lors des périodes de sécheresse ou de déficits pluviométriques sévères, certains secteurs sont source de satisfaction. C’est le cas de l’automobile qui tire parfaitement son épingle du jeu, réalisant des exportations de près de 44,91 milliards de dirhams à fin avril 2023, en hausse de 40,4% par rapport à la même période une année auparavant.
Le secteur touristique, sévèrement touché lors de la pandémie, réalise également de très bonnes performances au cours des trois premiers mois de l’année 2023, enregistrant une hausse des arrivées aux postes frontières de 238% pour atteindre 2,9 millions de touristes. Il dépasse le niveau de 2019 de 17%.
Au-delà de ces réalisations sectorielles, l’un des plus grands motifs de satisfaction reste l’attractivité du Royaume. Et ce, malgré un environnement économique international impacté par la guerre russo-ukrainienne et le nouvel ordre économique mondial post-pandémie qui a favorisé les relocalisations des activités industrielles, le retour au protectionnisme ou encore la promotion de la production locale.
Le Maroc arrive ainsi à toujours attirer les investisseurs internationaux, comme en témoignent les 6 projets prévus par le groupe allemand «Leoni» à Agadir et Casablanca-Settat dans le secteur automobile, et dont les protocoles d’accord ont été signés le 30 mai dernier. Montant global de l’investissement : plus de 932 MDH devant générer 7.100 emplois à l’horizon 2027.
De même, le groupe sino-européen Gotion High-Tech, leader dans le secteur de la mobilité électrique, a signé, le mercredi 31 mai à Marrakech, un mémorandum d’entente avec l’Etat pour la mise en place au Maroc d'un écosystème industriel de production de batteries pour véhicules électriques et de systèmes de stockage d’énergie. Un écosystème qui nécessiterait un investissement record estimé à 65 milliards de dirhams pour la création de plus de 25.000 emplois.
Cet intérêt grandissant des investisseurs étrangers pour le Maroc est stimulé par la nouvelle charte de l’investissement qui, avec ses trois piliers (soutien à l’investissement, amélioration de l’environnement des affaires et gouvernance unifiée et renforcée), dote le Royaume d’un cadre transparent et compétitif qui consolide sa position de puissance économique régionale de référence. De quoi se réjouir, même si ponctuellement les citoyens font face à des problématiques qu’ils estiment plus «urgentes», notamment la cherté de la vie…, avec en toile de fond la hausse des dépenses liées à l’Aid Al-Adha.